~ Chapitre 1 : L'inauguration ~

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Les rayons d'un soleil étincelant traversaient les fenêtres de la pièce de la plus haute tour du château. Ils semblaient avoir répondu à l'appel de celui qui l'occupait, une personne à l'image de la position de l'endroit : la plus difficilement accessible. Un choix qui n'avait point été fait au hasard, puisqu'elle était destinée à Hernior, le jeune roi de Nevethen, royaume le plus puissant d'Eriast. Vêtu d'un bel uniforme doré et pourpre, aux manches bouffantes qui donnaient un peu d'épaisseur à sa frêle figure, il contemplait l'extérieur avec un sourire non masqué. Il avait hâte de sortir, le jour de l'inauguration qu'il attendait tant étant enfin arrivé. Soudainement, sa quiétude fut troublée par l'arrivée de quelqu'un, qui toqua à sa porte de manière assez appuyée, une façon de toquer qui était propre à quelqu'un qu'il connaissait bien.

- Entrez, dit-il sans la moindre hésitation.

Une jeune femme de petite taille, joufflue, s'approcha de lui de très près, c'est à ce moment là qu'il détourna son visage pour la regarder droit dans les yeux.

- Oui ? Demanda-t-il, surpris de sa présence.

Gênée de le déranger, elle avait du mal à le fixer, mais elle était bien obligée de le faire, pour pouvoir lire sur ses lèvres.

- Je suis inquiète, mon frère.

Tourner autour du pot plutôt que d'aller droit au but, voilà quelque chose qui ressemblait bien à sa soeur.

- Pourquoi donc ?

- Depuis quelques temps j'observe beaucoup la pluie, elle se fait de plus en plus rare et de moins en moins abondante. Ce que je craignais finit par arriver, les récoltes se font de plus en plus mauvaises, la famine commence à gagner le peuple.

Le souverain eut un petit sourire en coin, qu'elle était mignonne de se faire du souci ainsi.

- Heverna... Ils sont responsables de leurs problèmes, ils se reproduisent comme des rats et après ils s'étonnent de ne pas avoir assez de nourriture, c'est risible. Je pense qu'il faut tout simplement leur rappeler les bienfaits de l'abstinence.

Elle était certainement la personne la plus pieuse de la famille, mais ce n'était pas pour autant qu'elle allait adhérer à son discours.

- Non je trouve bien qu'ils continuent d'enfanter, cela prouve qu'ils n'ont pas perdu espoir malgré la disparition des...

Il l'interrompit immédiatement, en mettant son index devant sa bouche.

- Cessez donc avec ces sornettes de villageois, ils ont toujours été là. La rareté de la pluie n'a d'ailleurs rien à voir avec cela, le temps a toujours été changeant, il n'y a rien de plus instable en ce bas monde.

La conversation aurait pu durer plus longtemps, mais une nouvelle arrivante fit son apparition et pas des moindres : Elvire, leur mère, une femme qui en imposait à la fois par sa taille et par sa beauté froide.

- Heverna vous n'êtes pas encore prête, que faites-vous ici ? Vous n'allez quand même pas vous présenter ainsi.

- Non mère vous avez raison, je vais aller me préparer, répondit-elle avant de s'éclipser.

Quelques heures plus tard, le moment de se regrouper était venu. Tout le monde devait se rejoindre sur la place non loin de l'entrée principale de la capitale, un endroit qui servait initialement de marché mais qui avait été réquisitionné pour autre chose. Une liasse de curieux était déjà présente, éclectique, elle était presque aussi bien composée de nobles, de soldats que de roturiers. Les yeux rivés sur un artiste, ils attendaient tous que celui-ci dévoile son œuvre, c'est en frémissant qu'il annonça :

- Je vous présente la statue de sa majesté, Hernior Lienareth.

Le voile fut levé, ce qui provoqua des ébahissements. Les compliments abondaient, plus particulièrement du côté de ceux qui étaient proches de la famille royale, les sons de cloches n'étaient pas les mêmes du côté du peuple, qui était moqueur.

- Il est plus grand que le vrai.

- Il ne pouvait pas faire couper ses cheveux ? Nous avons une reine ou un roi ? Il n'y a pas assez de filles chez les Lienareth ?

- Même le grand Heldarion n'allait pas dans une telle démesure, il le méritait pourtant beaucoup plus que cet avorton.

Avorton, voilà un mot qui fit bien glousser l'un des chevaliers, bien plus intéressé par les conversations de la populace, plutôt que par les félicitations du roi au sculpteur et les louanges d'une belle brochette d'hypocrites.

- Qu'est-ce qui vous fait rire de la sorte ? Demanda rudement sa voisine.

- Que le roi n'entende pas ce qui est dit sur lui, c'est excellent.

- Faites-vous plus discret, il n'appréciera pas qu'un de ses meilleurs chevaliers apprécie les railleries qui sont faites à son sujet.

Elle était bien placée pour le dire, puisqu'il s'agissait d'Heldaria, la fille aînée. Difficile de passer à côté tant sa ressemblance avec sa génitrice était forte : d'interminables cheveux châtains, des jambes presque aussi grandes que les siennes et un regard bleu azur propre aux siens.

- Très bien votre majesté, je tâcherai de ne point froisser votre précieux frère.

Il était ironique, elle le savait bien, elle lui donna un coup de coude en guise de réponse. Cette action ne passa pas inaperçue, les yeux perçants d'Elvire montraient clairement sa désapprobation, elle n'avait jamais aimé que sa fille ait autant de proximité avec un chevalier, hélas elle était bien moins docile que sa cadette. Elle s'approcha de sa fille et l'éloigna de lui, mais elle ne lui dit rien, sachant que des réprimandes ne feraient qu'attirer l'attention et donner une mauvaise image d'elle, qui était déjà bien moins appréciée que son défunt époux.

- Il est temps de rentrer.

Eriast, l'ère du renouveauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant