3. Perdue dans le temps

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Le temps qu'il nous reste à vivre est plus
important que toutes les années écoulées.
Léon Tolstoi

— Nevaeh, je suis rentré !

Je me figeai, paniquée, ma respiration devenant plus rapide et plus forte. Le temps semblait s'être arrêté. Combien d'heures, de minutes, de secondes étais-je restée figée sur ma chaise.

— Chérie, t'es dans la chambre ?

J'étais terrifiée qu'il comprenne que quelque chose avait changé. En même temps je me disais qu'il n'y avait aucune chance qu'il imagine que la jeune Neve de 17 ans se trouvait dans le corps de la Neve actuelle. Même moi j'avais énormément de mal à y croire. Après un moment de réflexion durant lequel j'avais imaginé de nombreux scénarios catastrophes, je répondis :

— Matt je suis là !

— Ah, t'as fait à manger ? m'interrogea-t-il en enlevant ses chaussures.

— Je n'ai pas eu le temps, tu ne veux pas commander un truc ? annonçai-je d'un air gêné et calme alors que dans ma tête c'était la panique, l'explosion.

Je ne savais pas que j'étais censé faire à manger. A vrai dire, je doutais de mes capacités culinaires depuis que j'avais essayé de faire un gâteau il n'y avait pas très longtemps. Après avoir failli mettre le feu à la cuisine, j'avais laissé tomber et étais allée en acheter un à la boulangerie.

Mon cerveau était en surchauffe et je perdais le contrôle du navire. Je ne savais pas quoi faire ou dire, je voulais juste me recroqueviller dans un coin et prier pour retourner à la journée d'hier ; une journée normale, avec mes amis, avec des problèmes d'adolescente. Fallait-il que je fasse à manger, que je dise quelque chose ou que je retourne dans la chambre m'enfermer à clé ?

— Nevaeh tu sais que je déteste commander à manger. Tu fais chier ! Tu peux pas un peu t'investir un peu, je bosse moi, commença Matt d'un ton virulent.

— Moi aussi je travaille ! Je t'interdis de sous-entendre que je ne fais rien.

Je ne savais pas pourquoi j'avais dis ça mais je le regrettai aussitôt. Seulement, j'étais en colère face à sa façon de me parler. Je ne savais même pas si je travaillais réellement, peut-être n'étais-je qu'une femme au foyer. Rien que d'imaginer cette possibilité, cela me fit grimacer. Moi, femme au foyer quelle blague. Penser aux différentes possibilités et à ma vie me rendit tout d'un coup plus angoissée. Je ne savais rien de ma vie actuelle et j'étais prête à me jeter par la fenêtre tant j'avais peur.

À ce moment-là, cela me frappa. Nevaeh il m'avait appelée Nevaeh et non Neve, chose que je détestais. De plus, la façon dont il me parlait ne me plaisait pas du tout. Et alors que j'allais répliquer quelque chose de sanglant je me rappelai que je n'étais pas moi. Je me demandai tout de même pourquoi la Neve de 29 ans le laissait lui parler comme ça... Je tentai alors :

— Matt tu sais que je n'aime pas mon nom. Combien de fois je t'ai dit de m'appeler Neve ! déclarai-je en m'avançant doucement vers lui.

— Ma petite folle furieuse, tu sais que je n'aime pas Neve, je préfère ton nom entier. S'il te plaît, arrête de discuter et va commander des sushis, j'ai eu une mauvaise journée. Prends la commande habituelle, dit-il en passant ses mains sur son visage tandis qu'il s'asseyait sur le canapé.

Quel connard il était, à me donner des ordres comme si j'étais son chien. D'un autre côté il avait vraiment l'air exténué. Non, ce n'était pas une raison pour me parler de cette façon. Et puis c'était quoi ce surnom, folle furieuse et puis quoi encore... En même temps que je m'énervais, je me remis à paniquer ne sachant pas notre commande habituelle. J'étais totalement déboussolée, je ne savais pas quoi faire si bien que je me perdais dans mes pensées n'entendant pas Matt qui m'appelait. Ce n'est que lorsqu'il m'attrapa l'épaule que je me rendis compte qu'il me parlait encore. Il répéta sa phrase :

Vivre et Revivre [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant