23. Errer sans but

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Il arrive qu'on pleure, non parce qu'on est faible mais parce qu'on a été fort trop longtemps.

Anonyme

10 janvier 2012,

Je n'en peux plus. Mais vraiment plus. Je passe mes journées à travailler dans un fast-food de merde en puant la friture et souriant aux clients tout ça pour gagner un salaire de rien du tout. Je suis épuisée et je ne fais rien de ma vie. Je couche avec un mec différent toutes les semaines en espérant oublier le vide qui s'est installé en moi depuis l'avortement. Je ne parle d'ailleurs plus à ma mère depuis ce jour et fais tout pour ne pas avoir à la confronter.

Putain ! 23 ans. Dans deux jours je vais avoir 23 ans. Et ma vie ressemble à quoi ?  De la merde. C'est simple j'ai une vie pourrie. Je me souviens de nos discussions avec Ava et Lana et de nos rêves. 14 ans et on s'imaginait déjà dans une grande ville, à l'université, en collocation toutes les trois, en couple et sortant chanter et danser tous les soirs.

J'envie l'époque où mes problèmes se résumaient à rendre mon devoir en temps et en heure, trouver des magasines à feuilleter afin de récupérer les bonnes photos pour les accrocher sur mon mur, enfiler la bonne tenue pour ne pas paraître ridicule au collège... La belle vie quoi. Et à bientôt 23 ans quelle est ma vie ? J'ai déménager dans une grande ville oui mais je ne suis pas à l'université. Je n'ai même pas eu mon diplôme, je suis toute seule, sans amis et je travaille tout le temps pour vivre dans un appartement minable. Ma journée d'aujourd'hui a vraiment été épuisante en plus.

FLASHBACK

06:00, je me réveillais en arrêtant la sonnerie incessante de mon portable. Je n'avais aucune mais alors aucune envie de lever si bien que je replongeai en grognant la tête dans mon oreiller. J'en avais marre mais marre d'arriver tous les matins à 7h au Mcdo pour en partir seulement à 19h. 12 heures de travail, 6 jours par semaine et pour quoi ? Un maigre salaire qui me permettait à peine de me nourrir et de payer le loyer de mon petit studio.

Au bout de 3 minutes top chrono à rêvasser, je me dépêchai de me lever afin de me préparer. En une vingtaine de minutes j'étais prête, attrapais mon sac, une pomme et mon écharpe pour affronter le froid de l'hiver. J'avais 25 minutes de trajet pour me rendre là où je travaillais et en profitai pour penser aux nombreuses choses dont je devrai m'occuper en rentrant. Les factures, la vaisselle, la cuisine et faire mes comptes pour savoir si je pourrais au moins m'offrir une place de cinéma à 10 dollars pour mon anniversaire.

Je n'avais pas hâte d'avoir 23 ans. Je me sentirai exactement pareille dans deux jours que je me sentais maintenant pendant mon chemin jusqu'au travail. Cela ne changerait pas, mon job ne changerait pas, ma vie ne changerait pas. J'arrivai finalement dans la petite salle du personnel, enfilais mon uniforme et me dirigeai vers la cuisine pour préparer les premières frites de la journée. Ça allait être long !

° ° °

12:30 ou ma première et seule pose de la journée. Je disposais de 45 minutes pour déjeuner et je comptais bien les utiliser. J'enfilai mon manteau, mon écharpe et mon bonnet, attrapai mon sandwich et sortis sans attendre une minute de plus. Je flânais dans les rues avant de tomber sur un petit magasin avec en vitrine un nécessaire à dessin.

Je poussai un soupir. Le dessin me manquait. Je n'avais plus de temps à accorder à cette passion mais surtout je n'avais pas l'argent. Je disposais à peine d'assez pour vivre et j'avais donc arrêter de dessiner depuis au moins deux ans. Alors que mon anniversaire était dans deux jours et que Noël avait eu lieu il y avait deux semaines, je n'avais rien acheté pour moi. Ma vie était déprimante, j'avais passé les fêtes seules recevant un appel de 5 minutes de mon père mais aucun cadeau. Ni de lui, ni de moi, de personne. Seulement, en voyant ces crayons, ces couleurs dans cette vitrine, mon cœur se serra.

Il se serra à l'idée que ma vie était minable et que rien ne me rendait heureuse. Je n'avais personne à appeler pour me plaindre, rien qui m'attendait à la maison et aucun avenir. Cependant, j'avais envie d'essayer, envie de me reprendre en main, envie de réussir. Alors je rentrai dans cette boutique et sur un coup de tête, dépensai 22,95 dollars pour ces outils à dessin.

Heureuse pour la première fois depuis de très longues semaines, j'enfournai une bouchée de sandwich dans ma bouche avant d'observer les gens qui marchaient assise sur un banc. Des profils tous différents, tous marchant à différentes allures, certains au téléphones, certains à deux, certains perdus dans leurs pensées mais chacun un but précis en tête j'en étais sûre. Voilà ce qu'il me manquait, un but.

° ° °

Épuisée, je poussai enfin la porte de chez moi et enlevai mes chaussures avant de m'affaler sur mon petit lit. J'avais fais une folie... Je ne pouvais pas me permettre mon achat de ce midi, j'étais devenue folle. Je regrettais déjà mon impulsion parce que je savais que cela me mettait dans une merde sans nom. Presque 23 dollars, c'était beaucoup pour moi et je ne pouvais pas m'imaginer ce qu'il se passerait si je ne les avais pas.

Le regret commença à m'envahir, à m'assaillir de toute part avant de former une boule dans ma gorge et de me faire monter les larmes aux yeux. Cette vague de sentiment venait s'échouer dans mon bas ventre et comprimer mes cordes vocales si fortement que je pouvais plus émettre un son. Mon dieu, l'état dans lequel je me mettais pour 20 malheureux dollars me mit un coup à la poitrine. Voilà où j'en étais, à pleurer pour des putains de crayons et un cahier à dessins achetés.

Et alors que j'essayais de respirer, de me calmer, je jetai un regard au sac contenant cet achat posé sur ma table à manger et je savais. Je savais que demain, je le rendrai. Oui, je ne pouvais pas le garder...

FIN FLASHBACK

Il est 23 heures et je suis fatiguée, exténuée mais je sais que j'ai encore tellement de choses à faire ce soir. Mais je sais aussi que demain je me lève tôt. Alors je ne sais pas quoi faire. Remettre les choses à demain et me coucher ou affronter la réalité et me lever. Et alors que j'écris ces mots je me rends compte que c'est un parallèle cruel de ma vie actuellement. J'ai le choix de me battre pour une meilleure vie sans savoir par quoi commencer, ni comment ou alors je peux laisser tomber et me contenter de ce que j'ai parce que je n'ai plus la force d'essayer.

Je sais. Je sais ce que je vais faire. Je n'ai plus d'espoirs, plus d'envie, aucuns buts. Alors quand je refermerai ce cahier, je vais éteindre la lumière et me coucher. Pour recommencer demain et détester ma vie. Je n'ai pas, plus la force de me battre. Oui je n'ai pas de buts et j'erre sans espoirs dans cet océan de misère qu'est ma vie.

Je refermai le cahier avec hâte, ces mots écrits à la va vite m'avaient fait mal. J'avais mal de savoir ce que j'avais vécu et j'avais mal d'avoir perdu espoir si facilement. Mais cela ne faisait que renforcer ma décision. J'allais avoir mon diplôme et j'allais me battre. Parce que maintenant tout était plus facile, j'avais un but.

Alors j'éteignis la lumière, posai mon journal et m'allongeai le cœur et le cerveau légers en m'imaginant ce que je ferais en rentrant chez moi. Je bosserai, j'enlacerai mes amis et je parlerai avec Lana et Jess. Et je savais qu'en pensant à cela, j'étais heureuse. Cependant, au fond de moi je sentais un sentiment qui faisait doucement surface. Et je ne comprenais pas, je ne comprenais pas pourquoi en pensant à rentrer chez moi, dans mon temps, je ne ressentais pas de l'envie mais de l'angoisse.

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Alors cet aperçu de la vie de Neve vous en pensez quoi ?

Ses problèmes d'argent, son job, ses envies...

Que pensez-vous qu'il va se passer au prochain chapitre ?😉

Et bonne rentrée à tous !!!!!

N'oubliez pas de voter et commenter,

Bisous et à la prochaine,Heloise❤️

Instagram : heloecrit

Vivre et Revivre [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant