Les mots de Gareth se confondirent avec le vent, se laissèrent emporter par la brise glacée. Valérian resta planté, figé. Ses yeux ne purent se détacher de ce corps étendu à ses pieds alors qu'il ne désirait que tourner ailleurs son regard. Combien de fois avait-il vu des cadavres, à travers l'écran de sa télévision ? Combien de fois avait-il vu pire, bien pire que ça dans les séries qu'il regardait ? Mais cette vision n'était que trop réelle. Ce corps, ce sang. Ce n'était pas faux. Ce n'était pas du cinéma.
-Je vais vomir... se plaignit Gareth, au loin.
Ce corps, que même la neige tentait de camoufler à leurs yeux, était la confirmation sanglante des appréhensions de Valérian. De ce mois complet d'angoisse. Mais il n'avait aucune idée. Aucune idée.
Il ignorait que ce n'était que le début. Que bientôt, très bientôt, des êtres chers seraient couchés à la place de cette femme. Couché, sans vie, dans la neige froide. S'il l'avait su, les choses auraient-elles été différentes ?
-Pearl, éloignes-toi s'il te plait, demanda Page à la jeune femme qui ne pouvait détourner ses yeux du macchabée, chaque muscle de son petit corps en tension et la respiration figée.
Il la prit par les épaules et l'entraîna dans sa voiture.
-Gareth, va avec elle, fit-il au jeune homme en revenant.
-Je tiens le coup, lieutenant, assura Gareth, avec un sourire faux et la voix chavirante. Ce n'est pas si glauque que ça !
Et il ne savait pas que cette décision était stupide. Que c'était le choix le plus irresponsable de sa courte carrière. La dernière résolution qu'il aura à prendre. Mais était-ce seulement sa faute ? Ce n'était la faute de personne.
Le brouillard s'était levé, rendant cette scène de crime d'autant plus sinistre. Valérian voulait partir, rentrer chez lui, se faire un chocolat chaud et oublier. Bien qu'il sache que ces images ne partiraient pas. Pas si facilement. Il voulait quitter ce parc au plus vite. Alors il prit une profonde inspiration et arpenta le dernier mètre qui le séparait du cadavre.
Elle n'avait pas de blessure apparente sur son corps nu et rendu bleu par le froid. Il n'était pas en mesure de déterminer l'heure de la mort, mais cela devait être recent. Il fut d'abord gêné par la vue de l'intimité de la femme, mais se dit qu'il devait de toute façon s'y habituer. Ses poignets, tranchés, étaient sanglant et teintaient la poudreuse d'une couleur rouge brunâtre. Ses mains ne semblaient pas avoir été laissées sur la scène de crime et la vue des moignons lui retourna l'estomac. Son visage était dissimulé sous un foulard, comme pour qu'on ne puisse pas le voir. Les policiers étant venus les premiers n'y avaient pas touché.
-Je peux l'enlever ? demanda-t-il à Darwin qui était resté à ses côtés tandis que Jill arpentait le parc à la recherche d'empreintes inhabituelles.
-Ils ont pris toutes leurs photos, ça ne devrait pas poser de problèmes.
Avec l'aide du lieutenant, le jeune homme déroula le foulard soigneusement placé autours de la tête de la victime. Puis il contempla son visage, intact. La jeune femme devait avoir à peine une trentaine d'année, tout au plus. Ses lèvres étaient bleues et gercées par la température et la circulation de son sang qui s'était arrêtée.
-Je crois qu'on tient la cause du décès, annonça Darwin.
Il tourna délicatement la tête de la victime, dévoilant une plaie sanguinolente au niveau du crâne.
-Ca a été fait avec quoi, d'après toi ? s'enquit Valérian.
-N'importe quoi, c'est bien ça le problème... soupira le lieutenant. Ca peut être le plus banal de tous les objets du quotidiens. Les médecins légistes pourront nous en dire plus, mais j'aimerai savoir ce que tu penses de cette scène de crime.

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Moonless Night
AksiyonPetit policier d'une brigade campagnarde, l'officier Valérian se voit chargé d'une sérieuse affaire de viol. Lui qui rêvait de grandeur et d'exploits, il réalise les dangers et menaces auxquels quiconque s'attaque au crime subissent. Les chasseurs...