Moonless Night

11.

Cheryl habitait dans l'appartement le plus haut de l'immeuble. Une façon comme une autre d'éviter la population humaine. Plus il en remarquait, et plus Valérian sentait que cette femme était son contraire. Elle semblait haïr les relations amicales qui se créent entre deux êtres humains. Pire, elle les fuyait, manifestement. C'était intéressant à savoir, du moins pour le jeune homme. Cela occupait son cerveau tandis que ses jambes gravissaient d'elles-mêmes les innombrables marches, l'empêchait de céder à une panique pourtant présente. 

La porte d'entrée de l'appartement de Cheryl apparu beaucoup trop vite à son goût et il n'eu même pas le temps de rassembler son courage que Darwin sonnait déjà. Le silence tomba, tous étant à l'affût du moindre bruit venant de l'intérieur et indiquant une quelconque présence de vie. A la plus grande surprise de Valérian, dissimulé derrière ses collègues, la porte s'ouvrit dès la première sonnerie. Une femme, dont le jeune homme avait du mal à discerner les traits, sa vue étant brouillée par la tête de Jill juste devant lui, se tenait dans l'encadrement de la porte, l'air sauvage et mécontente.

Darwin se présenta. Valérian sentait qu'elle les jugeait tous du regard, évaluant sûrement leur manière de réagir à cette situation qui aurait pu la faire éclater de rire. Il était persuadé qu'elle allait refermer cette porte aussi rapidement qu'elle venait de l'ouvrir et qu'ils allaient tous redescendre dans leur propre appartement pour prendre le train retour dès le lendemain. Mais son visage affichait une hésitation nette et, à la stupéfaction générale, elle se décala pour les laisser entrer.

Son appartement était plus étroit que le leur, et très sombre, aussi. Elle devait être en train de regarder la télévision avant qu'ils ne la dérangent, car aucune lampe n'était allumée et la télécommande traînait sur son canapé. Darwin la regarda avec beaucoup d'amabilité, attendant qu'elle les dirige vers des sièges ou n'importe quoi qui leur permettrait de s'assoir. La jeune femme, qui était vraisemblablement la fameuse Cheryl les regarda avec une férocité qui leur fit bien comprendre qu'elle n'aimait pas être dérangée.

 Elle était assez petite, mais pas autant que Pearl qui paraissait minuscule à côté d'elle. Ses cheveux bruns étaient attachés en un chignon négligé, ce qui montrait bien qu'elle ne s'attendait pas à accueillir quelqu'un. Sa peau était basanée, plus claire que celle de Valérian. A en juger par sa masse capillaire évidente, ses yeux clairs et la couleur de sa chair, le jeune homme jurerait qu'elle avait des origines mexicaines. Son visage rond la rendait aussi inoffensive et innocente que son expression était effrayante. Valérian n'eut pas besoin de preuve pour croire qu'elle pouvait être redoutable. Sans cette agressivité appuyée, Cheryl pouvait sûrement être une jeune femme charmante, voire mignonne. Mais la haine qui se dégageait de ses yeux bleus empêchait chaque membre de l'équipe de faire le moindre geste. Darwin fut le premier à avoir le courage de briser le silence qui s'était installé, durant lequel tout le monde avait dévisagé la jeune femme avec surprise. Mais cette dernière coupa court à ses belles paroles d'un ton sec :

-Vous avez intérêts à faire vite et à être convaincants, parce que ma décision sur votre affaire est déjà prise.

Alors que ses collègues affichèrent une expression surprise, la seule chose qui apparut sur le visage de Valérian fut un sourire. Un sourire d'amusement. Parce que cette Cheryl était décidément une femme très intéressante. Intelligente, aussi. Et très prévisible, également. Cela se sentait. Elle avait peur, chaque cellule de son corps se fatiguait à le crier. Et bien qu'elle cherchait à le cacher, ses traits étaient bien trop crispés pour une personne censée être calme. Elle répondait avec agressivité mais en restant tout de même sur la défensive.

-Très bien, soupira Darwin. Nous avions deviné que votre absence de réponse était un refus mais ce que nous avions à vous dire est important. Trop pour être simplement mit sur papier.