La Porte des Cendres (BL)

Scène 46 : It's been a while

   - N'y a-t-il donc que des traîtres dans mes rangs? hurla de rage Atlas, une veine saillant sur son front.

   Waaah c'était génial de le voir comme ça, presque jouissif. Il perdait ses moyens, perdait cette pseudo-assurance qui m'énervait depuis le début de notre affrontement. Barthe m'embrassa sur le front, ce qui remua quelque chose en moi, puis s'avança, me barrant la route de son bras. Je fronçai les sourcils, mais n'eut pas le temps de réagir qu'il me dit :

   - Vas-y.

   - Quoi? Où? (J'attrapai son bras et essayai de l'écarter doucement) Je ne bouge pas. Il est incroyablement fort, Barthe, ne...

   ... te mets pas en danger, aurais-je voulu finir. Mais il ne m'en laissa pas l'occasion. Mon cerveau avait mis du temps à comprendre, mais, si Barthe était notre grand frère à moi et Kith, alors c'était un démon? Et qui dit démon dit transformation démoniaque. 

   La première chose que je remarquai fût que ses cheveux devenaient d'un blond platine, presque blanc. Quatre ailes aussi claires que sa chevelure poussèrent dans son dos, battant doucement. Ses yeux, eux, ressemblaient à s'y méprendre à ceux de Kith dans sa propre transformation. Sa tenue se modifia aussi, me faisant penser à celle d'un guerrier de ténèbres. Il sortit un sabre de son fourreau (je remarquai qu'il en avait deux sur les hanches, et un dans le dos) et le pointa vers Atlas.

   - Il est l'adversaire le plus fort ici, mais il y en a d'autres Adriel. Je m'occupe de lui. Va rejoindre tu-sais-qui.

   Je rougis au sous-entendu, et secouai la tête.

   - Non! Je ne vais pas t'abandonner, je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose.

   - Ne t'inquiète pas, petit Adriel, je reste avec lui.

   Je me tournai vers la voix, et vis Felipia, ses lèvres étirées en un rictus qui sous-entendait une folie meurtrière sur laquelle je refusais de me pencher.

   Elle me fit un clin d'œil.

   - Ça faisait un bail, hein?

   Elle se posta à côté de Barthe et, à son arrivée, Atlas s'était reculé d'un pas, l'hésitation se lisant dans son regard.

   - OK, je vous laisse, déclarai-je sans hésitation.

   Je pris une grande inspiration et bondis dans les airs. S'il était avec Felipia, rien ne pouvait lui arriver. Elle pouvait botter le cul de la Mort elle-même si elle le souhaitait.

   J'atterris et baissai la tête de justesse, évitant les griffes acérées - et lumineuses de Goudron - de ma très chère sœur. Ses yeux, ainsi que ceux de Ward, lorsqu'ils m'aperçurent, s'écarquillèrent de stupéfaction. Ils restèrent figés à m'observer et, pendant cette seconde d'immobilité, j'eus tout le loisir de les observer à mon tour.

   Ils étaient indéniablement blessés, plus ou moins gravement. Le buste de Kith était ensanglanté, elle arborait des brûlures sur le ventre et les avant-bras. Quant à Ward, son dos était en lambeaux, et sa jambe droite, son torse et ses flancs arboraient de vilaines griffures profondes. Mais, surtout, ses tatouages noirs étaient revenus. Ceux qui apparaissaient lorsqu'il faisait sérieusement appel à ses pouvoirs. La dernière fois que je les avais vu, c'était lors de l'attaque sur Terre, le jour où mon propre pouvoir s'était dévoilé.

   Je soupirai intérieurement.

   - Stop! Ça suffit.

   L'expression de ma sœur se changea en une fraction de seconde, passant de l'étonnement à une froideur indescriptible.