Postillon

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Bonjour à tous,
Je m'excuse pour cette publication retardée, une série de petits imprévus ont mis à mal mon agenda. Je vous souhaite une bonne lecture avec Keïra pour sa première apparition et à dimanche ! Bonnes fêtes à tous !

***

Keïra fit doucement coulisser le loquet permettant d'ouvrir le judas. Au fond de la cellule, la silhouette se recroquevillait sur elle-même, poussant le sol de ses pieds pour mettre le plus de distance entre elle et la porte. Elle referma l'ouverture dans un claquement métallique sec puis se retourna vers Antémiqus.

Son petit crâne chauve dodelinait lentement alors qu'il penchait ses yeux sur le registre qu'il avait en main. Le peu de cheveux qui lui restait descendait en cascade le long de ses tempes pour rejoindre sa barbe fournie. Ses lunettes, quant à elles, avaient trouvé leur place au bord du précipice de son nez, se retenant de justesse à ses oreilles.

- Quel est son nom ? demanda-t-elle

- Zébulon, lui répondit le petit homme en levant furtivement les yeux vers son interlocutrice.

- Et son nom ?

- Y'en a pas. Il se nomme Zébulon, c'est tout, dit-il en retournant la page suivante comme à la recherche de l'information.

Keïra regarda une nouvelle fois la porte métallique polie de la cellule. Elle pouvait même se voir dedans. Le bronze poli miroir était magnifique, comme le reste de la prison des recteurs et même de leur académie. Elle faillit s'approcher pour mieux voir ses cernes et si une de ses tresses ne s'était pas défaite quand une voix l'interpella.

- Il passe en interrogatoire demain et en jugement après-demain, dit une voix rauque derrière eux.

Immédiatement Keïra se retourna pour se mettre au garde à vous, mains jointes dans le dos. Elle reconnut du premier coup d'œil l'armure de la Rectrice Mavréa. Il n'existait que cinq Recteurs dans le monde souterrain des cités-cavernes et chacun d'entre eux était une quasi-légende à lui seul. Leur équipement était à la fois la marque de leur puissance et le signe de leur distinction. Et comme tout le monde le savait, cette armure finement ouvragée aux reflets cuivres pouvait se révéler particulièrement mortelle.

- Les témoignages le décrivent comme un bon mineur, il semble ne jamais avoir dérogé au règlement. La fouille de son habitation n'a donné aucun résultat. Je pense qu'on devrait ...

- Vous ne ferez rien du tout Gardienne Keïra, à part recevoir votre ordre de mission chez les Ordonnanceurs.

L'ordre provoqua une décharge dans le dos de la jeune Gardienne à qui on rappelait son grade. Même si cela ne lui plaisait pas d'obéir, elle respectait la hiérarchie. Ils devaient toujours avoir une bonne raison et leur expérience méritait qu'on les écoute. S'inclinant avec la main à l'horizontale en travers du torse, elle prit congé sans un mot de plus. Elle remonta donc les escaliers et les couloirs de pierre, talonnée par Antémiqus.

- Pauvre homme, lâcha-t-elle en remontant un long couloir vide.

- Ce n'est plus dans notre juridiction, n'y pense plus.

- Je sais ... soupira-t-elle.

Au cours de son entraînement on lui avait souvent reproché de remettre en cause les ordres ou de questionner leur nature. Elle était une gardienne, cela représentait plus que le bras armé de la justice et le bouclier du peuple. Ce corps d'élite traquait les criminels les plus dangereux pour Antescript et l'Union. Toutes les cités avaient convenu de la nécessité d'une telle force d'intervention. Et Keïra avait toujours fait partie des meilleurs éléments. Elle aimait le terrain, pourchasser et combattre ses adversaires. Mais cet homme au fond de la cellule lui paraissait aussi innocent et faible qu'un bébé rat laineux.

Le Dealer de MotsWhere stories live. Discover now