Impasse

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De retour auprès de Timothé avec le jeu d'échecs, elle le posa sur la table pour lui laisser prendre l'initiative afin qu'il se sente en confiance avec elle, qu'il comprenne qu'il n'a rien à craindre d'elle. Elle allait devoir prendre des gants avec lui car un rien pourrait le faire basculer et le faire se renfermer sur lui-même. Elle laisse régner le silence, attendant que ce soit lui qui fasse le premier pas.

« Je vous laisse commencer, vous prenez les blancs. »

« D'accord Timothé. Une seule condition, celui qui réussit à prendre une pièce à l'adversaire a le droit de lui poser une question à laquelle il devra répondre sincèrement. D'accord Timothé ? »

Après quelques secondes d'hésitation, il accepta finalement, peut-être trop sûr de sa victoire facile face à un adversaire qu'il devait présumer plus faible. Mais ce serait faire injure à son intelligence de croire qu'il pourrait sous-estimer quelqu'un sans le connaître. Il devait donc avoir une idée derrière la tête, mais laquelle ? Elle devait tenter d'être plus maline que lui, quitte à perdre la partie mais gagner quelques pions pour avoir des réponses à ses questions.

Au bout de même pas dix minutes de jeu, elle avait déjà perdu la partie sans même avoir gagné un seul pion. Il fut assez prétentieux et sûr de lui, lui proposant une revanche, ce qu'elle accepta immédiatement car elle n'avait toujours rien pu lui soutirer comme information. Après les premiers échanges de mise en place, elle réussit à lui prendre un pion et se réjouit de pouvoir lui poser une première question :

« Timothé, quel rapport avais-tu avec Patrice Laffont ? »

« Il en avait après ma sœur. Il voulait coucher avec elle mais je savais qu'il n'en avait rien à faire d'elle. C'était juste une sorte de pari pour lui. Il voulait que je parle de lui à Katy, que je lui fasse croire qu'il l'aimait et qu'elle devrait sortir avec lui mais il en était hors de question. Pas un type comme lui. Katy mérite tellement mieux. Voilà ce que je sais de lui. »

« Et rien d'autre entre vous ? Pas de harcèlement, pas d'insultes ? »

« Un pion, une question. » répondit-il en souriant. Il savait très bien ce qu'il faisait. Les nombreuses fois où il avait pris un pion au Lieutenant Bexton, il s'était contenté de simples questions telles que :

« Pourquoi avez-vous décidé de devenir gendarme ? »

« Quel âge avez-vous ? »

« Avez-vous des enfants ? »

« Avez-vous un animal de compagnie ? »

.... Rien qui ne puisse la mettre inconsciemment sur la voie. Par miracle, elle gagna un second pion.

« Quelle chance pour moi. Je te repose la même question que tout à l'heure. Est-ce qu'il t'a déjà menacé ou harcelé d'une manière ou une autre ? »

« Patrice était un abruti qui pensait que la manière forte est la réponse à tout. Alors oui, quand j'ai refusé de l'aider pour ma sœur, il m'a harcelé pendant des semaines pour me faire craquer, les insultes étaient quotidiennes, j'ai même parfois eu le droit à des coups mais je n'ai jamais cédé. Et il a finalement abandonné quand il s'est trouvé une nouvelle cible. Il ne mérite pas tant d'attention de votre part. 

« Et pourquoi ne mériterait-il pas tant d'attention de ma part ? »

« Un pion, une question. »

Cette phrase commençait à agacer sérieusement Sarah. C'est elle qui avait fixé la règle du jeu mais cette répétition lui rappelait sans cesse l'inscription notée sur les poitrines des victimes qui se répétait également sur les scènes de crime : « Tôt ou tard ...»

Meurtres en Terre LorraineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant