Chapitre 15.

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Lorsque je reprends un semblant de conscience, je veux faire un pas en avant, mais mes pieds ne se reposent sur rien d'autre que le vide. La chute me fait ouvrir les yeux. Je me vautre littéralement de tout mon long et tombe d'au moins un mètre de hauteur. Je grogne de douleur, je suis tombé à plat ventre, ça m'en a coupé le souffle. Bordel j'ai tellement mal à la tête, c'est pas humain.

-Louis, ça va ?

Harry ?! Je me redresse d'un bond, mon équilibre se faisant la malle, je sens une main me rattraper par le bras. Je me retourne et me retrouve face au brun. SES YEUX ! Ses yeux sont redevenus normaux ! Aussi normaux qu'ils aient pu l'être quand je l'ai connu, du moins. Comme pour m'en assurer, j'attrape son menton entre mes doigts pour mieux examiner son visage, et il sourit. J'ai même l'impression qu'il pouffe de rire. Après tout, je dois avoir l'air sorti d'asile, les cheveux en bataille, couvert de poussière avec des vêtements dans un état pitoyable, et une expression perdue entre le choc et la panique.

-Tu vois ? Je vais bien. Mes yeux n'ont rien. Il sourit.

Je pousse un long soupir de soulagement et me laisse tomber jusqu'au sol, en prenant ma tête entre mes mains.

-Viens, on ne peut pas rester ici trop longtemps. Il m'informe en me tendant la main.

Je l'attrape à contre-cœur et le laisse me tirer vers le haut. Autant, j'étais motivé comme jamais à courir, dix minutes plus tôt, autant là je suis vidé de toute mon énergie. Mes batteries sont à plat, et même respirer me demande trop d'efforts. En passant les alentours en revue, je réalise que je reconnais l'endroit. Je crois. On est dans une sorte de chemin de terre, mais étroit. Comme quelque chose creusé en contre-bas. Nous n'avons pas à marcher longtemps avant de sortir de l'espèce de tranchée et je réalise que j'avais raison. Mon regard tombe directement sur une maison et je la reconnais. C'est celle où on a dormi. Enfin, plutôt celle où j'ai dormi, car Harry n'avait pas voulu se reposer. Et en me retournant, je comprends que la tranchée de laquelle on vient de sortir est celle que nous avions emprunté pour venir. Nous nous dépêchons de rentrer dans la maison et Harry n'attend pas plus longtemps pour ouvrir à nouveau le passage secret dans la cheminée. Cette fois-ci, je ne me ferai pas avoir à le perdre de vue et je le suis de près, en baissant la tête pour être sûr que, cette fois-ci, je ne me prendrai pas le plafond dans le front.
En arrivant dans l'espèce de bunker, et que l'endroit s'éclaire, un immense soulagement s'empare de moi. Tant et si bien que j'ai envie d'en pleurer. Je retire mon sac à dos et le lâche dans un coin avant de me diriger machinalement vers le fauteuil dans lequel j'avais dormi. Je me laisse tomber dedans et soupire, laissant mon regard vagabonder dans le vide. Après ce qu'on vient de vivre, le calme de la pièce me paraît étrange. Trop étrange. Le brun ne tarde pas à me rejoindre en se posant sur le canapé à côté. Aucun de nous deux n'ose parler, je crois qu'on ne veut pas revenir à la réalité. Un peu de silence ne nous fait pas de mal.
Tous les événements des dernières 24 heures me reviennent doucement en mémoire. J'ai failli mourir, au moins trois fois aujourd'hui. Enfin, "me faire tuer" serait un terme plus exact. Quand Rowena était sur le point de m'égorger, quand elle a aspiré mon âme ou peu importe ce qu'elle foutait, et enfin, quand elle a failli me griller comme une merguez. Cette dernière tentative était très théâtrale. J'ai tapé les plus gros sprints de mon existence, et quelque chose me dit que ce ne sont que les premiers d'une longue série. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises.
J'ai revu Gemma, donc elle n'est pas morte. Elle était en captivité mais ne montrait aucun signe de torture, c'est déjà un bon point. Harry a perdu ses capacités, s'est fait clouer les mains, torturer, tabasser, et a enfin récupéré ses capacités. Enfin, c'est ce que je déduis, vu que ses yeux sont redevenus comme avant. Il nous a sauvé la vie, comme il l'a promis. Un truc énorme avec des ailes et sorti de nulle part, nous a aidé aussi. Bien que je doute du fait que ça ait été une coïncidence, on a vraiment eu énormément de chances que ce truc n'ait pas essayé de nous bouffer nous au lieu d'essayer de bouffer Rowena. D'ailleurs est-ce qu'il a réussi ? Ça nous enlèverait une énorme épine du pied, et ça nous éviterait de l'enfermer quelque part, nous-même.
D'ailleurs, qu'est-ce que ferait Harry d'elle, une fois qu'il l'aura neutralisée et capturée ? L'enfermer, oui, sûrement, mais après ? Il ne peut pas la tuer. Enfin, techniquement, si. Et après tout ce qu'elle leur a fait subir, à lui et Gemma, ça ne serait pas cher payé. Mais Harry n'est pas un meurtrier. Il est con, arrogant, provoquant, énervant au possible, mais il n'est pas un meurtrier. S'il y a bien une chose dont je suis sûr, c'est de ça. Et personne ne mérite de mourir, pas même Rowena. Non, elle, elle mérite de pourrir au fond d'une cellule pour lui laisser le temps de réfléchir à tout ce qu'elle a fait, afin que ça la hante jusqu'à sa mort. C'est une sorte de torture psychologique, et c'est pas plus mal.

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