Errer [texte]

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J'erre.

Errer : marche sans but ni objectif quelconque.

Exactement ce qui définit mon odyssée à travers les rues sombres et sales de la ville. J'erre et je vagabonde dans les avenues nauséabondes.

Retranché derrière un voile d'inconsistance, bien caché dans ma bulle de douleur et de souffrance.

Je m'aveugle de lumière artificielle et de néons clignotants jusqu'à ne plus voir mes poignets abîmés. Je m'assourdi du rugissement des moteurs, des hurlements des publicités, du brouhaha constant des discussions jusqu'à ne plus entendre les battements douloureux de mon cœur. Je m'étourdi de l'effervescence de la nuit, je me drogue avec la foule sans consistance ni conscience, je m'enivre des sentiments, des émotions, de la joie, de la peine, du stresse qui se dégage des êtres humains autour de moi.

Peut-être qu'ainsi j'oublierai ma propre souffrance.

Je marche, je marche, et je marche encore. J'espère que je finirais par m'écrouler. Et en même temps j'ai peur. Si je tombais, jamais jamais je ne pourrais me relever.

Je me déteste.

Incapable d'en finir véritablement. Incapable de vivre. Condamné à flotter entre la ville et le monde des morts, éternellement. Traîner ma carcasse percluse de douleur, me soûler avec la vie, tout est bon de toute manière pour oublier ce qui m'enserre le coeur.

J'aimerais m'endormir ici, au milieu des milliers de vies qui fourmillent autour de mon corps inerte.

Inerte : qui ne bouge pas. Sous-entendu : qui n'est pas vivant.

Suis-je mort ? Suis-je vivant ? Ai-je vraiment envie de vivre ? J'aimerai juste dormir. Que mon corps soit piétiné par la foule impatiente, et finisse par se fondre avec l'asphalte.

Qu'elle finisse par m'oublier.

Oui, oubliez moi. Que je m'oublie. Que je disparaisse, effacé de ma propre mémoire.

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