LGDC Powers 1. Les Lucioles de Lumière

Chapitre 18

   Une demi-heure plus tard, j'aperçus un bout de queue noire depuis un arbre. Je reconnus vite l'odeur de Nuage Oublié. Prudemment, je m'avançai, ne voulant pas lui faire peur. Je l'entendais murmurer pour lui-même, des paroles, mais je fus trop loin de lui pour comprendre, et les bruits de la forêt couvraient sa voix. 

 «  Nuage Oublié ? » 

  J'entendis un reniflement, comme s'il ravalait des larmes. L'apprenti tacheté passa sa tête depuis l'arbre. De longs sanglots coulaient sur ses joues et s'écrasaient au sol. Il me dévisagea d'un regard glacial. 

  «   Laisse-moi tranquille. 
  — Mais... pourquoi tu t'es enfuit ? 
  — Laisse-moi, je te dis, tu comprendras pas. » 

  Il avait vraiment l'air d'aller mal, je ne pouvais pas le laisser comme ça ! Je m'assis près de lui et le regarda. Je fis un bond en arrière tellement je fus horrifiée. Les pattes blanches de Nuage Oublié étaient couvertes de blessures et de sang.
  Le sol autour de lui était couvert de son propre sang, âcre et pourpre. Les griffes plantées dans sa patte droite, le sang continuait à couler abondamment. Je ne pus m'empêcher de lâcher mes larmes tellement j'avais mal pour lui. 
  «   Mais... arrête ! Tu te fais mal ! 
  — Va t'en, » grogna t-il d'une voix noyée par ses larmes. 

   Je lui enlevai ses griffes de sa patte, mais ça n'arrangea rien. Nuage Oublié gémit de douleur et commença à avoir des difficultés à respirer, sûrement parce qu'il perdait trop de sang. Il perdit le contrôle de ses pattes et s'écroula inerte au sol, baignant dans son sang.
   Il respirait lentement, je devais l'apporter à Plume de Lumière le plus rapidement possible. Je passai sous son ventre pour le prendre sur mon dos et me dépêcha de rentrer au camp. Mes pattes traînaient dans la poussière si bien qu'elles en devenaient noires. Le sang du blessé déteignait sur mon pelage, j'étais pas belle à voir. 
   J'arrivai au camp, mais personne ne se tourna vers moi. Ils étaient tous dans la tanière des guerriers, même Plume de Lumière y était. Et tout le monde s'en fichait de Nuage Oublié, en totale agonie. La révolte coulait dans mes veines, mais je ne pouvais rien faire. Les apprentis n'étaient pas considérés de la même manière que les guerriers, pour soi-disant question d'intelligence et de maturité.
   Pourtant, des apprentis tels que Nuage du Ciel ou Nuage de Cendre possédaient ces qualités-là. Je ne voyais pas pourquoi l'on serait moins écouté. Et puis, sans vouloir me vanter... Je suis intelligente pas vrai ? Tout en me questionnant, j'arrivai dans la tanière de Plume de Lumière.         Sur un nid de mousse et de feuilles, je déposai Nuage Oublié. Les plantes qui donnaient au nid toute son confort devenaient pourpres avec le sang qui coulait. J'eus un pincement au cœur et une étrange peur me submergea. Je me demandai pourquoi Nuage Oublié se faisait du mal. C'est vrai que par moment je l'avais trouvé dépressif... Mais je n'aurai jamais imaginé qu'il irait jusque-là. 

   Alors que je m'apprêtais à sortir de la tanière, Plume de Lumière en entra, l'air soulagé. Apparemment, Fleur de Tempête irait mieux. Tant mieux, ça évitera qu'Etoile d'Orage fasse tout un discours sur sa mort et sur me pourquoi du comment il choisira tel nouveau lieutenant. Bon je sais que ce discours c'est pour laisser un dernier hommage à un mort qui rejoint le Clan des Etoiles, mais pour moi ça ne veut pas dire grand-chose. 
   Je commençai à douter vraiment de moi ; je n'aurai jamais pensé qu'un jour je détesterais le Clan des Etoiles. J'aurai voulu ne pas être l'élue de leur stupide prophétie. Je regardai Plume de Lumière appliquer les plantes médicinales sur Nuage Oublié, qui saignait encore abondamment malgré les cataplasmes. Plume de Lumière se tourna vers moi. 

  «  Oh bonjour, Nuage de Cristal. Sais-tu ce qui lui est arrivé ? 
  — J'ai remarqué son absence dans la foule du Clan, alors je suis allé le chercher dans la forêt puisque personne d'autre ne s'en souciait. Je l'ai retrouvé en train de s'infliger des blessures. Il doit vraiment pas aller bien pour se faire ça, expliquai-je en essayant de rester calme. 
 — Oh... non... »