Chapitre 8

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21 février
Pdv de Maxime

Je suis réveillé en sursaut par un cri qui me déchire les tympans. Un hurlement horrifié qui perce les murs, la peau, les veines et qui s'attaque de plein fouet à ton cœur pour y laisser un vide à t'en faire mal à la poitrine. Ce son qui semble venir directement des enfers provient de la chambre d'à côté. J'aperçois Nathan se lever de son lit et nous rassure Christopher et moi:

- Ne vous inquiétez pas c'est Harper qui a fait un cauchemar, rendormez vous.

Facile à dire, je n'avais jamais entendu un cri si rempli de souffrance.

- Elle est souvent comme ça? demandé-je.

Il ignore ma question et sort de la chambre. Nous l'entendons la dorloter à côté. J'échange un regard avec Christopher:

- A ton avis, elle a vécu quoi pour que ses cauchemars lui fasse pousser un hurlement comme ça?

- Je ne sais pas, mais ça a dû être horrible. je lui réponds.

Il hoche la tête et nous attendons dans le silence. Je me demande si ça a un rapport avec les larmes de cette après-midi. Maintenant, je regrette de ne pas avoir insisté davantage. Si c'est à cause de Raphaël je vais l'étriper! Même si Harper m'a rassuré en me disant que ce n'était pas de sa faute je ne la crois pas, ou de moins plus depuis qu'elle se réveille en hurlant avec un cri comme celui-ci. Mais pourquoi elle lui a tenu tête ? Cette nana est complètement folle ! C'est sûr que Christopher ne nous a pas aidé non plus, Nathan et moi, en la félicitant pour sa tentative d'intimidation. Et puis, son frère m'a ensuite rassuré après qu'elle soit partie mangé mais je ne comprends pas non plus. Il avait l'air furieux quand il a entendu la nouvelle puis il a suffit qu'ils échangent deux mots tous les deux et il s'adoucit instantanément. Je ne voit que deux solutions possibles: soit Harper avait une bonne raison de tenir tête à la terreur du lycée, soit elle arrive à manipuler Nathan d'une facilité incroyable. Je penche plus pour la seconde proposition mais ça me paraît quand même assez énorme. À moins que ça est un rapport avec son passé, surtout que son frère à évoquer des problèmes psychologiques. Mais on n'en vient toujours au même point: qu'est-ce qui c'est passé ?

- Arrête un peu! s'exclame Christopher qui me sort de mes pensées.

- Quoi?

- Quand tu prends ta tête de psy ça veut dire que tu cherches par tous les moyens de comprendre les agissements de quelqu'un. Cette fille est un mystère mec, faudra t'y faire. Ni elle ni Nathan vont te révéler quoi que se soit et ça m'étonnerait que tu arrives à une conclusion sans connaître son passé. Alors laisse tomber!

- C'est ce qu'on verra Chris, ne sous-estime pas mes capacités d'analyse, répondis-je en me levant.

- Tu vas où?

- Au toilettes.

- Arrête de mentir! Je sais parfaitement bien que tu vas les espionner. Et à ta place je ne m'y risquerai pas, ça ne se fait pas. Ni pour elle, ni pour Nathan.

- Oui, sauf que tu n'es pas moi.

- Têtu, curieux et arrogant! As-tu encore d'autres visses cachés?

- Comme si tu ne les connaissaient pas déjà ! je m'exclame en souriant.

Je m'apprête à sortir de la chambre quand je me tourne à nouveau vers mon voisin:

- Chris ?

Il lève la tête de son téléphone et me regarde :

- Bouche cousu.

- T'inquiètes.

Je ferme la porte en silence et me faufile discrètement vers celle entrouverte de la chambre de Harper.

Pdv de Harper

Petit à petit j'arrive à me calmer dans les bras de Nathan, il me caresse toujours les cheveux quand je relève la tête. Je sèche rapidement mes joues inondés de larmes:

- Maman est rentrée?

- Non, il est que 2 heures, répond mon frère en regardant sur mon réveil.

- Je suis désolée...

- De quoi? D'être hanté par lui? Ce n'est pas de ta faute Harper.

Je baisse la tête sans trop répondre. Même si mes cauchemars sont moins fréquents qu'avant, je m'en veux de déranger Nathan ou maman à chaque fois. J'aimerai bien me débrouiller seule mais je n'y arrive pas. J'ai sans cesse besoin de réconfort, et même les calmants des médecins ne fonctionnent pas. Je me souviens qu'à l'hôpital les infirmières me maintenaient fermement sur le lit pour m'administrer une piqûre. Je détestais ça!

Je lève la tête et vois mon frère inquiet, comme toujours quand il me voit. J'aimerai bien que ça change, apercevoir la fierté dans ses yeux ou même rien de spécial, qu'il puisse me regarder sans penser à ce que j'ai vécu serait déjà pas mal.

- Tu ne veux pas raconter ton rêve ? me demande-t-il.

A chaque fois il me pose la question, et à chaque fois je lui répond par la négation. Mais cette fois j'ai envie de faire un effort, j'inspire un bon coup et je me lance hésitante, à la grande surprise de mon frère:

- J'étais dans la cave, je... J'étais allongé sur le sol... Il me faisait... un de ses interrogatoires réguliers.

Ma voix tremble terriblement et je frotte nerveusement mes mains l'une contre l'autre, Nathan m'encourage du regard à continuer alors je poursuis:

- Il me demandait des trucs que je savais pas... et il s'énervait... parce que je ne répondais pas... Et puis il me frappait et...

J'éclate en sanglots et mon frère me reprend dans ses bras. Il me caresse les cheveux et me dit que c'est bien, qu'il y a une évolution par rapport aux autres fois. Mais moi, je me revois dans la cave. Dans cette fameuse cave... Je le revois s'assoir sur la chaise qu'il emmenait à chaque fois, il se posait toujours de la même manière : le dossier devant le ventre. Je le revois me sourire cruellement, il commençait toujours ces interrogatoires par "Tu es enfin décidée à me parler ou tu vas encore devoir goûté le goût de mes phalanges ?". Et je le revois me frapper, je me souviens de la portée des coups, de la douleur de mes blessures. Alors je pleurais, parce que c'était la seule chose qu'il m'autorisait encore à faire, et je continue car je n'ai toujours pas trouvé meilleur moyen pour tranquilliser le tourbillon d'émotion qui m'envahit.

Nathan est toujours là, il attend que je me calme. Je ne tarde d'ailleurs pas longtemps à le faire. Il me sourit et me demande si je veux qu'il reste. Je lui répond non et il m'embrasse le front avant de sortir de la chambre. Je l'entends parler avec Maxime et Christopher. Et mince! Je les avais oublié, je m'en veux encore plus d'avoir crié cette nuit. Je m'allonge et essaie de penser à autre chose sans succès, je décide alors de lire mais ça non plus ça ne divertit pas mon esprit qui semble ne pas vouloir sortir du cauchemar de cette nuit. Alors je prends mes écouteurs et mon téléphone et regarde des vidéos YouTube un peu au hasard. Quand j'entends ma mère rentrer j'éteins tout et me recouche. J'espère qu'il n'y aura pas Raphaël pour me mettre sur les nerfs demain, parce que je n'aurais pas les forces de me battre contre lui. Je m'endors avec l'illusion d'être aussi épuisée par la vie qu'une personne âgée.

Revivre, grâce à toi. [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant