Quelque semaines plus tard
10 avril
Allongée sur mon lit, le casque sur les oreilles, en murmurant du rap dépressif, je laisse mes larmes coulées. Raphaël est insupportable et j'ai l'impression que rien ne semble l'arrêter. Je ne sais pas jusqu'où il peut aller et ça me fait peur. Je n'ose pas en parler par honte et ma combativité de mon arrivée m'a abandonné. Alors comme d'habitude, je laisse mon corps s'exprimant en pleurant. Je me souviens toujours de la fille qui m'a dit "Pleurer par tristesse c'est légitime, pleurer de joie c'est fort, mais pleurer de haine, c'est juste lâche. " Alors c'est ce que je suis? Lâche ? C'est vrai que je n'ai jamais eu la force de riposter contre les personnes qui me terrifiaient. J'ai juste pu laisser l'eau s'échapper de mes yeux, asséchée d'amour et d'espoir. Des fois j'ai vraiment l'impression d'être une moins que rien.Puis je finis par le calmer, ma peine est toujours là pourtant je ne ressens et plus le besoin de pleurer. C'est comme mes yeux me disaient : "Désolé mais faudrait patienter un petit peu, nous sommes en rupture de stock." Je souffle et reste allongée sur mon lit un petit moment, méditant sur ma vie. Pourquoi je ne suis pas une fille comme les autres? Avoir une passion, passer mes journées avec mes amis, regarder un nombre incalculable de fois mon film préféré, avoir envie de telle ou telle chose... Et en fouillant dans le plus profond de mon cœur je finis par trouver la raison. Je suis vide, vide de toute envie, vide de la moindre affection de quelque chose ou quelqu'un, vide de sens. Et je suis épuisée, exténuée.
Je me lève soudainement, prends mon cahier et un crayon et exprime mes ressentis assez anodins et déroutants.
Je suis fatiguée. Je ne suis pas énervée ni mélancolique. Je ne suis pas triste, ni spécialement nostalgique. Non je suis simplement fatiguée. Épuisée de tout, abîmée par la vie. J'ai de plus en plus de mal à sentir le vent caresser ma peau. Et puis, je survole mon reflet comme si je le sentais partir, comme s'il devenait faux. Je ne distingue plus mon état, neutre, impassible. Puis je déteins, mon sourire se crispe, mes yeux imitent la lueur de la vie et mon rire essaie de ne pas teinter faux. Ne vas pas croire que je suis suicidaire. Je ne me taille pas les veines, je ne veux pas me mettre la corde autour de cou. Mais si une voiture fonce sur moi, je ne pense que j'aurai le réflexe de l'éviter. Enfin bref, je suis fatiguée.
Je glisse Démon dans un tiroir et repart me maquiller pour cacher mes traces de larmes. Je me sens plus apaisée, je crois que j'ai une tendance lunatique quand même. Ces dernières semaines ce sont plutôt bien passées si on oublie Raphaël, (comme si c'était possible!) Avec ma mère, nous sommes allées faire les magasins et je me suis étonnée à acheter une robe de soirée. Maxime n'a pas totalement tord, mon passe me hante toujours. Mais comment tourner la page? C'était une question sans réponse qui me trottais dans la tête depuis bien longtemps. Maintenant j'ai peut-être une solution, revivre comme avant. Alors je me suis donner le défis de me rendre à la prochaine soirée où je suis invitée. Je vois mon frère arrivé dans la salle de bain, il s'adosse à l'embrasure de la porte et me demande avec un sourire narquois :
- Dis-moi Harper, Maxime et toi vous vous aimez bien non?
J'étais sûre qu'il aborderait le sujet un jour ou l'autre ! Mais c'est vrai que l'on s'est bien rapprochés ces derniers temps, il me fait beaucoup rire. Et puis, j'ai besoin de quelqu'un sur qui m'appuyer et je sais qu'il a les épaules pour. Après si elles sont assez solides pour que je puisse me confier totalement... Rien n'est jamais sûr.
- Donc tu gardes le silence ? Intéressant.
- Nathan! Arrête de te faire des films tu veux bien?
- Je ne me fais pas du tout de films! Je remarque bien quand ma sœur et l'un de mes meilleures amis se rapprochent quand même!
Je soupire d'exaspération et lève les yeux au ciel. Mais quand je croise son regard dans la glace je sais qu'il voit clair dans mon jeu. Alors je décide de lui répondre honnêtement :
- Je ne peux plus te monopoliser autant Nathan. Il est tant que tu fasses ta vie sans qu'une petite sœur reste dans tes pattes. Je ne veux pas sortir avec Maxime mais seulement pouvoir me libérer et par la même occasion, essayer d'échapper à mes souvenirs et à mes cauchemars. J'ai besoin de tout recommencer à zéro tu comprends? Maxime me fait rire et quand je suis avec lui j'ai l'impression d'être une ado comme toute les autres. C'est comme si j'étais normale! Et j'adore cette sensation.
Je me tourne vers lui mais, étonnement, je n'arrive pas à lire l'expression sur son visage. Il reste là, à me regarder pendant plusieurs secondes, comme s'il réfléchissait quels mots utilisés. Peut-être que je n'aurais pas dû lui en parler. Puis il me prend dans ses bras et je suis immédiatement rassurée.
- Je suis ravie que tu puisses te sentir comme ça puisque tu la toujours voulu, commence-t-il. Mais je ne veux qu'à aucun moment tu penses que tu sois une charge pour moi d'accord ? Le jour où tu es venue au monde tu es devenue toute ma vie. Même quand je me suis perdu au collège, tu étais la principale raison pour laquelle je n'ai pas mal tourner. Tu m'as aidé autant que je t'ai aidé, alors ne pense jamais que tu es une charge.
Je me détache de lui, il me sourit et un sentiment inexplicable m'envahit. Comme si plus aucun problème n'existait, je ne peux pas gommer mon sourire il est comme scotché sur mes lèvres. C'est ça être vraiment heureuse ?
- Tu sais je suis fière de ce que tu es devenue, m'avoue-t-il, Tu t'es relevée à une rapidité étonnante, je sais qu'encore beaucoup de démons te hantent mais je te trouve quand même très courageuse. Je ne pense pas que j'aurais pu surmonter tout ça.
- Seule, je n'y serai pas arrivée.
Je l'embrasse sur la joue et je lui propose d'aller à la plage. Le corps léger et la tête dans les nuages, je nage dans l'eforie de ses paroles. Nous montons chercher nos affaires, demandons à notre mère si elle veut venir avec nous et tous les trois nous dirigeons vers la voiture. J'ai l'impression d'être sur un petit nuage. Le trajet se fait dans la bonne humeur et nous arrivons rapidement vers la plage. Ma mère se gare et mon frère et moi nous précipitons comme des enfants pour avoir la meilleure place: pas trop près de la mer mais pas trop loin nous plus, assez loin des autres personnes, avec de l'ombre mais aussi du soleil ( cette condition est rarement respecté).
- Il y a moins de monde d'habitude pour un samedi d'avril, remarque Nathan.
- C'est vrai mais il fait chaud par rapport au reste de la semaine.
Je regarde mon téléphone qui annonce 23°C, alors que hier on frôler les 14°C. Le réchauffement climatique est de plus en plus remarquable. Nous nous dirigeons vers un endroit vide et installons nos affaires. Je vais goûter l'eau, elle est glaciale. Je me suis avancé jusqu'à mi-molet quand quelqu'un me pousse dans le dos. Je retrouve assise dans la mer, trempée jusqu'au os et frissonnant de froid.
- Nathan! s'écrie ma mère, ne refait plus ça! Tu connais les risques d'hydrocution!
Sans aucun remords, mon frère se tord de rire à côté de moi. Sans attendre une seconde, je plonge sur lui et le plaque dans la mer.
- Harper! s'égosille maman, Qu'es-ce que j'ai dit?!
La pauvre, nous rions tellement mon frere et moi que nous ne pretons même pas attention à ses remarques. Quand elle nous rejoint, elle nous traite d'enfants indignes avec un sourire en coin et rigolons de plus belle. Toute l'après-midi s'est extrêmement bien passée, j'ai un peu bronzé, lu sous les rayons doux du soleil et jouée avec le sable comme une gamine avec mon frère. Ce sentiment de sérénité et de bonne humeur ne m'a pas quitté et ça faisait longtemps que je n'avais pas autant apprécié un moment comme celui-ci, et inconciamment, ça me manquait. Quand je rentre à la maison je suis exténuée. Je reçois un message de Maxime qui me demande si je vais à la soirée de Dylan demain soir. Je sais que mon frère y va puisque lundi nous n'avons pas cours car il y a grève. Je m'aprette à répondre "non" quand je me rappelle du défis que je m'étais donnée. Je souffle et lui dit que oui je serai là, j'envoie le message à contre-cœur et déjà anxieuse de la journée de demain.
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Revivre, grâce à toi. [Terminé]
Genç KurguUn nouveau lycée, de nouveaux amis, un nouveau départ. Harper s'apprête à réécrire l'histoire de sa vie en recommençant tout à zéro, mais cela ne semble pas si facile. Malgré un grand frère très protecteur, des amis de confiance et une mère adorable...