Source : Les singes et le monstre noir
L'humeur du sultan Schahriar s'était considérablement allégée depuis qu'il avait épousé Sheherazade, et cela se ressentait. Un vent d'espoir commençait à souffler sur la ville, sans que le souverain n'y prenne garde, tout son esprit occupé par les aventures incroyables de Sindbad le Marin. La nuit dernière, il avait dormi quelques heures et s'était réveillé plusieurs fois pour regarder Sheherazade dormir à ses côtés, son beau visage apaisé par le sommeil.
Ses rêves étaient peuplés de créatures animées par la voix du jeune conteur, et il peinait à réaliser que son époux existait réellement et n'était pas un enchantement créé parson chagrin. Cela faisait près d'une semaine que leurs noces avaient eu lieu, pourtant il lui semblait que cela faisait bien plus longtemps. La présence de Sheherazade à ses côtés lui paraissait naturelle, agréable. Brièvement, il imagina ce que cela serait de le garder auprès de lui, et il s'aperçut que l'idée lui plaisait de plus en plus. Troublé, il finit par quitter le lit avant l'aube pour aller vaquer à ses occupations. Ce qui ne l'empêcha pas de regagner ses appartements sitôt la nuit tombée pour y rejoindre le conteur qui avait passé la journée à rassembler ses souvenirs pour continuer ses contes.
À l'heure du coucher, alors que Schahriar s'étendait sur leur couche, Sheherazade s'y assit élégamment, un doux sourire aux lèvres, puis il reprit la parole en ces termes :
- Comme les matins précédents, le Voyageur s'habilla proprement et s'en alla retrouver son hôte afin de converser avec lui et d'entendre la suite de ses récits. Sindbad continua à lui faire les honneurs de sa demeure, puis l'invita à partager son repas et commença l'histoire de son troisième voyage.
- Ainsi que tu le devines sans doute, je ne suis pas resté bien longtemps chez moi. L'immobilité de la terre et l'oisiveté me convenaient aussi mal que la solitude. Une sorte de force étrange me poussait à repartir, et j'en tirai la certitude qu'il était temps pour moi de reprendre la mer afin de m'en aller retrouver mon bien-aimé Hindbad. Une fois de plus, j'achetai donc de riches marchandises, puis j'embarquai sur un grand navire en compagnie d'autres marchands, certains que je connaissais, et d'autres que je n'avais jamais vu. Nous naviguâmes quelques semaines avant de gagner un port où d'autres négociants nous rejoignirent. Parmi eux se trouvait la personne que j'aimais le plus au monde et c'est avec un bonheur indicible que nous nous retrouvâmes. Hindbad m'apprit qu'il avait été poussé au voyage par une sorte de puissante impression qui était en tous points semblable à celle qui m'avait conduit à reprendre la mer, et nous en tirâmes la conclusion que les dieux nous avaient une fois de plus réunis.
Durant les premiers mois de notre navigation, nous abordâmes de nombreux ports où nous fîmes un commerce considérable. J'avais offert à Hindbad de partager ma cabine, ce qu'il avait accepté sans hésitation, et cette proximité ne fit que nous rapprocher davantage. Notre amour n'était un secret pour personne et nous étions aussi heureux que l'on puisse l'être. A nouveau, nous fîmes escale à Marhabaan, où nous confiâmes à Mihrage une grande partie de nos biens afin de les sauvegarder d'un quelconque péril.
Bien nous en prit car, peu après notre départ de l'île de notre cher ami, une épouvantable tempête éclata, qui secoua le bateau durant plusieurs jours. Tous, marchands et membres d'équipage, nous étions sur le pont à courir en tous sens pour tenir la voilure et maintenir le navire à flots, et lorsque le temps se calma enfin, notre soulagement n'avait d'égal que notre épuisement. L'ouragan nous avait déviés de notre route et nous nous trouvions à présent au large d'une petite île qui m'était inconnue. Puisqu'il nous fallait mouiller le navire afin de réparer ce qui devait l'être, nous descendîmes à terre. Alors que nous nous avancions sur la plage, le capitaine poussa un cri étranglé en pâlissant considérablement.
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Contes des Mille et Une Nuits [BxB]
Roman d'amourIMPORTANT : Il s'agit d'une RÉECRITURE d'une sélection des célèbres contes arabo-persans, dans laquelle Sheherazade est un HOMME. Je précise, parce que le résumé n'est peut-être pas assez clair, et j'en ai assez des commentaires outrés de personnes...