BillDip - Un pacte démoniaque.

O Chapitre 16.

Depuis la malédiction qui a transformé Oncle Stan et Oncle Ford, les jumeaux Dipper et Mabel n'osaient plus se quitter. Ils avaient tellement peur d'être séparés à tout jamais. Notamment Dipper. Il savait que Bill le laisserait en vie jusqu'à ce que tous ses proches se retrouvassent sur l'autre face du monde.

Dipper était assis sur son lit, Mabel dans le sien, enlaçant Dandinou qui semblait aspirer les mauvaises ondes qui empestaient la chambre. Leur moral était au plus bas, ils avaient perdu leurs oncles. Ils étaient désormais seuls au monde, dans ce musée de bizarreries confectionnées avec soin par Stanley.

- Tu crois qu'il va revenir ?

Mabel venait de rompre le silence qui s'était étalé sur plusieurs heures.

Dipper leva les yeux sur elle, à moitié cachés par sa casquette. Il connaissait la réponse mais ne savait pas quand. En réalité, il ne préférait pas savoir. Il haussa les épaules, incapable de parler. Il baissa la tête, observa ses phalanges. Pourquoi n'avait-il rien fait pour stopper Bill ? Pourquoi était-il si impuissant ? La culpabilité se propagea en lui comme une traînée de poudre. Il plaça alors ses paumes contre ses yeux, s'interdisant de pleurer. Il souffrait mais cela briserait le cœur de sa sœur de le voir dans une posture de faiblesse.

Soudain, il entendit le plancher craquer et un affaissement à ses côtés puis deux bras l'enlacer avec douceur. Il recula alors ses mains de son visage pour observer les longs cheveux bruns de sa sœur qui avait enfoui son visage dans son cou. Les lèvres pincées, il se tortilla dans ses bras pour pouvoir l'enlacer à son tour. Il huma son parfum de lavande, les yeux fermés. Il profita de sa présence comme si c'était la dernière fois qu'il la voyait.

- Je t'aime, Dipdip.

- Moi aussi, sœurette.

Il lui embrassa le front et resserra son emprise sur elle. Bill pouvait arriver à tout moment pour l'emmener loin de lui, et ce pour toujours. Puis, pour détendre l'atmosphère, Mabel s'écarta et lui adressa son plus beau sourire.

- On va manger ? J'ai une faim d'ogre !

Son ventre gargouilla pour lui en donner la preuve. Il se mit à rire doucement, amusé par la puérilité de sa jumelle.

- Allez, on va se préparer quelque chose. Il doit bien y avoir des restes dans le frigo.

Ils se séparèrent, sortirent du lit et remarquèrent que la porte de la chambre était ouverte.

- On ne l'avait pas fermée toute la matinée ? demanda Dipper, intrigué.

- Ce doit être Dandinou. Il n'est plus dans la chambre.

Ils ne se posèrent pas plus de questions et descendirent jusqu'à la cuisine. La première chose qui les frappa fut que la table était déjà préparée. Les couverts étaient placés pour deux personnes et une cloche était positionnée au-dessus des deux assiettes. Ils se regardèrent un instant et quand ils virent l'incompréhension dans le regard de l'autre, ils comprirent que ce n'était pas une surprise organisée par l'autre. Mais alors...qui avait préparé la table?

Tout à coup, leur corps se figea. Ils ne pouvaient plus bouger, et cette impression était plus que familière pour Dipper. Un petit rire narquois dans leur dos leur fit hérisser les poils.

- Tiens tiens. Pinetree et Shooting Star. Quel plaisir de vous revoir !

- Oh non... Pas si tôt..., pensèrent les jumeaux en symbiose, tétanisés par la peur.

Les bras du démon se posèrent sur les épaules des jeunes Pines et il se retrouva entre eux deux. Il leur sourit joyeusement.

- Je vous ai préparé le repas ! Vous m'en direz des nouvelles !

Des sueurs froides chatouillèrent le dos des jumeaux. Il avait certainement empoisonné la nourriture.

- Ne soyez pas timides ! Venez manger !

Il claqua des doigts et leur corps se dirigea automatiquement vers une chaise. Ils se retrouvèrent face à leur cloche respective, les prunelles tremblantes. Ils allaient mourir aussi facilement ? En ingérant du poison sans pouvoir se contrôler ?

Bill claqua une nouvelle fois des doigts et les cloches s'élevèrent dans les airs. Face à eux, des tranches de porc fumé. L'odeur leur donnait l'eau à la bouche. Cela semblait tellement appétissant !

Mais l'annonce du marionnettiste leur coupa net l'appétit.

- Aujourd'hui, je vous propose la spécialité de la maison : filet de Dandinou fumé. J'espère qu'il sera à votre goût.

Les yeux écarquillés, ils observèrent leur assiette comme si elle était la pire des abominations. Un goût acide se propagea sous leur palais.

Dandinou, ce cochon qui traînait toujours avec Mabel, qui égayait ses journées, qui apportait un peu de fraîcheur au Mystery Shack, qu'ils n'avaient pas vu depuis six longues années, se trouvait désormais sous forme de tranches, parfaitement cuisiné.

Malgré la bonne odeur, les jumeaux n'avaient qu'une envie : vomir le peu que leur estomac avait à disposition.

- Eh bien quoi ? Vous ne mangez pas ? Vos parents ne vous ont-ils jamais appris qu'il faut goûter avant de dire que ce n'est pas à votre goût ?

Il claqua des doigts et leurs bras se murent d'eux-mêmes. Ils empoignèrent la fourchette de la main gauche, le couteau de la main droite et plantèrent les ustensiles dans la viande. Un haut-le-cœur les fit grimacer, horrifiés. Bill allait les forcer à manger leur ami.

- Bill..., parvint à articuler Mabel, le regard rivé sur la chair qui lui faisait face. Je t'en conjure...ne fais pas ça...

- Quoi donc ? Je vous propose simplement de goûter ma succulente cuisine. Je l'ai apprise du monde des démons.

- Arrête de jouer les imbéciles, Bill ! s'emporta le garçon, la bile au fond de la gorge. Tu as tué nos oncles, Soos, et les Corduroy. N'est-ce pas amplement suffisant pour toi !?

Le regard rieur qui lui répondit ne lui inspira aucune confiance.

- Tu penses vraiment que c'est suffisant ?

Il s'approcha et fit parcourir ses doigts sur le lobe d'oreille de Dipper. Un frisson se diffusa dans sa nuque et s'éleva jusqu'à la racine de ses cheveux. Dipper en voulut à son corps d'être aussi sensible à son contact.

- Pour que je sois rassasié, il faut que tu perdes absolument tout le monde. Il ne reste plus qu'une personne sur la liste désormais.

Il laissa couler un long regard explicite sur la jeune fille à l'autre bout de la table qui les fixait sans réagir, pétrifiée.

- C'est la plus précieuse à tes yeux, non ? Et comme on dit, le meilleur pour la fin. Mais avant de passer au plat de résistance, je vous laisse avec votre cochon.

Il souffla doucement sur l'oreille de Dipper qui frémit, le ventre noué. Leur fourchette se leva progressivement sans qu'ils n'en eussent le contrôle. Ils ne voulaient pas. Ils se regardèrent droit dans les yeux, les sourcils crispés en une grimace de détresse. Leur bouche s'ouvrit en grand et le contact de la chair de Dandinou contre leur langue produisit des reflux gastriques. Ils mastiquèrent, les yeux humides.

- Pardon Dandinou..., pensèrent-ils, dégoûtés par ce qu'ils étaient en train d'ingérer et incroyablement tristes par la perte de leur animal de compagnie.

Toutefois, ils ne se contentèrent pas d'une seule bouchée. Tout ce qu'il y avait dans leur assiette se retrouva dans leur estomac qui ne semblait pas apprécier ce qu'il était en train de digérer.

- Au revoir, Pinetree. Au revoir, Shooting Star. J'espère que notre prochaine rencontre sera tout aussi exceptionnelle !

Il leur rendit leur liberté de mouvement et se volatilisa.

Dipper et Mabel se précipitèrent aussitôt dans les bras de l'autre, à la recherche de réconfort. Ce qu'ils venaient de faire produisait le même effet que s'ils avaient commis un acte de cannibalisme. Dandinou était un membre à part entière dans la famille. Alors être obligé de le manger leur procurait un effet dévastateur. Ils restèrent ainsi, par terre, enlacés l'un à l'autre, s'efforçant de penser à autre chose. Mais une seule pensée ne parvenait pas à les quitter...

Celle de régurgiter ce qu'ils venaient de consommer.