- chapitre 2

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La lumière qui se dégageait du rétroprojecteur m'aveuglait. Docteur John se tenait là, debout sur cette estrade, devant l'immense écran. Il bougeait ses mains, ses bras quand il parlait. Il gardait la tête haute, montrant que cette opération, il pourrait la faire sans problème.

- Et comment comptez vous faire ça sans toucher d'artères ? demanda une des internes

Je ricannai intérieurement, non pas que la question était bête, mais que la fille semblait tout de même l'être. Le but d'une chirurgie, est d'évidemment sauver un patient, mais aussi de faire en sorte que le patient n'est pas de quelconques séquelles, toucher une artère serait une erreur de débutant, et une erreur fatale. En bref, sa question était irréfléchie, au vue des circonstances, c'était comme demander à un chirurgien d'opérer sans ouvrir, ça n'avait juste aucun sens.

Monsieur John fronça les sourcils, bredouillant une réponse tout aussi vide que la question. Il nous montra les différentes étapes de sa future chirurgie, sous forme de schémas. Il semblait confiant, et fier de montrer quelque chose d'aussi impressionnant, pour des internes aussi futiles que nous.

- Pour cette chirurgie, je vais prendre deux d'entre vous, pour regarder de près l'opération. Je ne peux pas vous laisser m'assister tout de suite, n'ayant pas connaissance de vos capacités pour le moment. fit-il en croisant ses bras

Les internes se regardèrent tous, se toisaient. Chacun espérait secrètement, chacun rêvait intérieurement. Mais personnellement, ça ne me faisait ni chaud ni froid, regarder à côté ou un peu plus haut sur une estrade, pour moi, c'était la même chose.

- Kwon So-Ra et Kim Soo. appela docteur John

Je décroisai mes bras et me levai, lâchant un léger souffle incontrôlé. Je sentis les regards des internes sur moi, leurs gros yeux me glisser sur la peau, ils devaient me prendre pour une folle et certainement me détester. La jalousie fait des ravages.








~*~





- Scalpel.

Docteur John commença l'opération, sous mes yeux, et ceux des autres internes. Il était assisté par une chirurgienne, qui n'avait pas fait l'effort de se présenter. Je n'aimais pas les gens comme ça, qui, sous prétexte qu'ils ont fait de grandes études, en oublit les bases sociales.

Je tournai ma tête vers So Ra, la deuxième interne a avoir été choisie, elle était époustouflée, et ne ratait aucun détail de cette chirurgie. D'ailleurs, celle-ci se passait plutôt bien, l'opération semblait être sous total contrôle. Mais néanmoins, je sentais qu'ils étaient tendus, cette opération restait tout de même délicate, et très ambitieuse.

Mais soudainement, ce fameux bip sonore qu'on entend dans les séries devenu réel, l'anésthésiste commença à paniquer, elle ne comprenait pas. Je devinai l'auteur de ce désastre en voyant les yeux revolvers de docteur John sur la seconde chirurgienne en face de lui.

- Docteur Min, qu'est ce que vous venez de faire ? s'énerva-t-il

Celle-ci lâcha son outil, elle venait de sectionner quelque chose, mais je n'arrivais pas à savoir quoi. Je fis de gros yeux, quand je vis qu'elle tremblait, et qu'elle n'osait plus rien faire.

- Docteur Min, ressaisisez vous si vous ne voulez pas que le patient meurt sur cette table. fit docteur John

Mais rien. Elle n'en fit rien. Je vis So Ra se ronger les ongles, les infirmières respirer irrégulièrement et l'anésthésiste se mordre la lèvre. Docteur Min ne réagissait pas, et le le rythme cardiaque du patient semblait aller de plus en plus mal. Personne ne bougeait, tout le monde retenait son souffle.

L'électro-cardiogramme semblait s'enflammer, tandis que docteur John semblait lutter pour retenir le patient en vie, face au second chirurgien qui demeurait immobile et silencieux.

Soudainement, la porte du bloc s'ouvrit sur un homme portant une blouse blanche, ses cheveux noirs comme la nuit contrastait divinement bien avec la pâleur de sa peau. Ses lèvres rosées étaient pulpeuses, ses joues légèrement rosées. Il avait l'air sûr de lui.

Mon cœur loupa un battement, quand ses yeux sombres et perçants se plantèrent dans les miens, c'était lui, le chirurgien dont j'avais regardé l'opération. Il ralentissa, avant de détourner le regard et de passer à côté de moi. Son parfum s'infiltra avec douceur dans mes narines tandis que je me retournai.

Il poussa de son épaule la chirurgienne Min avant de tendre ses mains devant l'infirmière qui sans attendre lui enfila les gants. Sans hésiter, il plongea ensuite ses mains dans le corps presque sans vie du patient, sous les yeux inquiets de docteur John.


- Aspiration.

Il avait une voix à la fois douce et dure, à la fois lisse et raîche, il avait une voix unique en son genre et je levai un sourcil.

Mes yeux glissèrent sur ses mains, chaque mouvement était calculé, chaque mouvement semblait tout droit sortit d'un film. Ses compétences semblaient iréelles.

- Pourquoi on a pas un responsable comme ça.. sussura So Ra

Je croisai mes bras, impressionnée par le savoir faire de celui-ci. Docteur John semblait être devenu le second chirurgien, se pliant aux paroles de son maître.

Après quelques minutes, le chirurgien mystère annonça la fin de l'opération. Les personnes autour commencèrent à applaudir, même ceux dans les gradins. Sauf moi. Pas qu'il ne le méritait pas, mais je trouvais ça normal de faire son possible pour sauver une vie, car c'est le métier d'un chirurgien.

On applaudit pas un professeur parce qu'il apprend, on applaudit pas un vendeur parce qu'il vend. Alors on applaudit pas un chirurgien parce qu'il sauve, parce que c'est le devoir qu'il a choisi d'accomplir.

- Merci, docteur Park. docteur John s'abaissa

C'était donc son nom, docteur Park. Celui-ci fit un léger geste de la tête et repartit de celle-ci aussi vite qu'il y était venu. Sa démarche rapide et fluide m'énervait tout autant qu'elle me fascinait, et je me détestais pour être aussi indécise.

Je sortis peu de temps après du bloc, me dirigeant vers la machine à café, les mains dans les poches. Ce fût tout de même riche en émotion cette matinée, et assez éprouvant de devoir rester debout aussi longtemps sans rien faire.

J'appuyai sur le bouton de la boisson de mon choix, avant de soupirer un bon coup, m'appuyant sur le mur à ma droite.

Docteur Park, j'apprendrai de vous.






Paradoxe | P.JMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant