- chapitre 3

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Nous étions tous debout, se tenant droit comme des piliers devant les tables blanches sur lesquelles se trouvaient les cœurs en plastique. Ceci était notre premier cours de chirurgie et celui-ci s'annonçait être particulièrement compliqué. Docteur John expliqua la procédure à suivre sur le tableau, à l'aide d'une craie blanche qui provoquait un bruit épouvantable au sein de mes deux oreilles.

- Bien, la chirurgie valvulaire cardiaque est une chirurgie longue et délicate, prenez votre temps, je passerais dans les rangs. Demain je vous évaluerai. fit-il presque durement en regardant les internes l'un après l'autre

Je baissai ensuite les yeux vers le cœur artificiel devant moi. Je devais savoir faire cette opération sans aucune difficulté avant demain, je devais être la meilleure. Loin de moi le fait d'être égoïste, le monde dans lequel nous vivons n'a simplement aucune pitié et seuls les plus forts gardent la tête hors de l'eau. Chacun ses choix et ses ambitions, mais je ne compterai pas me noyer.

Je pris une des pinces en métal et commencer par enlever les premières valvules de la sculpture. Mon regard glissait sur les moindres détails de mon mouvement tout devait être parfait, comme celui de monsieur Park.

- Bien Soo, faites attention à la position de vos bras, cependant. me fit sursauter le doctzur John à côté de moi

J'hôchai la tête, avant de me repositionner. Encore une fois quelques internes autours me regardaient, certains levaient leurs sourcils. Les gens comme moi sont des menaces pour eux, les gens comme moi consacrent leur vie à des choses que certains jugeraient inutiles. La petite fille parfaite qui ne fautait jamais n'existe pas et pourtant c'était celle qui semblait le plus me ressembler selon les gens autour, et à force de vivre avec la victoire et la perfection dans mes veines, échouer ne s'affichait plus comme une option mais comme une honte, et parfois je m'en veux de penser comme ça.

Les secondes, les minutes et les heures passaient jusqu'à ce que docteur John frappe dans ses mains.

- Merci tout le monde, le cours d'aujourd'hui est fini je compte sur vous pour réussir demain ! souria-t-il

Les internes sortaient de la pièce, tandis que je restai devant ma sculpture sans dégner bouger d'un seul poil. Faire comme tout le monde, ça ne m'intéresse, il faut savoir dépasser ses limites jusqu'à ne plus en avoir, il faut savoir vouloir atteindre les étoiles jusqu'à ce qu'elles s'éteignent.

- Soo, vous pouvez rentrez chez vous. dit le docteur

Je secouai la tête avant de le regarder pour la première fois du cours.

- Je reste m'entraîner encore un peu, si vous me le permettez. répondis-je doucement

Je le vis sourire et acquiescer, avant d'à son tour quitter la pièce. Une seule fois, je m'étais déplacer pour baisser la luminosité de la lumière autour de moi. À défaut de passer pour une fayote ou d'une amoureuse du travail, j'aurais au moins la première place demain, du moins, c'est ce que je pensais. Mais sous-estimez les autres et partir gagnant ne faisait pas partie de mes principes.

L'aiguille de l'horloge semblait défiler à toute vitesse, tandis que mon anatomie ne semblait pas vouloir faire autre chose.

- Vous devriez partir, répétez une trentaine de fois des mouvements faux ne vous sera pas d'une grande aide. entendis-je

Je levai brusquement la tête et vis docteur Park, adossé contre la porte de la pièce. Je fronçai les sourcils, cette remarque était plutôt déplacée et malgré le fait que ma bouche s'ouvrait déjà pour lui répondre mes yeux ne se gênaient pas pour s'attarder sur son visage aussi envoûtant qu'inhumain. Même si mon cerveau ne voulait pas l'admettre mon cœur ne pouvait s'empêcher de penser que docteur Park était un homme tout simplement magnifique.

Mais loin de me démonter face à son allure imposante, je me contentai de lever un sourcil, amusée.

- Dites moi ce qui ne va pas, dans ce cas. fis-je en inclinant la tête

Il se remit droit avant de croiser ses bras sur son torse. Il fit un pas, puis un deuxième, pour arriver à ma hauteur. Et bien que ce n'était pas homme très grand, il l'était déjà plus que moi et cette constatation ne me plaisait guère, car je devais incliner mon menton vers le haut pour rencontrer son regard.

Ses lèvres s'étirèrent légèrement vers la gauche, prenant le faux air amusé que j'avais fait précédemment. Il regarda autour de lui, laissant un silence plus qu'agaçant dans la pièce aux lumières désormais tamisées. Il se pencha légèrement, pour arriver à ma hauteur.

- Vous tenez mal le bistouri, vos bras ne sont pas bien placés, vous vous penchez trop et vos mouvements ne sont pas assez nets. déclara-t-il

J'avalai difficilement ma salive, avant de croiser à mon tour mes bras. Loin de me laisser démonter par ces critiques qui devaient sûrement s'avérer réelle, je me contentai de répondre en quelques mots.

- Vous êtes prétentieux, docteur Park.

Il recula en levant les mains en l'air, comme pour prouver son innocence qui me semblait bien trop inexistante à cet instant.

- Ne vous inquiétez, je m'en vais. ricana-t-il

- Non. Montrez moi au moins comment il faut faire, et ne partez pas comme un voleur après avoir cracher votre venin, c'est trop facile. rétorquai-je

Il se retourna vers moi et une énième fois ses iris noirs vinrent s'accrocher aux miennes, il dégageait quelque chose de bien trop mauvais pour moi, ça aurait pu être le démon en personne, dans un corps de divinité angélique.

- Qu'est ce que je gagnerais à faire ça ? demanda-t-il d'un air insolent

J'ouvris la bouche, stupéfaite. Je me fis presque rire à penser qu'il y a quelques minutes, je pensai qu'il était un homme au grand cœur. Comment un chirurgien pouvait être aussi peu social ? Je n'en savais rien et je faisais simplement en sorte de rester calme.

- Une future collègue qui saura ne pas paniquer lors d'une opération.  assurai-je

Il sembla réfléchir instant. Les reflets de lune s'infiltraient peu à peu dans la pièce, caressant son visage pâle de leurs doux rayons. Il baissa les yeux un instant, puis me regarda une nouvelle fois. Il ne disait rien, et je maudissais le fait qu'il aimait ne pas répondre, qu'il aimait parfois juste penser, garder les mots au fond de lui et ne pas vouloir les ressortir.

- Et si vous échouez, Kim Soo ? fit-il en lisant mon badge

J'émis un soufflement amusé avant d'à mon tour faire un pas vers lui, le jaugeant avec un brin d'insolence également.

- Je n'échoue jamais, docteur Park.



Paradoxe | P.JMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant