3. L'amphithéâtre

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Je reste silencieux un instant, je ne saisis pas trop le lien direct entre une arme et le rire. Actuellement le désir de quitter ce lieu possède mon être, je voudrais être six pieds sous terre.
- Non. Je devrais ?
Son sourire radieux s'élargit, au fur et à mesure que je perds mes moyens.
- Avez vous une raison de vivre ?
- Extermineriez vous cette raison si je vous en avouais sa nature ?
- Avez vous une raison de vivre ? Insiste-t-elle.
Sa manière d'esquiver mes questions démontre qu'elle ne me donnera jamais de réponse, je suis frustré et irrité.
- Si je suis vivant, en ce moment même, face à vous, c'est que oui madame.
- Est-elle matérielle ?
- Non.
- Qu'est ce donc ?
- Moi même.
- Le travail d'équipe est-il une caractéristique que vous appréhendez ?
- Tout dépend de la tâche à effectuer.
- Avez vous besoin d'un appuie morale et physique durant des épreuves difficiles et/ou douloureuses ?
- Comme tout être humain.
Elle se lève, d'une grâce diabolique, elle s'approche de moi tel un félin, ses yeux amarrés aux miens. Elle pose ses mains sur mes tempes et retire délicatement les électrodes. Elle glisse ensuite pour ôter ceux sur mon torse. Son visage est redevenu impassible, son sourire a quitté sa fine bouche.
Elle les range dans la boîte. Je reste immobile, tandis qu'elle se positionne devant moi.
- Nous en avons fini. Je vous prie de vous diriger vers la porte. Des gardes vous attendent de l'autre côté.
- Répondez à mes questions.
Face à mon désespoir vainement caché, son sourire renaît.
- La porte, monsieur Park.
Je baisse la tête et serre les poings. Lentement je me relève, et lui tourne le dos, j'avance vers l'encadrement de bois. Avant de poser ma main sur la poignée je lui demande.
- Riez vous ?
Je l'entends ricaner dans mon dos.
- Je ne ris plus.
Ironie du sort.
- À vous de me divertir monsieur Park.
J'abaisse la poignée métallique et quitte la salle, son regard moqueur poignardant mon dos.

En effet, deux gardes me réceptionnent à ma sortie.
- Avancez.
Au gré de leurs mouvements, je déambule dans les couloirs aux allures monochromes.

Ils me conduisent à une porte très haute qui s'ouvre en grand sur une pièce inondée de lumière naturelle. Se dresse devant moi une pièce gigantesque, au sol descendant, à la multitude de sièges, tous dirigés de manière linéaire vers le fond de cette salle ; un écran gigantesque sur le mur, derrière un bureau imposant. Sur cette petit estrade se tient un homme en costume aux traits tirés. Sur les sièges au devant de la salle, une centaine de personne sont assises. Tous se tournent vers moi. Les gardes m'ordonnent avec monodie de descendre les innombrables marches. Lors de ma descente je scrute les alentours, et ne perçois aucune présence féminine parmi les personnes déjà installées. Les murs sont constitués de fenêtres, ce sont les premières que je vois depuis mon arrivée. L'extérieur n'est constitué d'aucun bâtiment, du moins sur le côté de celui-ci, entouré d'arbres.
Les deux hommes me font assoir au bord d'une rangée, aux côtés d'un inconnu, le visage autant déformé par l'incompréhension que le mien. Une sorte de complicité s'instaure, comme lié par des sentiments identiques. Je comprends que lui aussi n'en sait pas plus que moi.
- Bien. Le dernier convive est arrivé. Je vous félicite, si vous êtes ici c'est parce que vous vous êtes dévoués afin de mener à bien le projet numéro 2.
À la suite de la prononciation de "dévoué", quelques chuchotements désapprobateurs s'élèvent.
Ce qui m'interpelle est le numéro du projet. Aurait-il déjà été testé ?
L'homme en costume poursuit sans y prêter la moindre attention, sa voix résonnant dans l'amphithéâtre, grâce à son micro.
- Vous êtes l'avenir du pays. Votre intelligence et votre devotion vous mèneront à une reconnaissance éternelle. Nous allons vous expliquer le concept.
Le silence plane parmi les sièges, chacun est suspendu à ses lèvres.

 ☪︎ L'enfant de la Lune ‌‌‌‌ ᵛᴹᴵᴺ ☪︎Où les histoires vivent. Découvrez maintenant