Chapitre XXIII

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« Comment vous dites ?

-Szymanowski.

-Aucune idée, Monsieur ».

Théophile serre la mâchoire, il fait exprès d'observer cet homme avec mépris. Ce dernier est un vieil homme chauve aux épais favoris, assis sur sa chaise de bureau avec laquelle il s'amuse.

« Ce n'est pas en restant planté là que vous allez faire avancer les choses, lance l'homme.

-Ecoutez, je suis policier dans la ville d'à côté. Ma sœur a disparu depuis plusieurs jours. J'ai entendu cet après-midi à la radio qu'un mec s'était fait tabasser à Ericeire, et je sais qu'elle traîne avec des types louches. Alors je viens vous voir, parce que si j'ai bien compris, ici, c'est le commissariat de cette foutue ville ou des enfants s'amusent à se frapper dessus avec des poings américains. Je suis pas né de la dernière pluie. Je veux des informations pour avancer dans mes recherches ».

L'homme devient sérieux lorsqu'il soupire, comme si son spectacle de démonstration de supériorité qui brille sur sa plaque où il est écrit « commissaire » était enfin terminé. Il se lève de sa chaise, ouvre quelques tiroirs de son bureau, en sort une chemise.

« J'ai eu quelques échos sur ce qu'il s'est passé ce matin, oui. Mes hommes ont dressé quelques suppositions sur l'auteur de ces troubles ».

Il ouvre le dossier, cherche entre les papiers gribouillés. Il en extirpe une photographie en noir et blanc d'un garçon blond aux yeux bleus et à la mâchoire carrée, qui tient entre ses mains une pancarte noire sur laquelle en grasses lettres blanches capitales, il est écrit un nom. Théophile le lit, tandis que l'homme en même temps, le prononce :

« Iann Warner, vingt-sept ans. Né dans la banlieue parisienne. Un petit salaud, comme on les aime.

-Pourquoi vous avez cette photo d'identité judiciaire ? Qu'a-t-il fait ?

-Trafic de drogues et d'armes. Confrontations avec la police, accompagné de certains de ses camarades néo-fascistes qui pustulent dans Paris et ses alentours. Iann a débarqué dans cette ville il y a deux ans environ et a été arrêté pour port d'arme illégale et de stupéfiants -cocaïne ou crack, que sais-je; bref, quelque chose qu'il faudrait éviter de donner au gamins. Depuis qu'il est sorti de taule, on n'entendait plus trop parler de lui. Jusqu'à ce matin. Apparemment, ce serait lui, le fauteur de troubles.

-Et la victime ?

-Aucune idée. Des témoins ont cru apercevoir un jeune garçon brun, au corps fin.

-Et une fille ? Est-ce qu'il y avait une fille avec eux ?

-Non.

-Vous en êtes sûr ?

-Monsieur, vous posez trop de questions.

-Monsieur fait son travail. Et Monsieur veut retrouver sa sœur disparue depuis plusieurs jours ».

L'homme croise les bras devant son torse en signe, à nouveau, d'intimidation. Théophile reste impassible. Il le fixe droit dans les yeux.

« Mes hommes mènent déjà l'enquête. Pour moi, il ne s'agit pas de la même affaire.

-Où habite-t-il ? Vous avez une adresse ?

-Nous ne pouvons pas vous communiquer ce genre d'informations.

-Je suis en pleine enquête, lance Théophile d'une voix forte et claire en avançant son visage au-dessus du bureau. Vous comprenez, ça ? C'est mon travail. Je m'en fous que cette ville soit une satané station balnéaire, j'ai d'autres chats à fouetter.

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