Tame Impala ~ Endors-toi (2012)
Ce sont comme des lucioles qui volent ; leurs corps violacés et bleuâtres s'entremêlent aux guirlandes rouges et jaunes. Un festin de couleurs qui s'agite dans leur iris brillant.
Ils sont debout sous ce spectacle, les yeux vers le ciel multicolore et la bouche entrouverte comme deux enfants qui rêvent. Leurs regards se croisent, et les reflets des enluminures sont de minuscules sphères enfermées dans leurs pupilles dilatées.
Claudia se met à courir sur l'asphalte, l'eau éclabousse sur les flaques colorées. Elle ne sait pas où aller dans tout cet univers, « viens » lance-t-elle au garçon qui reste immobile, envoûté par la grande roue qui fait tournoyer des néons pourpres. « Viens, suis-moi». Ils entrent, main dans la main, dans ce bloc à la façade peinte en rose. Une infinité de miroirs qui reflètent leurs silhouettes obscures les entourent. Ils tâtent de leur main le chemin, leurs doigts glissent sur les vitres, leurs visages sont multipliés à l'infini ; dans les recoins, cloîtrés dans un côté, au plafond de verre. Ils s'esclaffent lorsqu'ils heurtent l'un de leurs reflets ; et les éclats de rire s'élèvent autour, dans cette solitude où ils sont enfermés. Une cage de miroirs qui les répète jusqu'aux abysses du monde.
Ils en sortent, on dirait qu'ils sont au ralenti. Qu'on ne voit que leurs bouches grandes ouvertes qui rient encore à jamais, leurs mains qui s'entremêlent, leurs doigts d'enfants encore innocents qui se touchent sans cesse. Il glisse sur le béton armé du sol et s'étend sur les flaques de l'asphalte, alors elle est portée par la chute et tombe sur lui. Couchés sur l'asphalte, ils s'égosillent encore en fermant les yeux fort ; comme pour revoir les lucioles bleu et rouge voler autour d'eux.
Les deux marchent vers cette immense roue colorée qui tourne à l'infini, faisant tinter ses immenses clochettes entourées de néons. Ils s'asseoient dans l'une de ces cabines roses pour attendre doucement d'arriver jusqu'en haut. Leurs yeux se croisent fugacement, leurs rires s'échangent encore, et leurs corps se collent et se poussent en silence ; parfois, la tête de la jeune fille va se poser sur son épaule. Ils observent ce paysage grandiose, ce fleuve noir qui glisse doucement sur le canal, les torrents du bassin qui dessinent des lignes noires au-dessus du port, faisant tanguer les chaloupes et les petits navires de pêche. Au loin, ce sont les lumières de la ville, enluminures blanches et jaunes qui s'étendent à l'infini ; un trait de lampadaires qui s'enfonce dans l'horizon au bord du quai.
Leurs yeux se croisent lorsqu'ils sont perchés là-haut. Comme si personne ne pouvait les observer dans ce petit univers si lointain dans lequel ils se trouvent. Auguste passe une main par ses cheveux décoiffés, Claudia rigole en observant ses petites mèches noires se hérisser en douceur. Elle sent son souffle, écoute sa respiration haletante. Leurs yeux plongent l'un dans l'autre, Claudia est immobile et pourtant, elle sent le poids du corps de l'autre qui se penche sur elle. Ses yeux se ferment dans l'attente audacieuse. La bouche du garçon s'arrête sur son cou, elle écoute sa douce respiration et son haleine vient se coller contre sa peau. Elle voudrait lui parler, « Auguste, qu'est-ce que tu fais, Auguste », mais elle n'a plus la force et ces paroles fusent à l'intérieur de son crâne tandis qu'il se redresse maladroitement. Lèvres contre joue, ils ont les mains encore enlacées, mais les bras morts et engourdis.
Auguste ne respire plus. Elle attend encore, la gorge serrée et le cœur palpitant. Un baiser, pense-t-elle. Un simple baiser.
Il l'embrasse enfin. Les lèvres humides du garçon vont se coller contre les siennes. Il est maladroit dans son geste. Leurs mains se lâchent, celle de Claudia va se poser sur son épaule tendue, et Auguste s'agrippe aux cheveux de la jeune fille. Ils sont là, les yeux fermés, les lucioles tournent encore sous leurs paupières closes et leurs bouches pataudes et humides continuent de se baiser doucement.
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FAUVES
Novela Juvenil"Bonnie et Clyde, c'étaient nous dans cette vieille Dodge Charger du 69". Ils disaient que leur vie devait ressembler à un film. Il avait peur de la perdre. Elle avait peur de mourir. Et Jeanne, elle n'avait peur de rien. (1989, quand la jeunesse c...