Part 4

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Je suis surprise d'ouvrir ma porte à Léa plus tard dans la soirée, j'avais déjà activé mon mode chill. Mignonne et souriante comme à son habitude, elle me fait un bisou sur la joue avant d'entrer et de faire comme chez elle.
-"Tu te drogues ?" Elle crie d'une voix aiguë tout en s'emparant du bong fumant posé sur la table basse.
-"C'est pas de la drogue" je proteste en le lui reprenant des mains.
Elle croise les bras et ouvre la bouche comme pour me faire la morale mais je l'arrête direct, je déteste subir des remontrances à ce sujet.
-"Tu sais, je te juges pas, j'adore la beuh aussi! »
Elle prend le Donkeybong des mains en me carressant les doigts au passage. Je lui donne mon briquet, elle expire la fumée sur mon visage. Je cligne un peu des yeux.
-"Je savais pas que tu étais dans ce genre de délires."
Elle hésite avant de me répondre :
- « Pas souvent. Et puis tu sais, vaut mieux éviter de fumer seul. »
-« Je sais! En fait j'étais surprise quand tu as sonné tout à l'heure, je m'attendais à voir Éloïse. On voulait fêter mon nouveau statut au taf."
-"Oh, au temps pour moi. Désolée de m'inquiéter, je suis comme ça avec les gens que j'aime. »
Je sens une légère tension s'installer, déclenchant un certain malaise chez moi, tandis que Lea me fixe intensément. Je ne sais pas si je l'imagine mais j'ai l'impression qu'elle se rapproche presque imperceptiblement de moi.
-"Tu sais que quand que tu souffle ta fumée sur la visage de quelqu'un, ça veut dire que tu veux l'enculer ?" J'ai dis ça brutalement sur un coup de tête pour briser cet instant... singulier.
Lea me regarde avec étonnement.
- « Ouais je le savais, on m'à fait la même blague de merde y'a pas longtemps. »
Un bruit de sonnette retentit.
Je cours presque jusqu'à la porte, qui cette fois s'ouvre sur Éloïse, et je me sens quelque peu soulagée. C'est à son tour d'être étonnée de la présence de Léa, mais on appartient toutes au même cercle et sommes amies, l'ambiance redevient tout de suite détendue, dieu merci heureusement que ces filles sont pleines d'énergie et débordantes de bonne humeur.

Le réveil est difficile à cause du froid. On s'est couchées tôt pour ne pas être trop fatiguées mais la température basse me donne juste envie de rester sous la couette. Je me souviens m'être endormie entre Léa et Éloïse, mais plus aucune trace de cette dernière. J'arme mon courage, je repousse la couette et fais un bisou sur la joue de Léa pour la réveiller en douceur avant de me dégager de ses bras pour pouvoir me lever. Je crois savoir où est passée ma grande pote et je commence par chercher dans la cuisine, où je la trouve effectivement à table en train de boire un café. Je m'assois près d'elle et lui sourit.
-"On change pas les habitudes hein?"
-"Mon cerveau a besoin de carburant, j'arrive pas à connecter mes neurones sans démarrer la journée avec un café."
-"Tu veux quelque chose à manger aussi ? Je vois que tu n'oses toujours pas ouvrir mon frigo."
-"J'allais vous réveiller avant. Un café c'est une chose mais pour moi, le frigo c'est sacré. Je ne l'ouvrirais jamais sans toi, question de principe."
Je lève les yeux au ciel en entendant une pareille connerie.
-"Désespérante. Va réveiller Léa je vais faire des tartines."
Éloïse se lève, sa tasse encore fumante à la main et sort de la cuisine.
Je sors le pain chaud du grille-pain quelques minutes plus tard quand j'entends des cris dans le couloir menant à la cuisine. La grande Éloïse revient et passe la porte chargée de la plus petite sur son épaule comme d'un sac à patates. Celle-ci se débat en vain en poussant des cris aiguës quand Éloïse lui chatouille les côtes. Elle pose enfin une Léa à bout de souffle et en manque de sommeil sur une des chaise autour du bar en marbre de ma cuisine et je pose une grande assiette de pain grillé devant elle.
-"Chocolat ? Beurre ? Confiture ? Ou les trois ?" Lui demandais-je malicieusement.
On avait à plusieurs reprises eu l'occasion d'assister aux essais culinaires de Léa, et les mélanges douteux ne sont pas rares.
-"Arrêtez de me boloss dès le matin." Proteste t-elle.
-"Je plaisante juste, et c'est la première fois que je te victime dès le matin car c'est la première fois que je te vois au réveil" La taquinais-je encore avec un clin d'œil, qui la fait rougir instantanément.

Petit déjeuner et morning routine finie pour tout le monde, on prend la Range Rover d'Éloïse direction le taf. Les bouchons impossibles sur le trajet me rappèlent pourquoi j'avais préféré ne pas acheter de voiture en m'installant à Paris. Le métro est plus rapide, et me permet de me lever 20 minutes plus tard que ce matin là pour prendre la voiture de mon amie. Et du coup je comprends également pourquoi Éloïse est quasi tout le temps en retard. Elle pénétre à toute allure dans le parking de la Tour Montparnasse et failli rentrer en collision avec la Mustang noire de la future PDG du magazine pour lequel nous travaillons. Celle-ci klaxonne furieusement en baissant sa vitre teintée, pour bien distinguer qui était au volant. Derrière ses lunettes noires, son regard lance des éclairs dans la direction d'Éloïse, puis dans la mienne tandis qu'à l'arrière la Léa se fait toute petite. Elle redémarre en trombe pour aller se garer juste devant l'entrée de la tour, sa place attribuée, à côté de la Mercedes son père. Éloïse relâche son souffle en même temps que moi et continue sa route jusqu'à une place random, à une allure pour le coup plus que modérée.

J'adore être en stage avec Marc. Il est passionnant et a toujours une anecdote marrante à raconter, il est blagueur mais fait également preuve de beaucoup de professionnalisme. Je ne m'ennuie pas une seconde, il m'implique vraiment dans les différentes tâches et trouve toujours le moyen de me faire participer d'une manière ou d'une autre. La plupart du temps ce que j'ai à faire est simple et basique, mais il sait que je n'ai qu'une expérience théorique du travail et je suis soulagée qu'il me fasse commencer en douceur.
Je l'accompagne en ce moment même à un dîner d'affaires. Une table réservée dans un restaurant chic aux frais du magazine, une bonne bouteille de vin, et Marc se retrouve dans son élément. Il veut que je prenne des notes, je fais de mon mieux, ce qui est plutôt pas mal sachant que je n'ai pas touché au vin.
L'homme en face de Marc est propriétaire d'une chaîne de grands hôtels-restaurants dans toute la France, et il veut qu'on publie un article à l'occasion de sa quatrième étoile Michelin pour ses restaurants. Seulement, Evil est le magasine le plus prisé en France et les offres d'articles pour des gens importants ne manquent pas. Autrement dit, sa présence dans une des pages de notre magazine va lui couter... cher. L'homme est un peu froid et vexé de ne pas avoir eu à faire au PDG de Evil France en personne, mais comme d'habitude Marc sait séduire son public et mettre le client dans sa poche. Ils sont bientôt en train de parler et de rigoler de bon cœur. Subtilement, Marc incite le riche propriétaire à faire grimper le montant de son offre, et en sortant du dîner mon senseï est très satisfait.
-"J'ai trouvé ta découverte client absolument brillante! Tu lui as posé des questions qui l'ont poussé à s'ouvrir à toi dès le début, puis tu l'as un peu brossé dans le sens du poil en te servant des infos sur sa personnalité que tu avais remarqué. Ça t'as permis de le faire sentir écouté et compris. Il t'as fais confiance.
- " Merci Alessia c'est exactement ça. La prochaine fois c'est toi qui va me proposer un schéma de découverte client d'accord? Puis quand tu seras prête, tu pourras mener des rendez-vous client toi même! »
Ça y est, j'ai la pression.
La manière dont me regarde Marc actuellement me fait me demander s'il n'a pas quelque chose d'autre derrière la tête.

EVILOù les histoires vivent. Découvrez maintenant