Chapitre 36 : Apparences trompeuses.

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Calé contre l'embrasure de la baie vitrée, je guette en retrait la soirée. Au milieu, Nina danse et chante -braille plutôt- lunettes de soleil sur le nez, des escarpins sous une robe rose tout à fait moulante.

— Viens ! Un beer-pong s'prépare ! me lance-t-elle après m'être tombée dessus.

— Putain, Nina...

Je manque de m'étouffer alors que je tirais sur ce joint pour lequel je prends de plus en plus goût -maintenant que Nina squatte mes journées- de la même manière que je me suis laissé entraîner dans cette maison cossue de la banlieue bostonienne, parce que je suis un mec plus influençable qu'il paraît.

— Viens, viens !

Je souffle d'abord une latte vers la terrasse, puis me mets à la suite de Nina lorsqu'elle nous fait sillonner la foule en transe sous les volutes de fumé. Je sais déjà plus où atterrit mon joint tandis qu'on me l'arrache des doigts.

— Ouais, mon gars ! Vas-y, ramène-toi !

Un garçon que la métisse semble connaître me prend sous son aile quand celle-ci se range au côté de l'équipe adverse. Je me laisse entraîner par le jeu et m'applique même lorsque c'est mon tour de lancer la balle de ping-pong, et pareil quand tout le monde hurle « bois, bois, bois » à chaque fois qu'on désigne le perdant.

— Cette fois, tu te défileras pas, beau gosse ! m'avise un mec de mon équipe quand il nous reste plus qu'un gobelet sur la table.

De toute évidence, j'ai réussi à esquiver toutes gouttes d'alcool jusqu'ici. Les autres tambourinent sur la table en m'hurlant d'achever le match, et davantage la métisse dont le regard plein de défi m'arrache un fin sourire. Alors, j'attrape le gobelet qu'on me tend et d'une traite je le vide. A la dérobée des ovations cependant, je m'éloigne et manque de dégueuler la Pepperoni que j'engloutissais avant de débarquer. Je supporte mal l'alcool.

— Bah, alors bad boy ?

Les yeux et les joues rouges, je suis sûr, je me retourne et tombe sur une fille aux cheveux coupés façon garçonne, piercing sur le nez, et sourire de côté sur les lèvres.

— Je t'imaginais beaucoup plus résistant avec cette tête de dur à cuir !

Pour une fois, j'ai retiré mon bonnet alors qu'il chauffe comme dans un sauna à l'intérieur. Je me retiens de rire jaune et rétorque :

— Les apparences sont trompeuses, t'as jamais entendu ?

En plus, c'est pas qu'un petit mélange qu'ils ont fait là. J'ai encore la gorge qui brûle. Cette fille dont les talons soulignent une silhouette moulée derrière du cuir et de la dentelle me tend son verre d'eau et je ne me fais pas prier pour le vider.

— Mer...

— Attends !

Je fronce les sourcils parce qu'elle me retient le bras au moment où je suis prêt à décamper.

— Cet air torturé et un peu marginal, j'ai pas l'impression que ce sont que les apparences, ça, me souffle-t-elle dans l'oreille cette fois.

Je manque de m'étrangler quand elle laisse la trace de son rouge à lèvre sur ma joue.

Sérieusement ?

D'autant plus qu'elle me suggère volontiers la vue de son décolleté ! Je fronce les sourcils. Pourquoi les mecs paumés comme moi plaisent toujours aux meufs comme elle, le genre fasciné par le reclus de société aux airs de bad boy. Je suis reclus dans ma chambre pour fuir le lycée la plupart du temps, ouais, mais certainement pas un bad boy.

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