Morceau treize - Isaac

460 55 32
                                    

Paris

Helian. Helian. Helian.

Comment ai-je pu passer à côté de cette information pendant toutes ces années ? Plus encore, pourquoi personne ne le sait ? Et pourquoi ai-je le droit de le savoir ? J'ai peur de ne pas être à la hauteur de cet excès de confiance.

J'ai vérifié sa page Wikipédia, au cas où, mais évidemment, sa véritable identité n'est pas notifiée. Qui pourrait savoir que ce type s'appelle Helian ? Sa famille, peut-être. Ouais, sauf qu'il ne m'a jamais parlé de sa famille. Peut-être que je devrais lui poser la question.

Ça me donne une super excuse pour le revoir et je ne suis absolument pas contre cette idée. Notre dernier baiser me laisse un goût d'inachevé. J'aurais aimé qu'on aille plus loin. J'aurais aimé explorer tout son corps à l'aide de mes doigts – voire de ma langue. Mais un appel plus tard et son cœur n'était plus à la fête.

Je ne sais pas qui l'a appelé. Je ne sais pas non plus ce que cette personne lui a annoncé, mais j'ai bien vu que ce n'était pas une bonne nouvelle. Il n'a rien dit de plus. Il a simplement enfilé son manteau avant de disparaître avec la nuit noire de Paris.

Il n'y a pas d'étoiles à cause de la pollution. Enfin, si, elles sont là, mais on ne peut pas les voir. J'ai vu que Hel – Helian – avait un système solaire tatoué sur l'un de ses bras. Peut-être que je devrais l'emmener voir les étoiles un de ces jours.

Attends. Deux secondes. Je n'ai pas vraiment dit ça ? C'est carrément niais. Ce n'est pas tout-à-fait mon genre et pourtant, c'est exactement la pensée que je viens de formuler. Bien. Tout va très bien.

J'ai aussi profité de son départ précipité pour réfléchir. Je crois bien que je ne le hais plus. Enfin, pas autant qu'avant. Peut-être même que je l'apprécie. C'est le premier fait important. Deuxièmement, j'aime vraiment bien l'embrasser et j'aime davantage quand c'est lui qui le fait. Troisièmement, je dois arrêter de le harceler sans cesse. Il répondra quand il voudra. Même si ça prend un temps fou.

Comme en ce moment. Mais je travaille sur ma patience.

« Bonjour fils. Je n'ai pas eu de tes nouvelles depuis un moment et j'aimerais que tu viennes dîner ce soir à la maison. Natalya veut te rencontrer. A ce soir. »

Mon père dans toute sa splendeur. Froid et autoritaire. Je ne sais pas trop comment ma mère et lui se sont rencontrés. Je crois que maintenant ils se détestent et sont prêts à tout pour s'opposer. Sauf pour dire qu'ils ont autant raté leur mariage que leur divorce, là ils sont toujours d'accord.

Je suis simplement un dégât collatéral à toute cette merde. Toujours est-il que mon père ne s'embête jamais à me demander mon avis, je suis convié ce soir, je dois donc être là ce soir. Natalya, c'est sa nouvelle copine et elle doit probablement être plus jeune que moi. Comme les trois précédentes.

Je préfèrerais voir Hel ce soir. Et peut-être même mettre en application mes projets le concernant.

Lorsque les rouages de mon cerveau se mettent en place, une idée fleurit dans mon crâne. J'ai envie d'emmerder mon père avec cet invité impromptu et l'imaginer rouge de gêne parce qu'il ne saura pas exactement ce que représente Hel pour moi est particulièrement génial.

Et comme ça, je pourrais aussi voir Hel ce soir. A supposer qu'il accepte, ce qui n'est pas vraiment gagné.

Un petit tour par le bureau de mon très cher patron et un appel vers Dédé-le-connard pour connaître l'adresse de Hel et me voilà parti. J'ai commandé un Uber parce que je n'avais pas envie de réfléchir aux différentes lignes de métros. Et aussi parce que je dois agir rapidement.

Dédé m'a aussi donné les codes pour entrer. Ce mec est un enfoiré fini à qui on ne peut pas faire confiance. Je prends l'ascenseur jusqu'au septième étage et je me dis que Hel doit prendre les escaliers à chaque fois.

Alors que je sonne, la porte s'ouvre sur un Hel partiellement endormi. Et en caleçon. Noir. En caleçon noir. Presque nu. J'ai chaud.

Je dois lutter de toutes mes forces pour ne pas laisser mon regard se balader le long de son corps. Comme je l'ai dit, je travaille ma patience. Même si cette épreuve est bien plus compliquée que la précédente. Vile tentation.

— Archyos ? s'étonne-t-il.

J'entre et ferme la porte derrière moi. C'est très intelligent, parce que maintenant, j'ai faim. De lui. Mais je me retiens. Je ne suis pas une bête de sexe non plus.

— Tu pourrais peut-être passer à Isaac maintenant, non ?

Il rit. J'aime bien ça. Il est rayonnant quand il rit.

— Peu importe, qu'est-ce que tu fous là ?

Plusieurs réponses à cette question, mais je ne suis pas sûr qu'une soit vraiment adaptée. Je ne peux pas directement commencer avec l'histoire de mon père. C'est un coup à ce qu'il me claque la porte au nez.

— J'avais envie de te voir.

Ce qui est entièrement vrai. Il hausse un sourcil et s'approche dangereusement de moi. Bordel, se rend-il compte qu'il est presque nu ? Et que je suis un homme faible qui a ses limites ? Je n'en suis pas sûr. Ce mec est bien trop pur pour ce monde.

Une fois qu'il est suffisamment près, il retire ma veste et laisse ses doigts courir le long de mes épaules avec un sourire que je ne lui connais pas encore. Je le suspecte de profiter allègrement de la situation. Rapidement, je me retrouve bloqué contre la porte d'entrée.

— Et la vérité ? Je déteste qu'on me mente, Isaac, gronde-t-il près de mon oreille.

Ses doigts descendent sur mon torse avant de jouer avec la boucle de ma ceinture. Ça devient compliqué de réfléchir correctement. J'ai le cerveau embué par autre chose. Les degrés augmentent dans l'entrée.

— J'ai un service à te demander, avoué-je.

Il ne s'éloigne pas, mais je vois qu'il est déçu.

— Mais je voulais vraiment te voir Hel, ce n'était pas un mensonge.

Peu après, on se retrouve installés dans son canapé, lui toujours aussi nu et moi toujours aussi con. Bien, on n'est pas tombés dans une espèce de troisième dimension. Il m'a collé une tasse de café dans les mains. Ça me va bien.

Pour éviter de m'embrouiller dans des explications foireuses, je lui tends mon téléphone où est affichée la conversation avec mon père. Je le vois froncer les sourcils avant de me rendre l'appareil.

— Je ne suis pas sûr de comprendre. Tu veux que je me fasse passer pour toi ? C'est ton père, il te connaît, réfléchit-il.

— Non, j'aimerais que tu m'accompagnes ce soir.

Surpris, il pose sa tasse sur la table basse avant de se lever d'un coup comme si le canapé était subitement devenu brûlant. Il frotte ses cheveux bruns emmêlés avant de me détailler de ses grands yeux chocolat.

— Sûrement pas, on n'est pas en couple, je ne vais pas t'accompagner chez-lui. C'est vraiment une idée à la con !

Je crois que ce qu'il me dit me touche un peu plus que ça ne le devrait. Je ne lui demande pas de prétendre une telle chose, mais il ne m'écoute déjà plus. Puis, ça ne change pas grand-chose finalement.

— Je veux juste l'emmerder et passer une soirée avec toi. Je sais qu'on n'est pas en couple, mais tu n'as jamais dîné chez les parents de tes potes ? Avec Val, on le fait souvent.

Il me regarde comme si je ressemblais à un alien, venu de Mars. L'exemple de Val n'était pas le plus probant sachant que Hel suspecte une relation amoureuse entre lui et moi. Peu importe. Il n'y a rien à part une solide amitié.

— OK, capitule-t-il.

J'essaie d'être régulière en ce moment, j'espère que ça vous va aha.

Si jamais j'écris des scènes 'osées' entre ces deux-là, quel point de vue vous ferait plaisir ? Le Isaac autoritaire (et pas forcément dominant) ou le novice Hel (et avide d'apprendre) ?

Maestro Où les histoires vivent. Découvrez maintenant