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Partie 9 - Anthea

Anthea n'arrivait pas à s'immerger dans les conversations de ses camarades, bien qu'elles aient exactement le même sujet en tête. Comme c'était un jour spécial, elles avaient décidé de s'offrir quelque chose de spécial : le célèbre et délicieux restaurant Gundel. Anthea était rarement venue ici, peut-être une ou deux fois. Elle se rappelait vaguement d'avoir fêté un baptême ou quelque chose comme ça. Elle se rappelait surtout le principal intéressé qui ne cessait de brailler.

Sa cuillère dans la bouche, le côté bombé tout contre son palais, Anthea ne savourait même pas son 'Dôme de Chocolat Blanc, Amandes et Framboises'. Tout le repas avait été délicieux, et en ce jour de liesse, si à l'origine elle avait été anxieuse à l'idée de l'investissement considérable financier qu'elle devrait faire en s'offrant ce restaurant ; finalement, elle n'y pensait plus. Ses copines jacassaient autour d'elles, les sujets partant dans tous les sens à toute vitesse, et parfois conférant à l'hystérie. Mais Anthea était loin de tout ça, loin de son addition salée, loin des minutes qui s'écoulaient et encore plus loin de sa fatigante matinée à l'université.

En vérité il ne s'était pas passé grand-chose ce matin-là. C'était tout simplement le jour de reprise de l'année scolaire, il n'y avait que des réunions longues et ennuyantes, et des papiers distribués qu'aucun n'élève ni même professeur ne regarderait jamais. Cette matinée avait surtout été éprouvante car c'était le tout premier jour d'Anthea dans une université, le premier jour de sa vie d'étudiante, le début de ses années d'études supérieures. Elle était stressée depuis un certain temps à l'idée de la rencontre avec cet environnement inconnu, de cette vie nouvelle à appréhender.

Finalement rien de terrible n'était arrivé. Certes, la découverte des grands décors : grande université, grandes allées, grands amphitoriums ; l'avait grandement impressionnée et un peu fatiguée, il en fut autrement pour le contenu des réunions en lui-même. Inutile de revenir là-dessus. En revanche, elle se rappelait avec force sa découverte de l'ambiance des cours magistraux en université. Après un appel fastidieux, et une entrée en amphitorium en une file indienne tout aussi pénible ; elle s'était assise au huitième rang, pas loin du bord extérieur. Durant un impertinent moment d'ennui, en regardant derrière son dos, elle fut surprise de voir le nombre de rangées qui s'étendaient jusque dans la pénombre, loin, très loin tout au fond. Dans un petit élan de panique, elle regarda sur sa gauche et vie en perspective, toute la moitié gauche de l'amphitorium, comme autant d'étudiants qui s'entassaient les uns sur les autres ; le visage encore juvénile de l'adolescence, prenant des notes. Cela donnait une terrible impression de troupeau, d'homo sapiens qui allaient survivre dans un côté bestial, de l'immensité et la dureté d'être élève -enfin étudiant se rectifia-t-elle- dans une prise de note où environ 400 autres personnes allaient se battre pour le même objectif.

Anthea avait peur de se faire dévorer par tout cela. Elle avait de la volonté, des épaules, du charisme naturel sous une couche de timidité féminine. Elle était capable de se battre, mais elle avait déjà ressenti brutalement dans ses fibres nerveuses, sous son épiderme, le poids immatériel mais présent de cette pression de l'immense.

Mais qu'importe, elle n'y penserait pas aujourd'hui. Elle revint à l'instant présent, happée par les piaillements hystériques de ses amies, et contrairement à cette irritabilité qu'elle avait ressentie voilà deux minutes en arrière, elle prenait maintenant plaisir à les entendre, et n'avait qu'une envie : se joindre à elles.

Mais dans l'immédiat, si elles voulaient arriver en avance ; elles devaient surtout aller régler la note et se mettre en route.

En résumé, c'était vraiment une bonne journée.

Sur scène, Ken venait de finir d'engloutir son troisième kimbap. Par kimbap j'entends rouleau de kimbap évidemment. Il avait visé ses préférés en premiers : sashimi de crevette et œuf brouillé. Un mélange pas très courant mais que Hakyeon prenait grand plaisir à lui préparer. Les VIXX étaient tous assis au sol en tailleur, en jogging et débardeurs, une serviette humide autour de leur nuque.