Partie 3 - La lune de Budapest

74 7 0
                                    


Je pousse la porte vitrée de l'entrée principale, et retrouve avec bonheur l'air frais et vivifiant de la nuit. Je lève les yeux vers le ciel. Contrairement à notre arrivée, il ne pleut plus. L'air est toujours quelque peu humide -et donc assez froid-, mais la lune est pleine, elle irradie sublimement dans un grand ciel noir et bleu, où percent des étoiles scintillantes et des filets de nuages ivoiriens. J'ai toujours eu une fascination, je pourrais presque dire un amour pour l'astre lunaire. Depuis toujours, je suis persuadé qu'il s'agit d'une puissance, d'un grand pouvoir qui nous parle. Les soirs de pleine lune sont souvent particuliers, générateurs de soirées à fortes émotions... Et dans mon cas d'autant de larmes de tristesses que de bonheur. La pleine lune provoque en moi des élans de vie, des courants d'énergie, de courage, de sensibilité qui me donne envie de tout vivre et affronter. L'air est frais, le lieu paisible, je me sens serein.

Une part de gâteau à la main, posée sur mes genoux, le mouchoir plein de miettes, je ressemble vraiment à un écolier. Je baisse le menton en signe de respect et j'adresse mentalement une courte prière à la lune. « S'il te plaît, fait en sorte que tout se passe bien ici, en Hongrie, que notre journée de demain soit positive, que notre concert soit empli de succès. Nous travaillons durs et nous le méritons, je promets de faire tous les efforts possibles pour nos Starlights et pour moi-même ! Merci d'être là, de m'écouter et de nous aider. ». Quelque peu apaisé et rasséréné, je bouge mes doigts engourdis et extirpe mon Ipod de ma poche. Suivant mon envie du moment, je lance G.U.Y de Lady Gaga, un morceau qui commence à dater quelque peu, dans cette ère où ''six mois post-produit'' équivaut à l'ère glaciaire... Je continue de grignoter mes douceurs, bercé par la musique, sous la lumière pâle de la lune. Je me sens bien et en sécurité. Je m'éprends du rythme pop de la chanson et me fait plus attentif à la voix de la célèbre chanteuse. ''I wanna be that G.U.Y'' je m'identifiais cette phrase, tirée du contexte de la chanson ; comme ont du le faire à peu près toutes les personnes l'ayant écoutée.

Je voudrais être vraiment moi, libéré de toutes contraintes. Mais qui suis-je vraiment ? Est-ce que j'œuvre pour combattre mes propres défauts, ou pour progresser plus vite avec mes qualités ? Se libérer de toute contrainte ne signifie t-il pas par essence de se retrouver hors du système du jeu des apparences sociales ? Si oui pourquoi suis-je encore là à me forcer à faire le singe tout les jours ? La réponse est simple : maintenant pour espérer atteindre la liberté, il faut d'abord s'affranchir d'une situation financière et professionnelle satisfaisantes. Œil pour œil, on a rien sans rien ...

C'est dans les secondes de silence suivant ces phrases toutes faites qu'un ange passa, et que j'entendis un bruit derrière moi. Je n'eus même pas le temps de sursauter, je me retournais juste pour voir l'intrus. En l'occurrence... Un Hongbin et un N bien déchirés par l'alcool, titubants et sans doute puants. Je n'avais pas bougé de mon banc situé à quelques mètres à droite de l'entrée principale, devant une haie de plantes grasses et rafraîchissantes -ou plutôt glaciales vu la saison- ; et ils bifurquèrent vers le côté opposé de l'allée, sans même remarquer ma présence. Riant et parlants à voix forte, beurrés comme des coings, j'ai entendu un bruit liquide, et au travers d'un jeu d'ombres réussi à voir que N tenait toujours une bouteille d'alcool à la main ; une bouteille aux trois quarts vide ...

Et comme un homme sait reconnaître les besoins d'un autre de ses congénères, il ne me fut pas difficile de deviner ce qui amenait ces deux-là ici : le besoin viril et ancestral de pisser ensemble à la belle étoile. De pisser ensemble leur trop plein d'alcool, bras dessus, bras dessous, se satisfaisant ainsi de l'appartenance à un même clan et d'une amitié marquée. Je les regardais donc ainsi sans trop comprendre le sens de leur étrange rituel, me sentant une fois de plus un étranger. Le gâteau au chocolat commençait à fondre entre mes doigts.

Cameo | LeoBin (VIXX) |  FROù les histoires vivent. Découvrez maintenant