❃ HUIT ❃

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J'ai filtré deux appels aujourd'hui. L'un venait de Nabil et l'autre de son grand frère. Depuis notre dernière petite discussion je n'ai pas revu les deux rappeurs. Pour peine, j'ai été en rendez-vous quasi tous les jours. C'est vrai que j'ai trouvé l'excuse parfaite pour les éviter mais Isabella m'a dit de ne pas trop tarder non plus. Je lui ai expliqué ce qu'il s'est passé et c'est vrai qu'elle m'a dit que je m'étais comporté comme une fille jalouse d'une autre. Ce qui selon elle est adorable mais qui selon moi m'énerve. Je n'ai pas besoin de tomber amoureuse d'un type avec qui aucun projet ne sera possible. Un jour ou l'autre je retournerai à ma petite vie. Avec mon physique ou pas. Je voulais passer ma soirée devant un bon petit téléfilm à me goinfrer de glace et de mauvaise bouffe mais Julie m'a envoyé un message. Je dois me rendre à un gala de charité. Avec Tarik. Quelle surprise ....

C'est un pas en avant vers l'image de couple marié. Deux personnes qui ont le cœur pris mais qui ont les mêmes « activités ». J'ai du mal à imaginer Tarik à ce genre de soirée. C'est vrai. Lui qui est quasiment toujours en survêtement je l'imagine très mal habillé en costard cravate. D'ailleurs, c'est lui qui est supposé venir me chercher. Il a dix minutes de retards mais je ne dirais rien. Quoique peut-être que s'il dépasse ces dix minutes je n'hésiterais pas à le lui faire remarquer. J'ai parlé trop vite. Parce que j'entends sonner à la porte. J'attrape mon portable, ma pochette et je descends le rejoindre. Quand j'ouvre la porte je suis surprise par ses efforts. Il a attaché ses cheveux longs dans un petit chignon bas, ses cheveux sont plaqués. Son costard lui va à merveille et souligne chacun de ses muscles même les moins formés. Le mieux dans l'histoire c'est son odeur.

Nos regards se croisent et il me sourit tendrement. D'ailleurs il se penche vers moi et embrasse ma joue. Nos parfums se mélangent à la perfection et je crois que le visage d'Isabella ne le laisse pas indifférent. Ni ses courbes par ailleurs. On ne dit rien du tout. Pas un seul mot échangé pendant tour le trajet. Je n'ai pas grand chose à lui dire et en même temps Tarik n'essaie pas non plus de faire la conversation.

Lorsque l'on arrive au gala, on nous installe à une table. Nous ne sommes pas seuls, d'autres jeunes sont avec nous. Des influenceurs apparemment et des héritiers comme moi, enfin comme Isabella. Tarik est connu malgré d'où il vient. Son visage ne passe jamais inaperçu. Pour la peine, malgré que l'on soit assis à côté certaines filles ne se gênent pas pour le reluquer. Les garces ! C'est un jeune trentenaire sui brise la glace. De ce que j'ai compris, il s'appelle Arthur et son père est à la tête d'une grande chaîne de produits de beauté française.

Arthur: « Ça va t'es pas trop dépaysé ? »

Je lève la tête vers lui et je comprends très rapidement où il veut en venir. Tarik lui répond brièvement sans trop s'attarder.

Arthur: « Bientôt on aura une table entière de p'tites racailles... » dit-il en pouffant de rire.

Tarik se crispe sur sa chaise je sens qu'à la prochaine réflexion c'est pas sûr qu'il se retient.

Moi: « Tant qu'on se retrouve pas avec une table entière de p'tits blancs friands des paradis fiscaux on peut dire qu'on est chanceux. » j'affiche un sourire forcé.

C'est vrai que j'ai un problème avec la méchanceté. Ça m'agace les gens qui profitent de la gentillesse des autres.

Arthur: « Ouh directement les grands mots. Apparemment la délinquance c'est contagieux. »

Tarik: « Eh Zemmour à la prochaine réflexion c'est mon poing qui sera contagieux. »

Arthur: « Moi c'est Arthur.... Mohamed... » dit-il pour le provoquer.

Je suis sur le point de dire quelque chose mais on vient nous servir le repas. Arthur ne me quitte pas du regard. D'ailleurs il me détaille bien comme il faut. Quand je discute avec une jeune fille à ma gauche il en profite pour rentrer dans la discussion. Sauf que je ne fais pas vraiment attention à ce qu'il raconte. Tarik pose son bras autour de mon épaule lorsqu'il comprend ce qu'Arthur manigance.

J'ai l'impression qu'on est seuls contre tous. Et ça m'agace. Ces faux dons, faux visages. C'est comme si tout ce en quoi on aurait pu avoir espoir disparait dans les airs, sous leurs comportements hautains.

Un serveur arrive et pose un cocktail à côté de mon assiette. Il m'indique qu'un invité me l'offre. Je jette un coup d'oeil vers Tarik qui semble avoir compris que le verre m'avait été offert par personne d'autre qu'Arthur.

Tarik: « Touche pas le verre... » il se lève sans prévenir et se jette sur Arthur. Il l'attrape par le col de son costard et le tire vers lui.

Moi: « Tarik !! »

Tarik: « J'vais apprendre à ce p'tit con à bien se comporter en présence d'hommes! »

Je me lève à mon tour et le tire en arrière pour qu'il lâche l'autre imbécile mais c'est peine perdue. Tarik a bien plus de force que je n'en aurais de toute ma vie.

Moi: « S'il te plaît!! »

Tarik me regarde et je semble le convaincre de ne pas faire de connerie. Il le relâche et m'indique de récupérer mes affaires. D'ici je vois Arthur attraper son verre de whisky se lever et s'apprêter à frapper Tarik par derrière. Je me précipite pour protéger ce dernier et la dernière chose que je vois c'est le petit regard apeuré de Tarik qui me rattrape avant que je ne m'écroule.

*

Quand j'ouvre les yeux, je suis dans le flou total. J'ai du mal à me souvenir où j'étais il y a quelques minutes. J'entends la sonnerie de mon téléphone qui n'arrête pas de sonner. Quelqu'un qui chuchote. Je pense que c'est la voix d'Amira, mais je ne suis pas certaine. Le plafond est bleu, je ne sais pas si c'est la couleur de la peinture ou est-ce que c'est moi qui confond les couleurs.
La porte s'ouvre et un médecin m'approche avec sa blouse blanche.

: « Bien dormi ? » dit le médecin avec un petit sourire de compassion.

Moi: « Je suis où exactement ? »

: « Les urgences du 14ème mademoiselle Sanchez... vous avez pris un sale coup sur l'arrière de la tête. Vous êtes dans le brouillard depuis une petite heure seulement mais c'est à cause du choc... »

Moi: « Et l'homme qui était avec moi ? »

: « Il devait accompagner les agents de police. »

La tête d'Amira s'approche et elle me sourit en me tenant la main.

Amira: « Nabil l'a accompagné. Tu vas bien ? »

Moi: « Ça va. Je peux rentrer ? »

: « Pas de suite, on va vous passer quelques contrôles de routines et vous rentrerez après. »

Moi: « Dans combien de temps à peu près ? Je veux voir Tarik... »

Amira: « Il vient directement après ne t'inquiète pas je suis là. »

: « On vous fait passer les tests le plus rapidement possible. »

Il repart aussi rapidement qu'il est entré et je le revois une demie-heure après. Je passe comme prévu les tests de contrôle pour être certaine que je n'ai aucune commotion dangereuse. Entre deux scanners  je croise Tarik dans les couloirs. On se regarde longuement. Bizarrement j'ai envie de le prendre dans mes bras et m'assurer qu'il n'a rien. Mais je ne fais rien. Je lui sourit mais son visage est refermé. Il a l'air en colère et prêt à tuer quelqu'un. Je baisse la tête intimidée et suis le médecin qui termine par me prescrire un anti douleur pour mes deux points de suture que j'ai au bas du crâne à la limite de ma nuque.

Entre temps Amira est rentrée avec Nabil. Ils m'ont laissé seule avec Tarik. C'est lui qui compte me déposer. Dans le parking alors qu'il déverrouille sa voiture je passe derrière lui et le prend dans mes bras.

Moi: « J'ai eu peur pour toi... »

Il semble crispé et dès qu'il en a l'occasion il se détache de mon étreinte et monte aussitôt dans la voiture. Son geste me vexe, peut-être que ce soir je suis trop sensible. Peut-être que la soirée me rend trop tendre. Lorsqu'il prend le périphérique, Tarik s'engage dans celui qui va dans le sud. J'en conclu donc que l'on va chez lui.

Quand on arrive chez lui, il me prépare un pyjama. Celui d'une fille. Je crois voir rouge. Depuis quand est-ce qu'il a des vêtements de fille chez lui. Est-ce que ce sont les vêtements de son ex ? J'en perd la tête et en même temps je en comprends pas pourquoi je suis si bloquée dans ma jalousie. Ça m'énerve, je m'énerve. Du coup comme la petite imbécile que je suis j'attrape son pyjama et je vais prendre une douche. Peut-être que ça me calmera.

Quand je suis propre comme un sous neuf, je le cherche du regard et je me rend compte que Tarik est dans sa chambre. Une musique en fond et l'odeur de la beuh qui m'emprisonne les poumon. Je n'attends pas son autorisation et entre sans prévenir.

Moi: « J'ai terminé merci. »

Il me fait un signe de tête alors qu'il ose à peine me regarder.

Moi: « Je peux savoir ce qu'il y a ? »

Tarik: « Vas te coucher Isa... »

Moi: « Pas avant d'avoir eu ma réponse. »

Tarik: « Tu veux savoir ? Ce qu'il y a c'est que j'suis pas un pd pour que tu prennes les coups à ma place. »

Moi: « Non mais Tarik c'est pas... »

Tarik: « C'est pas quoi ?! Je prends les coups, je vais à l'hôpital s'il le faut. Maintenant vas dormir ! »

Son ton m'agace. C'est trop compliqué de dire merci. De dire qu'il a eu peur. D'utiliser les bons mots.

Moi: « Si tu sais pas contrôler ta peur faut aller consulter mon p'tit. J'suis pas faites de sucre et si je veux prendre les coups je les prendrai. Maintenant je vais aller dormir parce que j'en ai décidé ainsi. Bonne nuit Tarik. »

Je sors en claquant la porte de sa chambre et je m'endors sur le canapé comme une malpropre. Ce connard a réussi à me mettre les nerfs.

ASTRES (PNL)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant