LE PHŒNIX

Chapitre Dix-Sept - Iris

— Iris, descendante de Poseidon, je te transmets tes pouvoirs. Reprends ce qui t'appartient, gardienne des océans.

Comme avec Narcée, une lumière orangée entoura les deux filles. Elle s'intensifia un moment avant de s'arrêter et de diminuer d'un coup. Léane relâcha le bras d'Iris et recula d'un pas, puis observa la jeune femme. À l'instar du descendant de Hadès, elle éclatait d'une nouvelle aura, bleu foncé. Elle avait l'air plus menaçante : un sentiment de colère se diffusait autour d'elle. Il fallait la comprendre : il lui était arrivé une chose bien étrange, et contre son gré.

Malgré le fait que ni Narcée, ni Léane ne la touchaient, elle ne parvenait pas à partir. Et pour cause ; elle voulait savoir ce qui lui était arrivé.

Elle déglutit.

Ses interlocuteurs n'avaient plus la même apparence qu'un instant plus tôt — enfin, si, mais ils avaient changé. Le blond resplendissait, littéralement : on aurait dit qu'il avait été « photoshopé » sur place. Sa peau ne laissait paraitre aucune imperfection, elle était aussi lisse que celle d'un bébé. Ses cheveux n'avaient pas l'air secs, gras, ou crépus : ils étaient lisses et brillants. Et c'était peu dire, car ils resplendissaient littéralement.

Léane, quant à elle, n'avait pas beaucoup changé, mais la différence se faisait surtout au niveau de son regard : ses yeux n'étaient non plus vairons, mais ambrés. Un peu comme sa bague, d'ailleurs, qui semblait... bouger. Oui, c'était cela.

La bague bougeait.

— Je... vous... balbutia t-elle.

— Tu... nous... ne savons pas ce que tu veux, plaisanta Narcée, l'air de rien.

— Oh, ta gueule. Qu'est-ce que vous m'avez putain de fait ?

— Calme-toi, sur le vocabulaire... rit le jeune homme.

Il avait vraiment l'air détendu, même si elle ne pouvait pas tout à fait voir son regard.

— Poseidon, les océans, tout ça, c'est quoi ? reprit Iris.

— Le dieu grec de la mer, des grandes étendues d'eau, l'énerva Narcée.

— En fait...

Léane venait de parler. Iris reporta toute son attention sur elle. La blonde soupira.

— Bon, écoute. Tu te souviens d'hier...

*      *     *

La blonde, devenue plus châtain, l'écouta sans l'interrompre. Cependant, à la fin, au lieu de lui poser des questions, elle essaya plutôt de faire apparaître de l'eau dans ses mains — puisque supposément, elle pouvait utiliser cet élément. Elle ignorait toutefois qu'il lui fallait la volonté de Léane pour faire de sa magie. Cette dernière devina aisément ses pensées, et, lui souriant, pensa à de l'eau s'écoulant des paumes d'Iris.

Alors, le liquide vital à la vie prit forme dans sa main, tel un fil. Il dansa, s'enroula autour des poignets d'Iris, sans la mouiller. La jeune femme, subjuguée, ne détacha pas son regard de l'eau. Soudain, la magie disparut. Elle reporta son attention sur Léane, froide. Celle-ci la regardait d'un air neutre.

— Et donc, tu veux que je t'aide à trouver des autres... descendants ?

— Il s'agit plutôt de rester avec moi jusqu'au bout pour... disons... sauver le monde, ou je n'sais quoi. C'était pas dit clairement.

— Donc vous savez même pas pourquoi tu fais ça ?

— Hypothétiquement parlant, si. Concrètement, non.

— Sauf que tu peux pas te baser sur des hypothèses.

— C'est ce qu'on fait les scientifiques avant de prouver ce qu'ils pensaient. Et je te signale que les dieux grecs ou la magie ne sont certainement pas des variables existantes dans les hypothèses scientifiques. Je peux pas expliquer ce qui est arrivé d'un point de vue scientifique, mais tu vois aussi bien que moi que c'est pas une illusion.

Iris fit une moue désapprobatrice. Elle avait raison, en un sens, mais en parlant de variables... comment trouverait-elle douze personnes spécifiques parmi les six milliards et demi de la planète Terre ? Certes, elle en avait déjà trouvé deux, mais c'était certainement un coup de chance. Que les deux premiers « descendants » soient dans le même établissement scolaire était soit parce que Léane avait un instinct hors du commun, soit parce qu'elle avait un karma très élevé.

— On saura demain le pourquoi du comment de ma mission, déclara alors la blonde.

— « On » ? releva Narcée en haussant un sourcil.

— C'est un peu compliqué... vous pourrez venir au square, demain, après les cours ? Près de la fontaine...

— Où on était aujourd'hui ? questionna le jeune homme.

Léane hocha la tête. Iris, aux aguets, acquiesça lentement. Elle n'avait rien à perdre, à part peut-être sa tête. Et puis, cette histoire de dieux et de magie l'embrouillait. Autant en savoir plus sur ce qui lui arrivait... et puis, les deux autres n'avaient pas l'air d'être plus informés qu'elle. Il valait mieux se fourrer dans un pétrin à plusieurs plutôt que seul...

Non ?