34 Tout s'accélère

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- Je le savais, je le savais, s'écrit Harvey.
J'en étais sûr !

- On se calme, Harvey, on dirait que tu vas danser la gigue... Le taquiné-je.

- Danser la quoi ? S'exclame David.

- La gigue... C'est une danse irlandaise.

- T'as de ces expressions, Kate...

- J'étais prof de français, avant... Moi qui essayais de montrer l'exemple à Schelley et à mes élèves. Mon language s'est nettement détérioré. C'est mort...
J'attends une réaction de sa part qui ne vient pas. J'insiste :
C'est mort... Les morts quoi...

- Kate, arrête, tu me fais peur, c'est quoi ce jeu de mot pourri ? Depuis quand tu as de l'humour, toi ? Me lance David en me donnant un léger coup sûr l'épaule.

- Pfff...

Henry interrompt notre querelle fraternelle :
- Immunisée vous dites ? Comment est-ce possible ? Demande Henry.

Je reprends instantanément mon air sérieux. Fin de la plaisanterie.
- Pas de question, Henry. Vous savez ce que vous devez savoir...
Je pars à Winston chercher de quoi largement vous défendre.
Je veux que le portail soit fini à mon retour !

- Ça y est, elle recommence... Râle David, en roulant les yeux vers le ciel.
Dis, c'est pas parce que Mademoiselle est immunisée que Mademoiselle doit être chiante !

- Tu connais le dicton, frérot ! Qui aime bien, châtie bien ! Lui rétorqué-je en partant.

- Frérot ? V'là aut'chose... Bougonne- t-il.

Je vois Emily se lover dans ses bras en lui disant :
- C'est parce qu'elle veut nous protéger, chéri. Comme nous avec Sarah...

- J'devrais plutôt l'appeler Maman alors ! Tu savais qu'elle était prof, Emily ?

- Je t'ai entendu, David Stanford ! Lui lancé-je en prenant les clés de la Nissan.

Direction Winston. J'aime mes expéditions en voiture, malgré les paysages qui défilent sous mes yeux. Le monde est en train de décrépir... Les morts sont toujours là, apportant l'horreur à chaque coin de l'humanité. Ils sont d'ailleurs de plus en plus nombreux à s'éloigner du centre. La faim les pousse à parcourir de plus longues distances pour trouver leur pitance.

En revanche, je ne m'habituerai jamais à ces cadavres déambulant dans les rues, semblant errer sans but. La ville n'est plus que l'ombre d'elle-même : les papiers volent dans les airs, les voitures abandonnées accentuent davantage l'absence de vie humaine. Il n'y a plus ni musique, ni rires, ni lumières. Il ne reste que les râles de ces êtres réduits à une lente décrépitude, assoiffés par l'appel de chair ou de sang devenu de plus en plus rare...

L'armurerie est située non loin de Walgreens. Le coin me fait à nouveau penser aux 2 individus que j'avais croisés à l'intérieur du supermarché. Ma rencontre avec le dénommé Glenn et son acolyte Merle m'intrigue toujours autant mais cela attendra. Il y a plus urgent à faire.

Les portes du magasin d'armes sont grandes ouvertes.
Plusieurs rôdeurs marchent lentement à proximité de la devanture. Mon sac sur le dos, les mains armées de mes coûteaux, je sors de la Camry et me dirige à l'intérieur.
Les marcheurs ne se retournent même pas à mon passage. C'en est presque déroutant. Mon sang ne les attire pas ? Me reconnaissent-ils comme l'une des leurs ? Si j'ai pu guérir de ce virus en créant des anticorps, je suis persuadée que d'autres ont également pu le faire. La réponse se trouve-t-elle au centre de recherche d'Atlanta ?

A l'intérieur, plusieurs corps gisent par terre. Ça a tout l'air d'être le fruit d'une lutte. Je ne suis donc pas la seule à venir me ravitailler ici. La plupart des rayons sont vides. Direction l'arrière-salle. Du sang frais colle à mes semelles. D'autres humains sont venus ici il y a peu... Espérons que ce n'était pas la bande de ce Negan...

Je charge le maximum de semi-automatiques et toutes les munitions que je trouve. Deux fusils à pompe me font de l'oeil également. Je remplis le coffre de grenades, bâtons de dynamite et autres douceurs de guerre. On va sérieusement en avoir besoin, pensé-je.

Avant de remonter dans mon véhicule, je lance en direction des marcheurs, le pouce levé :
- Merci pour votre hospitalité ! I will be back !

Mmmm, David a raison. Je commence moi aussi à me faire peur avec mon humour douteux et mes références apocalyptiques...

J'ai hâte de retrouver le groupe, je n'aime pas les savoir seuls. Il y a deux enfants maintenant et un vieillard. Nous voici le club des 7.
- Stop, Kate, tu n'es plus prof et les livres ne servent plus à grand chose dans ce monde...

Près d'Amper Street, il me semble entendre des véhicules rouler. Je gare la Nissan dans une des ruelles à proximité. La prudence est de mise. Allons voir d'où vient ce bruit.

Un escalier de secours me permet de monter sur l'un des petits immeubles de la rue. Une fois sur le toit, je regarde ce qui était autrefois Winston.

Les marcheurs ressemblent à des abeilles éparpillées dans les rues. Mais ce que je vois passer sur ma droite me laisse interdite : plusieurs camions se suivent. Entre chaque engin, des dizaines de morts sont tirés à l'arrière par des cordes, les obligeant à marcher au rythme des véhicules.

- On dirait qu'ils les regroupent comme ... du bétail.

J'ai peur de comprendre... Les morts sont les munitions de ces humains. Un peu comme lorsqu'on lâche les loups dans la bergerie.

- Ça ne me plaît pas du tout...

Après m'être assurée que les camions sont assez loin pour ne pas m'entendre, je reprends rapidement la route de Chester.

Je dois les prévenir au plus vite.

Live Die Love - TOME 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant