L'arrivée inattendue
Anna ouvrit les yeux
Elle entendait
Le craquement des planches
Et le sifflement léger du vent.
Elle releva la tête
Elle se sentait lourde, et engourdie.
Depuis combien de temps était-elle allongée là, inconsciente ?
Elle sentait le pont en bois se lever et se rabaisser à un rythme régulier, sous elle, suivant sans doute le roulis des vagues.Elle était donc sur un bateau.
Elle releva la têteDevant elle se trouvait un fouillis de tonneaux, de cordes et de caisses en bois.
Elle était visiblement à la proue du navire.
Elle s'approcha de cette dernière, afin d'observer la mer. Elle avait toujours aimé la mer.Elle fit quelques pas, et sentit le pont se soulever de nouveau, bien plus fort qu'auparavant.
Elle garda l'équilibre en agrippant le bastingage qui formait un arc-de-cercle à l'avant du navire.
Alors que le pont reprenait son plat, un mugissement tonitruant retentit :« MOOOOH ! »
Anna tendit l'oreille
Ce cri ne ressemblait au cri d'aucun animal dont elle avait le souvenir
D'ailleurs, elle avait beau tenter de se concentrer, impossible de s'en représenter mentalement le moindre.
Elle balada son regard tout autour d'elle
Ce navire ne possédait aucun mât, ni voile.
Et il ne semblait pas marcher à moteur.
Elle était de plus en plus désorientée
Elle tendit l'oreille, pour entendre le bruit des vagues ;Rien. Pas de vagues. Pas de bruit du tout. Rien que le sifflement du vent, et une espèce de respiration sourde, qui avait l'air de venir de sous ses pieds
Elle avait presque... Peur.
Elle se retourna, pour enfin constater la mer par-dessus le bastingageSon souffle se coupa
Le pont se souleva une fois encore
Elle n'eut aucune réaction au nouveau mugissement, un peu plus doux, qui s'ensuivit
La mer
Sous ce navire
Avait disparu
Ou plutôt, elle n'avait jamais été là
Ce n'était que du ciel, à perte de vue .
En guise d'océan, il y avait une réflexion du ciel bleu turquoise empli de nuages épars.
En haut, en bas, à droite, à gauche. Partout, un ciel uniforme et continu, d'un bleu magnifique, rempli d'immenses nuages d'un blanc laiteux.
Elle eut un mouvement de recul, incapable de comprendre ce qu'elle venait de voir
Elle se précipita vers le bastingage à tribord du navireElle fut littéralement soufflée en arrière
Une immense aile blanche, couverte de plume, venait de se rabattre, fouettant le vent de cette infinité de ciel
Ce navire était en réalité construit sur le dos d'une gigantesque créature ailée
Anna se laissa tomber à terre, la tête dans les mains
Elle n'arrivait pas à se rappeler comment elle avait atterri ici
Et cet endroit lui donnait l'impression d'être complètement fantasmé
Etait-ce un rêve ? Un cauchemar ?
Elle se mit une claque, pour en être sûre :« Aïe ! »
Elle ne se réveilla pas
« Tu devrais pas te frapper comme ça. Tu vas te faire mal ! »
Anna se redressa.
Cette voix, apparement masculine, l'avait ramenée à la réalitéElle chercha quelques instants d'où elle était venue ;
Un deuxième étage du pont se trouvait à quelques mètres d'elle, séparé du premier par un petit escalier en bois d'une demi-douzaine de marche
Sur cet étage, derrière un gouvernail lui-même accroché à un complexe système de cordages et de poulies,
Un homme tenait la barre, le regard tourné vers l'horizon.
« J-je suis désolée... Vous êtes qui ? »
« Ahah ! » S'exclama l'homme, en lâchant une main de sa barre, « C'est plutôt à moi de te demander ça, non ? »
Anna sentit ses joues chauffer. Elle ne savait pas trop quoi faire. Elle se releva, épousseta ses vêtements, un peu gênée, et continua de fixer le capitaine du navire ; elle avait du mal à distinguer son visage, de là où elle était ; d'autant plus que ses cheveux blonds vénitiens mi-longs cachaient son profil.
« Moi, c'est Anna. J'ai au-cune idée de comment j'ai atterri ici. » Avoua la jeune fille, impuissante
Le capitaine tourna légèrement la tête vers elle, avant de faire un mouvement du menton, lui indiquant de monter le rejoindre.
Anna s'exécuta sans trop réfléchir ; elle était totalement perdue, et ce type avait pas l'air hostile.Elle se retrouva auprès de lui, continuant de l'observer ; il avait l'air jeune, avec tout de même quelques années de plus qu'elle.
« Tu es apparue... Je ne sais pas ce qu'il s'est passé. Mais ne t'en fais pas. Je vais t'aider. »
« M-merci... »
« Tu peux m'appeler Scham. Capitaine Scham. »
Il avait ajouté cette appellation un peu trop rapidement, comme si ce titre était plus un souhait de sa part, qu'un véritable sobriquet qui lui était attribué.
« Merci, Scham. Je comprends rien du tout... Je sais même pas d'où je viens... »
« C'est pas grave. » La rassura-t-il. Sa main qui ne tenait pas la barre vint saisir délicatement le menton d'Anna
Il tourna complètement la tête vers elle
La jeune fille se mordit la lèvre
Il était beau
La mâchoire marquée, les yeux bleu-vert.
« L'important, c'est de savoir où tu vas. » Continua-t-il, son regard plongé dans celui de son interlocutrice.
Il lui tourna doucement la tête
Anna mit quelques secondes avant de comprendre ce qui était attendu d'elle
Un autre navire-créature passa par-devant eux. La personne qui le pilotait fit un signe au capitaine Scham, qui lui répondit d'un hochement de tête.
Encore plus loin, quelque chose commençait à se détacher du ciel, à mesure que leur embarcation volante avançait.
Anna plissa les yeux
Ca avait l'air grand
Très grand.
C'était entouré d'autres créatures, virevoltant tout autour
Elle entrouvrit la bouche, comprenant enfin ce qui se trouvait, au loin, perdu dans les nuages :
« C-c'est une ville ? Une ville volante ? »
« Ca, Anna, c'est Fantasmagoria. Bienvenue à la capitale de la Mer de Nuages. »
VOUS LISEZ
Chroniques de Fantasmagoria - Livre 1
FantasíaAnna partie I - II - III : Anna se réveille sur le pont d'un navire, ne se rappelant pas d'où elle vient, ni même de qui elle est. En voulant s'approcher du bastingage pour voir la mer, elle se rend compte que ce navire possède des ailes. Ou plutôt...