Enfin arriva le premier jour des vacances d'hiver salvatrices, tant attendues par les étudiants qui y voyaient là une chance d'enfin pouvoir se reposer un peu. Par endroits, les rues étaient recouvertes d'une fine couche de glace. Les toits des maisons et des immeubles étaient d'un blanc immaculé. Le vent s'alliant au froid et à l'humidité semblaient s'être fixés pour but de figer toute la région ; rougissant les nez, les oreilles des étudiants, blanchissant les branches d'arbre et les fils des pylônes électrique.
Le ciel grisâtre menaçait de répandre sur la ville une nouvelle couche de blancheur sur la neige de la semaine passée qui était déjà brunit par les pas des passants. Les habitants, lorsqu'ils étaient forcés de quitter la chaleur réconfortante de leurs kotatsu, se réfugiaient sous de grosses couches de vêtements. Malgré ce temps qui incitait à la léthargie et à l'indolence, Naomi avait réussi à décrocher deux autres entretiens, dans deux entreprises du même quartiers qui se situaient tout près de l'entrée de l'enceinte de la faculté.
Forte de ses premières expériences en compagnie d'Akito, elle s'y rendit seule. Même si le professeur ne voyait pas ça d'un très bon oeil. Il s'était néanmoins résigné à la déposer dans la rue de ses entretiens et à l'attendre bien sagement, au chaud dans un bar qui se trouvait non loin. A son grand regret ce n'était pas celui que tenait Pedro.
La première entrevue avait lieu dans une maison d'édition de magazines de mode. La personne qui lui fit passer l'entretien était la directrice elle même. C'était une vieille femme aigrie, squelettique et sentant le tabac froid, qui trouva instantanément que l'attitude réservée de la jeune fille ne conviendrait pas à la vente de magazines. A peine Naomi avait elle franchit la porte que l'ancêtre se leva pour l'examiner sans même prononcer un mot.
- Bonjour... commença la blonde, intimidée par la prestance de l'envol de la patronne.
Mais le vieux vautour décharné lui coupa la parole d'un signe de main et se mit à tourner autour d'une Naomi aux joues et au nez rouge, encore emmitouflée dans son écharpe, son manteau et son bonnet. L'examinant sous tous les angles, on aurait dit qu'elle s'apprêtait à acheter un animal de compagnie. La vieille retourna s'installer derrière son bureau pour y allumer une cigarette sur laquelle elle posa ses lèvres ridées, avant de tirer une grande latte. Elle regarda Naomi, plissant ses pattes d'oie, le regard aussi glacé que le sol hivernal et lui souffla sa fumée en plein visage d'un air dédaigneux.
- Comment pourrais-tu vendre des magazines ? Tu ne saurais même à pas te vendre toi-même. Certes tu as un jolie minoi mais la beauté ne fait pas tout ma petite, ricana la vieille de sa voix rauque. Tu n'es qu'une proie, ici on à besoin de prédateur. Suivante !
Naomi ressortit de l'immeuble le moral dans les chaussettes après cet échange court mais éprouvant.
- Je ... Je suis une proie...? murmura-elle dans son écharpe. Elle sortit de son sac le journal sur lequel elle avait entouré plusieurs petites annonces et barra l'annonce de la vieille femme en soupirant.
Soudain, elle se sentit observée. Elle vit un bout de tissu noir disparaitre au coin de l'immeuble, elle s'avança donc pour découvrir de quoi il sagissait. C'est alors qu'un homme d'âge mûr l'a bouscula. Naomi, glissa sur le sol gelé et se retrouva par terre, ses affaires ornant le trottoir. L'inconnu s'excusa, l'aida à se relever et ramassa ses effets pour elle. Il regarda le journal puis Naomi, puis à nouveau le journal et Naomi une nouvelle fois.
- Vous cherchez du travail ?
- Euh oui....
- Quelle coïncidence, je cherchais justement une jolie jeune fille pour faire des photos. Voyez ? Je suis photographe, dit l'homme en lui montrant son appareil. Voulez vous me servir de modèle ? Ca ne prendra pas longtemps et je suis prêt à vous payer grassement.
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Eigo no Sensei - Tome 1
RomansaElle recula. Les yeux rivés sur le sol, elle se laissa glisser contre le mur derrière elle. Seul un faible rayon de lune éclairait la ruelle déserte, tandis que le vacarme de la ville grondait, imperturbable. Elle avait le teint pâle d'un fantôme. Q...