SUBMERGENCY

Evrik - Prisonnier

Trois contre un. Tous sur moi. Dès le réveil. C'est aussi agréable que de se faire émasculer.

C'est quoi ton plat préféré ? Les sermons, hein ? Allez, avoue, on sait que t'aimes ça, les sermons! Quoi ? Non ? Rien à cirer, t'en avaleras quand même. Tu ne boufferas que ça, à longueur de journée, jusqu'à la crise de foie. Car nous, ce qu'on aime, c'est te torturer. On te fera dégueuler avant de t'en remettre double dose avec pour dessert, la spécialité du chef : maternage confit sur son lit de harcèlement de questions aux fines herbes.

« Tout va bien, Evy ? » Non.

« Comment tu te sens, là? » Incomplet.

« Et ton cœur ? » Il pisse le sang.

« Je t'ai manqué, au moins, sweety ? » Je déteste ce surnom.

« Tu as mal quand tu respires ? » Je respirerai mieux quand t'arrêteras de me pomper l'air.

« Aleka ? C'est qui, cette fille? » Tout, sauf toi.

« Qu'est-ce que je peux faire pour toi ? » Ramène-la moi...Ou plante tes faux ongles dans ta trachée.

« Laisse-moi faire, Jezz, moi je vais lui faire du bien. » Arrêtez ça...Bordel, ma cervelle va éclater.

Tic, tac, tic, tac.

Dieu que le temps est long.

Mon escapade de la veille a fini par laisser ses traces et mon corps paye cher le tribut de mon esprit incoercible. Si je n'avais pas les membres aussi ankylosés que ceux d'un moribond, j'aurais sauté de mon pieu et viré ces succubes d'un bon coup de pied au cul. Dans ma situation, le mutisme absolu est le seul doigt d'honneur que je peux leur adresser. Je sais que ça les rend dingue quand je fais ça. Ils se mettent à dérailler complet, comme des puces sous ecsta.

Où j'étais ? Avec qui ? Ils le savent très bien. Le regard inquisiteur de Jezabel braqué sur moi non-stop réclame des détails. Elle n'aura rien. Ça, ça m'appartient. C'est ma zone de sécurité. Aleka n'est pas à eux... Mais, est-ce qu'elle est à moi ?

Elle ne sera jamais à toi.

Tic, tac, tic, tac.

Hier soir, je me sentais en vie. Vous le savez, ça ? Non, évidemment. Si vous aviez une idée de ce que ça m'a fait, du bonheur que j'ai ressenti, vous ne seriez pas là en train de m'achever à coups de regards faussement compatissants. Oui, c'est ça, pauvre Evrik... Où vont s'envoler toutes nos tunes si personne ne peut le remplacer ? Qui va se charger de faire mouiller la culotte de nos chères bouches à fric ? Eux sont incapables de comprendre ce qu'est la compassion. La pure, la vraie. Ils sont incapables de me comprendre. En fait, ils s'en tartinent le dos.

Tic, tac, tic...

Elle est jolie, cette horloge. Très belle réalisation de mes ancêtres, en bois de hêtre. Attends...Y a pas une aiguille qui déconne ? J'ai que ça à faire, d'en inspecter les détails. Mis à part leurs faces niaises, c'est tout ce que je peux mater, cloué à ce lit. Ils m'ont forcé a rester allongé.

Je m'ennuie. Mon front est enflé. J'ai la migraine. La chaleur vulnéraire d'Aleka me manque. Elle me manque ?

Anders et Andy sont remontés à l'étage, mais Jezabel ne me lâche pas d'une semelle. Elle veut punir mon indiscipline. Ses doigts glissent dans mes cheveux, puis sur mon visage, puis sur mon corps. Je comprends ce que ça veut dire. Elle se rapproche, se mord les lèvres. Sa main s'est introduite sous mon t-shirt. Elle serpente le long de mes abdominaux et effleure ma braguette. Un courant transperce mes reins. Non...C'est pas le moment ! Couché ! Sale bête. Sale traître...Pourquoi il m'écoute jamais ? Comment éteindre ce feu ? Ce n'est pas elle, mon étincelle. Ce n'est pas elle que mon caleçon réclame.

Je grimace, elle ignore. Elle croit que je n'attends que ça. Me voir affaibli l'excite. Qui est l'amuse bouche de la tigresse, aujourd'hui? C'est toi, mon con ! Savoure... Même si ce n'est plus ce que tu désires.

Aleka...

« Et bien, vas-y, dis que je suis coincée ! ». Oui tu l'es...Mais c'est ce que j'aime chez toi, tu ne vois pas ? Je suis comme un toutou à tes pieds. Tu pourrais me demander tout ce que tu veux, je le ferais sans hésiter. Comme un fanatique, comme un adorateur. Tu décides, j'exécute.

Destin, délivrance...

Viens, je t'en prie...