La clé.

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A l'étroit dans ce petit débarras, Eitan et Maïnda sont très proches, plus proches qu'ils ne l'ont jamais été, coincé entre Pablo et Kalinda devant et derrière et Szymon, qui avec sa fine silhouette se fraie un chemin, ouvre la porte et s'extirpe joyeusement de cet amas de frères et sœurs. La voie est libre. Ils vident ce débarras l'un après l'autre, à la file indienne, avec le plus de discrétion possible. Après tout c'est peu courant de voir un groupe de cinq personne arriver de nulle part. 

Gregory est dans le bureau voisin en présence de Rose et Odaline sa petite fille. C'est cette dernière qui a vu l'annonce que Eitan avait publié quelques jours plus tôt. Elle lui raconte les raisons pour lesquelles elles sont venues ici et toutes les choses étranges qui ont lieux cette dernière semaine.

- Ha Eitan tu es là, je te présente, Rose Presnicz et sa petite fille Odaline... comment déjà? dit Gregory en désignant les deux élégantes femmes d'un geste de la main.

- Bonjour, monsieur, appelez moi Odaline c'est très bien comme ça, répond la jeune femme.

- Bonjour mesdames, bienvenue, je suis heureux de vous voir, j'ai été très surpris de voir votre grand-mère dans nos locaux, pouvez-vous m'en dire plus? réclame Eitan impatient.

- Je vous présente Maïnda, ma collaboratrice, Pablo, Szymon et Kalinda des enquêteurs indépendants, intéressés par votre témoignage, ajoute-t-il.

- Ma grand-mère Rose est décédée il y a trois jours maintenant, dans son sommeil. Nous avons donc fait les démarches nécessaires et le corbillard l'a emmenée à la morgue dans les heures qui ont suivi. Notre tristesse n'a pas duré très longtemps quand le médecin légiste nous a appelé pour nous faire part d'un phénomène extra-ordinaire. Ma grand-mère s'était réveillée. C'est vous dire qu'il a eut la peur de sa vie ce pauvre monsieur. Oui elle est bien là, vivante, les médecins sont incapables de l'expliquer. Scientifiquement, quelqu'un mort depuis plusieurs heures, ne peut pas se relever de la sorte et être en parfaite santé? Nous sommes bien d'accord? Pourtant, elle est dans le bureau avec nous aujourd'hui, comme vous pouvez le constater, relate Odaline en tendant l'acte de décès ainsi que les résultats d'analyses en direction de Maïnda.

Eitan jette un œil sur les documents et est forcé de constaté que la vieille dame est bien là assise dans le bureau de son ami et collègue. 
Maïnda observe la dame, en imprime chaque détail physique, les mains, la chevelure et surtout la gestuelle et le regard. L'investigatrice remarque une similitude avec sa grand-mère. Le regard! Les yeux de Rose sont verts tachetés de doré. Elle reconnaît la griffe familiale. Il s'agit de Zaoï. Mais Maïnda ne peut rien dire du tout, pas devant Gregory, ni devant les deux femmes. 

- Depuis qu'elle est de retour parmi nous, nous avons relevés des faits étranges, poursuit-elle en cherchant un bout de papier légèrement froissé dans le fond de sa poche. J'ai noté la liste de tous les événements bizarres qui se sont produits. Tout d'abord, le soir même, toutes les horloges de la maison se sont arrêtées, toutes, sans exception, y compris la montre que je porte à mon poignet. Le deuxième jour, l'eau se mettait à couler de partout, le long des murs, débordant des canalisations, le plombier n'avait jamais vu ça non plus. Ensuite il y a eut les appareils électriques qui s'allumaient sans raison.

Maïnda laisse un rire s'échapper, elle ne se moque pas non, elle reconnaît juste le caractère taquin de sa grand-mère, qui a pour passion de rendre les gens chèvre lorsqu'elle s'ennuie.

- Poursuivez, ne faites pas attention à elle, suggère Eitan tenu en haleine.

- Et puis je l'ai vu, disparaître. Nous prenions le thé, avec des petits biscuits secs, nous discutions tranquillement quand tout d'un coup, elle disparue. Elle s'est volatilisée, je n'ai pas d'autres mots. Pouf, comme ça, en un claquement de doigts. Elle était là devant moi et la seconde d'après elle ne l'était plus. J'ai bien cru à une hallucination ou je ne sais pas, que je faisais une crise d'épilepsie... Enfin je ne sais pas ce qu'il s'est passé, quoi qu'il en soit, deux heures plus tard, elle était à nouveau là installée à la place qu'elle avait quitté subitement.

Maïnda n'a plus aucun doute, sans comprendre comme cela est possible, l'esprit de sa grand-mère à pris possession du corps de madame Rose. 

- Madame Presnicz, puis-je vous parler une minute, dans le bureau d'à côté, je souhaiterai vous poser quelques questions s'il vous plait, vous permettez, demande gentiment Maïnda en prenant le bras de la vieille dame, qui se lève volontiers.

Les deux femmes s'éloignent du groupe pour pouvoir parler tranquillement à l'abri des oreilles indiscrètes.

- Zaoï? murmure Maïnda en regardant la femme dans les yeux?

- Oui, répond-elle en rigolant.

Maïnda prend cette femme qu'elle ne connaissait pas, avec la tendresse d'une petite fille envers sa grand-mère, rien de choquant au regard des autres qui pourraient les surprendre.

- Ma petite fille, tu dois retourner au puits, et que tu utilises la clé. Je n'ai pas beaucoup de temps, le corps de cette vieille dame est très très fatigué. Il ne me reste que quelques heures sous cette forme avant de disparaître à nouveau, explique Zaoï avec la voix de Rose, qui rend confuse Maïnda.

- Je ne sais pas de quelle clé tu parles mamita, j'ai bien compris que je devais utiliser la clé, mais laquelle? insiste la jeune femme.

- La clé du coeur mon amour, la clé du cœur, susurre Zaoï de toutes ses forces.

- Je ne comprends pas de quelle clé il s'agit, je t'en prie j'ai besoin d'en savoir plus s'il te plait, demande encore Maïnda à la grand-mère affaiblie.

Déçue de ne pas avoir plus d'éléments, elle choisit de raccompagner la vieille dame avec le groupe. Eitan peut lire dans le regard de sa collègue, une certaine forme de colère.
Il raccompagne les deux femmes vers la sortie, Maïnda et ses frères prennent chacun leur tour la dame dans leurs bras, l'embrassent, lui disent au revoir une dernière fois et la laissent partir. Tous se réunissent à nouveau pour faire un débriefing. Maïnda demande à quel point Eitan fait confiance à Gregory, sachant que ce qu'elle a à dire à propos de cette femme est un peu, hors norme. Bien sûr, Eitan et Gregory se connaissent depuis leur plus tendre enfance, ils sont comme des frères depuis le temps. Eitan est même le parrain du fils de son ami. Ils ont fait leurs études ensemble où ils ont fait les quatre cents coups. Leur loyauté n'est, pour ainsi dire, plus à prouver. 

Maïnda relate ce qu'elle a pu tirer de cette entrevue. L'âme de sa grand-mère s'est emparée du corps de Rose, afin de venir jusqu'à elle pour lui remettre un message. Peut-être que ses frères et sa sœur pourront l'aider à déchiffrer ce qu'elle a entendu? 

Gregory n'est pas surpris d'apprendre la nouvelle, il en a vu d'autres étant spécialiste de faits paranormaux, pour lui c'est presque la routine, avec Eitan, il était servit. Il est même plutôt satisfait que pour une fois ça se produit, dans des circonstances inhabituelles pour lui.

- Nous devons trouver cette clé, la clé qui ouvrira le puits et qui libérera les hommes, s'exclame Maïnda.

- De quelle clé tu parles? demande Kalinda.

- Zaoï m'a parlé d'une clé, qu'il fallait que je trouve et que je retourne au puits, pour libérer les hommes. Enfin elle ne m'a pas précisé pourquoi il me fallait cette clé, mais j'en déduis que c'est pour cette raison là non? Qu'en penses-tu?

- Souviens toi Maïnda, nous avons déjà eut cette conversation, la clé, c'est l'amour, c'est le remède à tous les maux. Nous l'avons appris lors de notre voyage intrinsèque, rétorque Szymon en prenant un air de professeur d'école.

- OK, je suis d'accord, mais l'amour, ça veut dire quoi là, nous avons de l'amour entre nous, envers notre famille. De quel amour parle-t-elle? s'offusque Maïnda.

- Je ne sais pas du tout, répond timidement Kalinda.

- Si nous allions grignoter un bout? s'écrie Pablo. J'ai vraiment la dalle, ça m'a creusé tout ce voyage, et puis c'est clair, on y voit mieux l'estomac plein, ajoute-t-il.

Ils décident de laisser leur réflexion à plus tard, et sortent tous manger un petit sandwich dans un camion fast-food au bout de la rue. 

Les oubliés de Missunder [CORRECTION/REECRITURE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant