Je suis née dans l'ombre et j'y ai assez vécu pour pouvoir dire que je deviens petit à petit une ombre à mon tour. C'est comme un long tunnel dans lequel on marche à l'aveugle, un tunnel qui n'a pas de fin. Mais j'ai fini par apercevoir une lumière...
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08.10.19, 8:47, banlieue de Rio de Janeiro.
Tac.Tac.Tac. Un marteau piqueur qui frappait de manière régulière dans mon crâne sans s'interrompre et sans jamais modifier la force de la douleur. Intense et identique à chaque fois. J'étais fatiguée et je peinai à ouvrir les yeux, mes paupières semblaient très lourdes, comme le reste de mon corps. Je dus bien cligner des yeux plusieurs fois, lentement, pour voir nettement le plafond au-dessus de moi. J'aurais pu dire qu'il était blanc, et il l'avait sans doute était par le passé, mais là il était plutôt gris et vraiment très sale. Dans la pièce où je me trouvais, il y avait peu de lumière et tout semblait d'un calme olympien. Je n'étais pas au paradis et il ne me semblait pas que les enfers ressemblaient à ça. J'étais vivante.
En dépit de mon mal de tête, je voulus me redresser pour mieux comprendre où j'étais et où étaient les autres mais je fus bloquée avec la sensation d'avoir un poids m'oppressant la poitrine. Ce qui était en effet le cas, et ça m'avait tellement fait sourire que j'aurais pu en perdre la mâchoire. Sa chaise était parallèle au lit, je pense qu'il avait voulu veiller sur moi mais il s'était endormi et sa tête reposait à présent sur mon ventre tandis que ma main était toujours emprisonnée dans la sienne. J'avais rarement vu son visage aussi détendu, ses traits n'étaient pas tirés par la colère, la peur, ou la tristesse. Il semblait serein. Ses mèches blondes retombaient en désordre sur son visage, couvrant une bonne partie de son front. Il était sublime.
Il était resté là alors qu'on était encore en train de se disputer avant que je n'arrive ici. C'est à cet instant que je réalisai que je pouvais le haïr autant que je voulais, il serait toujours là. Et inversement. Je lui avais fait plus de mal que n'importe qui mais il était quand même ici. Cette révélation me faisait culpabiliser encore plus, je m'en voulais tellement de l'avoir fait souffrir. C'était inexplicable. Je lui avais fait mal, encore et encore, alors que je l'aimai profondément.
Lentement je retirai ma main de la sienne, puis je dégageai ses cheveux de son visage et je commençai à jouer avec, comme j'avais l'habitude de le faire avant lorsque je devais le réveiller. Je le sentis émerger tout doucement au bout de quelques minutes alors je retirai ma main et je restai en appuie sur mes coudes pour pouvoir l'observer. Il frotta son visage avec ses mains et bailla comme un enfant de deux ans puis il réalisa enfin que j'étais réveillée. Un éclair d'inquiétude traversa ses pupilles.
- Comment tu te sens ? me demanda-t-il en observant méticuleusement chaque parcelle de mon visage.
- Un peu mal à la tête mais ça devrait passer, répondis-je en souriant légèrement.
- Je vais chercher Jina, répliqua-t-il instantanément en se levant de sa chaise en trombe.
- Non. Reste trente secondes s'il-te-plait.
Il se rassit aussitôt, perplexe, et me regarda attentivement, de ce regard profond et sérieux qu'il utilisait toujours pour tenter de lire en moi, ce qu'il réussissait à faire les trois quarts du temps.
