Chapitre 17: En planque

15 4 0
                                    

Encore perdue par son rêve plus que traumatisant, Jessie suivit l'homme qui le tirait avec force par la main. Derrière elle, le bruit du tonnerre se faisait entendre, alors que le binôme tentait de discrètement s'enfoncer dans l'épaisse forêt.

- Que ce passe-t-il? demanda la jeune fille affolée.

Au lieu de lui répondre, John plaqua un doigt sur sa bouche, lui imposant le silence. Par un signe de sa main libre, il lui fit comprendre que dès qu'ils seront à l'abri, il lui expliquerait le problème. Son autre était toujours solidement pincée sur le bras de Jessie.

Lentement pour ne pas faire trop de bruit, ils progressaient dans les hautes herbes et entre les rochers moussus. Leur avancement continua ainsi un bon quart d'heure, jusqu'à ce que l'adolescente ne parvienne plus à distinguer de quelle direction ils venaient. La lune qui les éclairait depuis tout ce temps ne parvenait déjà presque plus à pénétrer les hautes branches, et plus d'une fois, Jessie se serait étalée de tout son long sur le sol meuble, si son partenaire ne l'avait pas fermement soulevé d'un coup de bras puissant.

Les gouttes qui glissaient des feuilles au dessus de leur tête eurent vite fait de les tremper jusqu'aux os, et Jessie regretta ne pas porter d'habit plus chaud que son pull. Et dire que d'habitude quand il pleuvait, elle se contentait d'observer le déluge depuis sa fenêtre, bien assise à son bureau. Maintenant, elle était pathétique à voir, les cheveux collés sur son front et sa nuque par l'eau glaciale. Seul le contact de John la réchauffait un peu. Au moins elle n'était plus seule.

Ses chaussures ne tardèrent pas à succomber elles aussi à l'élément naturel. Grande fut sa surprise lorsqu'elle réalisa que le poids supplémentaire au niveau de son pied qu'elle pensait être dû la fatigue était en fait une masse d'eau qui s'était agglutinée au fond de ses souliers. Elle lança une de ses jambes en avant, et une partie s'en échappa pour s'écraser au sol.

Pour tenter d'oublier sa situation actuelle, Jessie se força à penser à quelque chose d'autre. Malheureusement, les seuls sujets qui lui venaient à l'esprit étaient des scénarios pouvant expliquer pourquoi les soldats les avaient retrouvés. En effet, ils n'avaient croisés personne sur le chemin. Bien que des caméras avaient sûrement enregistré leur fuite depuis le secteur, personne visionnant ces images n'aurait pu deviner dans quelle direction ils s'en iraient ensuite. Enfin, aucune caméra ne se situait dans les zones presque vides entres les différents secteurs, puisque cela représentait une surface bien trop vaste à couvrir. Énervée à l'idée de ne pas savoir ce qui les avait trahi, elle arrêta sa réflexion bien vite.

Quelques minutes plus tard, Jessie cru ne pouvoir résister à l'envie d'hurler de joie, lorsque John pointa un doigt vers une cavité située dans un pan d'une sorte de gros rocher. Les deux fugitifs s'y engouffrèrent rapidement, bien qu'elle se trouva être très étroite. Alors que la jeune fille allait commencer son exploration vers le fond de la grotte, elle vit que son compagnon s'était arrêté. En effet, celui-ci avait fait volte-face et s'était mis à ramasser des cailloux de moyenne et grosse tailles situés en bas des parois de la caverne. Il avait commencé à s'agiter ainsi pendant quelques petites minutes, mais Jessie étant dans son dos, elle ne pouvait voir ce qu'il faisait. Elle s'apprêtait à le lui demander lorsque celui-ci se tourna vers elle pour lui montrer ce qu'il avait fait. A l'aide des cailloux, il avait diminué la taille de l'ouverture de la cavité, de sorte qu'à l'extérieur, il aurait fallu avoir un œil aguerri pour distinguer la mince fente qui ne laissait passer qu'une toute petite brise à l'intérieur. L'adolescente trouva l'idée brillante.

John, fatigué par son effort, s'assit en tailleur sur le sol froid et humide de la grotte. D'un coup de bras, il intima à Jessie de faire la même chose. Celle-ci s'assit en face de lui, et les deux restèrent silencieux un bon bout de temps. Au bout d'un moment cependant, ils entendirent au loin des bruits de pas, et des hommes qui se criaient des ordres les uns aux autres.

La jeune fille s'affola d'un coup, imaginant que les soldats pourraient les retrouver d'un instant à l'autre. Coincés dans cette grotte, ils ne possédaient aucune autre issue que celle qui se présentait à leur yeux. Elle commença à s'agiter sous le coup de la panique, incapable de rester en place. Très vite, John lui envoya un regard sévère et Jessie s'immobilisa sous ses yeux qui semblaient calmes. Son corps resta à l'arrêt, mais à l'intérieur, son cœur battait aussi vite que si elle se trouvait en pleine course. Son sang circulait dans ses veines à une vitesse beaucoup trop importante.

John prit conscience que malgré l'aspect calme de son corps, Jessie était toujours secouée. C'est alors qu'il se déplaça vers elle, sans prendre la peine de se lever, et vint se caler tout près d'elle. Il lança son bras derrière le cou de la jeune fille effrayée, et plaça sa main sur son épaule dans un geste protecteur. Très rapidement, les tremblements de Jessie se calmèrent, car la présence de son compagnon à son côté la réchauffait et la rassurait.

Lorsque les pas se rapprochèrent de plus en place, Jessie ne bougea pas, car elle était confiante en la couverture que son ami avait donné à leur caverne. Mais à un moment, les pas se stoppèrent; mais seulement à un mètre de leur entrée. Depuis leur emplacement, les deux fuyards purent admirer les chaussures des hommes qui stationnaient. Evidemment, ils n'avaient pas encore remarqué la cavité, rendue presque impossible à discerner grâce au travail de John.

Les hommes reprenaient apparemment leur souffle, bruyamment. Jessie plaqua sa main devant sa bouche, pour être sûre de ne pas émettre un seul son qui aurait pu trahir leur cachette.

        - Où penses-tu qu'ils soient allés? Demanda l'un d'eux.

        - Attend, nous ne sommes même pas sûrs qu'ils soient venus dans cette forêt. C'est juste que c'est le seul endroit où ils auraient pu se camoufler à des kilomètres à la ronde, répondit celui que Jessie supposa être le chef.

        - Pourquoi on s'embête alors? Je ne compte pas les chercher indéfiniment dans cette forêt sous la pluie pour rien. Surtout que j'ai cru entendre des bruits étranges tout à l'heure.

Un troisième homme intervint.

        - Il suffit de seulement trouver un indice de leur présence ici et on pourra se débrouiller pour boucler le périmètre, dit-il d'une voix grave. En attendant, déployer de tels moyens sans être sûrs qu'ils soient réellement là est inutile.

L'instant d'après, un bruit de talkie-walkie se fit entendre.

        - Commandant Lewis, dois-je donner l'ordre au sergent de lancer l'opération siège?

Sans prendre la peine de répondre au message, le dénommé Lewis demanda à ses collègues.

        - Qu'en pensez-vous?

        - Je n'en sais trop rien, déclara celui qui avait une voix grave. Mais j'imagine que prendre le risque vaudra peut-être la peine si on les attrape. Après ça, nous sommes sûrs de recevoir notre promotion.

A côté d'elle, Jessie sentit John remuer.

        - Tu n'as qu'à dire à tes hommes de lancer l'opération, nous n'avons rien à per...

La fin de sa phrase fut coupée, alors qu'il bascula en arrière, après qu'un bras musclé sortit de nul part l'ait attrapé violemment au mollet. Son corps fit un bruit sourd en tombant sur le sol. Il disparut l'instant d'après dans une cavité étroite, hurlant de peur et de surprise, alors que ces deux compagnons n'avaient rien vu venir, et regardaient l'intérieur du sombre trou, incapables d'y voir ne serait-ce que deux mètres devant eux...

On ne cherche pas le bonheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant