Ni une ni deux, Jessie s'empara du gilet sur lequel une flamme trônait fièrement. Avec plus de délicatesse que Jessie ne l'aurait cru nécessaire, elle achemina la lumière mouvante jusqu'à son lit. Elle la colla aux brindilles qui le composaient, et en moins de temps qu'il n'en faut, le tout était en feu. Absorbée par le spectacle, la jeune fille ne bougeait plus, ne respirait plus. C'est seulement lorsqu'un bruit assourdissant empli l'espace qu'elle reprit le contrôle de son esprit et de son corps: l'alarme résonnait dans tout le sous-sol, affolante et continue.
Étourdie l'espace d'un court instant, elle se plaqua contre le mur opposé au lit, dans lequel était encastré la porte. Jessie savait parfaitement quel devrait être son prochain mouvement. Mais un problème se posa a elle, la paille brûlée avait produit une quantité considérable de fumée, ce que l'adolescente n'avait pas prévu. Alors elle toussa, de manière incontrôlée et terrible. Aveuglée par ce nuage gris et acide, elle se sentit perdue. Jessie se croyait presque en train de cracher ses poumons tant sa gorge brûlait, comme si plus jamais elle ne pourrait respirer. Les deux choses auxquelles Jessie pensait à cet instant désastreux étaient une bonne bouffée d'air frais et pur, ainsi qu'une douce gorgée d'eau claire. Ses yeux, ses narines, ses poumons; tout lui piquait de la manière la plus désagréable qu'il soit. Mais plus elle toussait, plus sa bouche s'emplissait de fumée lorsqu'elle voulait remplir sa trachée d'oxygène. Son instinct lui souffla de se coucher, ce qu'elle fit les paupières closes. Elle sentait toujours le mur au contact de sa main. Les secours ne devaient pas tarder à arriver.
Jessie n'avait qu'une envie; quitter cet endroit. Mais elle ne pouvait se laisser envahir par l'inconscience, sinon elle serait sortie d'ici de force sans avoir la chance de s'enfuir d'elle-même. Sa toux se calma au moment exact où la porte de la cellule s'ouvrit. La jeune fille ouvrit les yeux et vit trois hommes pénétrer la zone. Tous portaient une sorte de combinaison noire. Deux d'entre eux tenaient ensembles un extincteur rouge, et le dernier, le plus mince, tenait des clés dans la main. Sans prendre le temps de regarder l'opération, Jessie passa la porte, toujours à quatre pattes. Ses yeux tombèrent naturellement sur des sacs à dos proches de l'entrée, appartenant sûrement aux hommes actuellement dans la pièce enfumée. Ses doigts se dirigèrent d'eux-mêmes vers la fermeture du plus proche. Elle y trouva un dossier, un pull, une lampe de poche et d'autres objets sans importance. Sans perdre plus de temps, elle fouilla le deuxième sac, sans plus de succès. Une fois arrivée au dernier, quelques dizaines de seconde plus tard, elle commença son ultime recherche. Près d'elle, les hommes communiquaient en criant, pour dominer le son de l'alarme. Jessie pressa sa manœuvre; si jamais elle ne trouvait pas ces maudites clés, elle ne pourrait pas remonter, et serait toujours bloquée au niveau inférieur.
Par chance, le troisième sac fut le bon. Jessie se releva, et tourna la tête vers l'alarme qui sonnait toujours. Elle ne devait plus perdre de temps autrement les agents sortiraient de la cellule avant qu'elle puisse s'enfuir. Maintenant qu'elle y pensait, quelque chose la gênait. Si les gardes sortaient en effet dans les secondes suivantes, et qu'ils remontaient à la surface, ils préviendraient forcément le sergent que la cellule était vide à leur arrivée - ou plutôt à leur départ -. L'un deux avait des clés sur lui, elle l'avait bien vu. Pourtant Jessie ne pouvait les laisser sortir et annoncer ce qu'il s'était passé. Elle se colla au mur extérieur et pencha légèrement la tête sur le côté pour épier les mouvements des trois hommes. La pièce était redevenue sombre maintenant que le plus gros du feu avait été éteint. Pas plus de deux minutes avaient dû s'écouler depuis leur venue. Le plus grand tenait fermement l'extincteur d'une main et le tuyau de l'autre. Le plus épais des trois tapait de sa botte les brindilles brûlées à ses pieds pour s'assurer qu'elles étaient belles et bien éteintes. Enfin, le plus mince, celui qui intéressait Jessie, était derrière à regarder le spectacle. Si la jeune fille avait pu voir son visage à cet instant, elle n'y aurait vu que de la stupéfaction.
Au niveau de son bassin se trouvait le bout d'une clé dépassant de la grosse poche intégrée à la combinaison. L'homme dans la précipitation ne l'avait pas rangée correctement, ce qui ne déplut pas à l'adolescente qui y vit enfin un signe de chance. Elle s'approcha rapidement sans prendre de précautions quand au bruit qu'elle faisait puisque le fond sonore ne s'était toujours pas arrêté. Elle avança la main vers les clés; la seconde qu'il fallut au maigre homme pour réagir fut largement assez longue pour Jessie qui repartait déjà dans le sens inverse.
Une fois la lourde porte claquée et verrouillée, Jessie put reprendre correctement son souffle. Devant la cellule, elle entendait distinctement deux pairs de poings tambouriner sur le matériau métallique. Un peu peinée à l'idée de piéger ceux qui étaient venus à son secours, Jessie rangea un des trousseaux de clés qu'elle tenait encore dans sa main dans le premier sac; elle allait le prendre avec elle au cas où elle devait transporter quelques affaires plus tard. Mais avant de le refermer, elle s'empara du pull couleur crème. Rien de mieux pour cacher son t-shirt excessivement voyant. Le tout était trop grand pour elle mais Jessie n'avait rien de mieux pour le moment.
C'est sans un regard en arrière que Jessie pris la direction de l'ascenseur, la clé magnétique serrée triomphalement entre ses doigts tremblants.
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On ne cherche pas le bonheur
Fiksi IlmiahQuand on vit dans un monde où il est interdit d'être heureux, il faut savoir déroger aux règles. C'est en tout cas ce que va faire Jessie, une fois qu'elle commence à entrevoir ce que devrait être sa vie, au travers des yeux de Thomas, un inconnu qu...