Je suis toujours considérée comme la bonne copine, sympa, compréhensible, a qui on peut faire confiance. Je ne suis jamais la fille qu'on remarque en premier, toujours tapie dans l'ombre de ma meilleure amie. Je n'ai jamais connu l'amour, je n'ai jamais eu de petit ami, enfin je n'en ai jamais voulu. J'ai 18 ans. Je m'appelle Lou Stevens, je suis une fille banale, pas moche, pas belle, pas grosse, pas grande, pas petite. Je ne vis plus chez mes parents, j'ai décidé de voler de mes propres ailes. Je suis étudiante, je loge un des studios du campus avec Ella Turegio, ma meilleure amie depuis toujours. C'est elle, le canon que tout les mecs désirent, c'est elle avec qui on garde contact, c'est elle qui est belle, grande, c'est elle qui aime, c'est elle qui est aimée en retour.
Notre vie est simple, colorée ou sombre, selon les jours. Les cours s'enchaînent, les secondes, les minutes, les heures, les jours aussi. Le soleil Australien est souvent au rendez-vous, hiver comme été. Lorsqu'il fait mauvais, les gens sont comme le temps: tristes et gris. Les enfants s'amusent à sauter dans les flaques, ces êtres innocents qui ne savent pas de quoi demain sera fait. A cette âge là, on pense que l'avenir est tout tracé, que l'on va devenir chanteur ou acteur, que l'on sera riches et célèbres, que le prince charmant arrivera comme une fleur, et que nos enfants seront beaux et intelligents. On s'imagine une vie de rêve. La naïveté disparaît aussi vite qu'elle est apparue au fil du temps.
-Lou? T'écris quoi là?
-Oh rien, un truc qui me passait par la tête.
-Bon... Juste, il faut qu'on se bouge un peu là.
-Pourquoi?
-Y a la soirée de Léo.
-J'ai pas très envie d'y aller.
-Lou...
-J'ai pas envie d'y aller. Je connais personne. Et ouis de toute façon, j'ai du boulot.
La main d'Ella vient doucement frotter mon épaule et son visage affiche un sourire désolé.
-Ecoute Lou, fais ce que tu veux, mais ce soir tu connaîtras des gens, et puis ça te feras pas de mal de sortir un peu.
-C'est bon je vais venir. Laisse moi me préparer.
Des cours encore et encore, du boulot à n'en plus finir. Voilà en quoi consistent mes jours. Je suis étudiante en lettres, et pourtant à ce qu'on peut croire, il y a vraiment beaucoup de travail. Je suis en train de peiner pour finir ma dissertation, tandis qu'Ella met la musique à fond dans l'appart'. Ok, elle fais ce qu'elle veut, mais y a des moments où j'aimerais juste être un peu plus tranquille. Mais comme d'habitude je me tais, pour ne pas créer de conflits. Je finis enfin, au bout de 3 heures non stop d'écriture. Je m'appuie sur les coudes au bord de la fenêtre donnant sur la rue, et regarde les gens défiler. Un homme d'affaire marche vite, surement pressé de rentrer chez lui, une femme chauve tient son fils par la main qui essaye de s'échapper vers le magasin de bonbons, un couple d'adolescent se tiennent par la main, un couple d'homme s'embrassent fièrement, en emmerdant la foule autour d'eux. Toutes ces personnes sont qui elles sont, libres pour certaines, pour d'autres non. Un punk marche les écouteurs dans les oreilles, une jeune gothique rigole avec une fille tout à fait banale. Leurs styles tous aussi différents me passionnent, je pourrait passer des heures à les regarder. Mais la nuit tombe vite, ainsi que la fatigue. Je me laisse tomber dans mon lit, et m'endors en pensant comme à chaque fois "demain est un autre jour".
