Son journal m'absorbe. Il n'y aucun bruit, rien, le néant autour de moi. Seulement son putain de journal entre mes mains.
" Je n'ai jamais eu peur de souffrir."
"Sans toi, je suis perdu, je ne suis plus rien."
Putain mais de quoi il parle? 2 heures du matin, je dois partir dans 6 heures. Des petites gouttelettes de sang sont éclatées sur une page vierge. Ma tête me fait mal, mes doigts tremblent, mon coeur va exploser dans ma poitrine. Alors c'est vraiment lui, la personne qui ne va pas bien. C'est lui la personne que je recherche depuis des mois. La personne que je veux aider. Je le savais depuis le début, sans m'en rendre compte. Je le savais et j'ai rien fait. Depuis le jour où j'ai posé mes yeux sur lui, je savais que c'était lui. Il m'avait tendu la main, il était en train de tomber, et je ne l'ai pas rattrapé.
Je l'attend. Je suis à la boutique depuis l'ouverture. Il va venir, j'en suis sûre. Il ne peut pas vivre sans son carnet. S'il vit encore... Cette pensée me glace le sang, et j'attend toujours. En vain. Ashton n'est pas passé. Je rentre chez moi, dépitée, fatiguée.
Il ne pas vu, ou alors, il fait semblant de ne pas me voir. En attendant, sans réfléchir, je cours dans les rues de Sydney, je bouscule des passants, je m'excuse rapidement, et lui cours toujours après. J'ai l'impression de faire du sur place.
-ASHTON!
Je finis par lui attraper le bras à bout de souffle, le retourne face à moi, et lui colle une gifle.
-Mais ça va pas?!
-Attend, c'est à moi que tu demandes ça?! Tu te fous royalement de ma gueule là! Tu disparais, sans me donner de nouvelles, et tu trouves ça normal?!
Il ne répond, rien, il se contente de me regarder, impassible. Je sors son carnet de mon sac, et lui balance violemment en pleine face.
-Tu l'as trouvé où?!
-Où je travaille.
-T'as besoin d'être agressive comme ça avec moi?
-Ouais, j'ai besoin d'être comme ça avec toi. J'ai besoin de ça comme j'ai besoin de te savoir en vie!
-Pardon? Ne me dis pas que...
-Si j'ai lu ton journal? Tu crois que je me suis gênée?
Son regard. Putain je l'avais jamais vu comme ça. De la haine mélangée à... De la peur je dirais. Et, je ne sais pas ce qui vient de me passer par la tête, mais je lui tourne le dos, et rentre chez moi. J'ai mis des mois à le retrouver, et je laisse tomber d'un coup.
-Bah t'étais où?
-Ca te regarde?
Michael me regarde étonné, mais ne dit rien. Enfin je ne lui laisse pas le choix de toute façon. Je claque la porte de ma chambre, et tombe sur mon lit. Je suis toujours abasourdie par ce que je viens de faire.
5 jours ont passé. Des jours aussi simples les uns que les autres. Je crois que ce n'est pas aujourd'hui que j'aurais de la chance: il pleut, ma voiture est en panne, personne ne peux venir me chercher, je n'ai pas de parapluie, il fait nuit, mon portable n'a plus de batterie. Jusqu'au moment où j'entend une voix, trop familière à mon goût, m'interpeller.
-Lou, je peux te parler?
-Hm.
Il soupire, mais malgré l'obscurité, je le vois sourire. C'est rare.
-Je suis désolé de t'avoir fait peur, enfin d'être parti sans rien de te dire. Je me suis éloigné de toi parce que... Bah t'as du comprendre en lisant mon journal.
-Non justement j'ai pas compris.
-Je ne vois pas pourquoi tu t'intéresses à moi. Les gens me fuient, pas toi. Et je comprend pas pourquoi.
-T'es différent.
-Toi aussi.
Je hausse les épaules.
-Excuse moi s'il te plaît.
-Promet moi que tu ne disparaitra plus dans la nature, sans crier gare.
-Je vais essayer.
Il me serre dans ses bras. Pour la première fois. Et je lui rend son étreinte. Pour ne plus le laisser partir.
" Elle ne savait pas que l'enfer, c'est l'absence."
- Paul Verlaine
