Six loubards à Poudlard

Chapitre 11 - Se souvenir et souffrir

Chapitre 11

Se souvenir et souffrir

Manon

Des soleils et lunes s'étaient écoulés depuis le jour magique de Noël. Manon avait pu profiter de chaque petit flocon de neige bercé par le vent d'hiver, et à présent elle contemplait cette pluie cristalline en sachant bien que ces touffes blanches seraient probablement les dernières. Le printemps arrivait, la moitié de l'année était derrière elle, et les examens à venir devant.

Jusqu'à présent, la Poufsouffle était parvenue à faire honneur à sa maison. Sa contribution en classe était vue d'un œil admirable par les professeurs – à l'exception de l'œil fatal du professeur Diedie, bien entendu –, et bien que la maison Poufsouffle ne fût que dernière, Manon ne pouvait se résoudre à baisser les bras lâchement. Elle était devenue un modèle pour ses compagnons qui, eux, allongés sur les divans de la salle commune avec quantités de gâteaux entre les mains, et voyant Manon travailler inlassablement sur son favori pupitre, en éprouvèrent grande honte.

« Tenez, avait-elle dit, si nous participons activement au cours de Potions de cet après-midi, nous pourrons surpasser les Gryffondors ! » Elle se tourna ensuite vers Gary, préfet en sixième année et capitaine de l'équipe de Quidditch, « Gary, on compte sur toi pour le match de demain !

— Les Gryffondors vont morfler ! répondit ledit Gary. »

Lorsque le cours de Potions arriva, la tension était plus que palpable. Seules les premières années de Gryffondor et Poufsouffle étaient conviées au cours. Les froids cachots d'où se tenait le cours du professeur Cinqrats exaltaient un sentiment de rivalité ardent.

Le maître des potions à la calvitie légendaire faisait l'appel. Manon s'était installée avec d'autres élèves de sa maison. À la base, elle avait désiré se joindre à la table de Priscilla, mais les lions qui l'entouraient avaient sorti aussitôt leurs griffes. Elle ne put même pas la voir, étant de dos à elle. Seule sa voix, reconnaissable parmi les autres, lui parvenait aux esgourdes lorsque le professeur appela son nom.

« Priscilia ?

— C'est Priscilla, professeur, rectifia-t-elle.

— Haha, désolé miss, j'ai du mal à retenir les noms...

— Mais sommes à plus de la moitié de l'ann...

— BIEN ! trancha-t-il. Sortez vos chaudrons ! Nous allons commencer le cours ! »

La séance du jour consistait en la préparation d'une potion pour soigner les furoncles. Manon se mit en binôme avec Sherlinda Santoile, batteuse de l'équipe de Poufsouffle. Cette dernière se disait sans cesse promise pour une carrière professionnelle dans le Quidditch, mais Manon – comme beaucoup d'autres élèves nullement naïfs – savait que Sherlinda avait intégré l'équipe dans le seul et unique but de reluquer les garçons dans les vestiaires. Cela se confirma lorsqu'elle récita à Manon, qui prêta davantage d'attention aux crochets de serpent qu'elle devait écraser, ses diverses cibles.

« Manon, il y a un joueur qui est trop beau ! Il s'appelle Felipe ouh la la mama ! Gul est également dessus, mais ne va pas croire qu'elle va me le piquer, la naine ! Quoi ? Non, je n'ai rien contre les naines, voyons ! En plus, je suis plus jolie qu'elle ! Bref, il faut que je remue avec ma baguette, là ? »

Elle donna un coup de baguette au mélange, mais au lieu d'obtenir un doux liquide orangé, Sherlinda fut reçue par un rapide BOUM qui vint maquiller son visage d'un épais masque verdâtre. Rapidement, le teint lisse de la batteuse se vit infesté d'un véritable champ de furoncles. « Au secours !!! », criait-elle. Le professeur Cinqrats ne put s'empêcher de sourire (il se retenait visiblement de rire) et s'adressa jovialement à Manon : « Miss Bacc, accompagnez la pauvre Sherlinda à l'infirmerie... » Et, comme Manon escorta Sherlinda vers la sortie, il ajouta : « Quel dommage, j'avais misé sur Poufsouffle pour demain... »