Chapitre 13.1 - Tombent les masques

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Chapitre 13

Tombent les masques – partie un

Estelle

La voir devant eux enflamma de joie le cœur d'Estelle, jusque-là transi par la mainmise des Détraqueurs sur l'atmosphère de la salle. Sa robe d'un blanc immaculé, sans manches, lui donnait à la fois un aspect angélique, mais faisait également penser aux toges que portaient ces philosophes antiques.

« Pro... Professeur Demain ?! » Estelle peinait à trouver ses mots tant elle était abasourdie par cette révélation, tout comme ses congénères.

Le professeur acquiesça d'un gentil signe de tête tandis que l'éléphant lumineux disparut progressivement après s'être incliné devant sa maîtresse. « C'est bien moi. » Enfin, elle balaya l'infirmerie du regard, une mine inquiète se substituant à son jovial faciès.

« Où sont Manon et Gul ?

— Elles sont parties vers la salle commune des Gryffondors, apparemment pour « sauver » Priscilla, répondit Laura tout en mimant les guillemets avec ses doigts.

— Toutes deux, seules dans le château ?! Quelle horreur ! (elle pivota la moitié de son corps vers la porte de sortie ) Je suis navrée d'interrompre nos retrouvailles, mais il me faut partir.

— Quoi ?! » Estelle se tourna instinctivement vers le corps inerte du concierge, toujours étendu sur ce pauvre lit blanc. « Aidez-nous à sauver M.Halmost, je vous en supplie ! »

Alors, le professeur s'avança paisiblement vers ledit concierge et, après avoir adressé un sourire au défunt, lui ferma définitivement ses paupières.

« Il est dorénavant de l'autre côté du voile. A présent, le temps est compté pour Priscilla. Son âme, à elle, peut encore être sauvée. »

Et tandis qu'elle s'approchait de la porte de sortie, Estelle et les autres se résolurent à la suivre. Remarquant la lueur de courage dans leurs yeux, le professeur eut un sourire de satisfaction, mais reprit avec regret : « Malheureusement, moi seule peux aider Priscilla. Je vous en conjure, retournez immédiatement dans vos dortoirs, mes chers. »

Estelle objecta, mais quelques secondes lui suffirent pour l'éclairer : trois élèves de première année ne seraient que des boulets aux pieds du professeur Demain. Pourtant, elle avait tant de questions à lui poser, et elle craignait que cette réunion soit leur dernière. Comme comprenant la cogitation d'Estelle, Demain les apaisa d'une voix extrêmement calme par rapport aux événements horriblement agités : « Nous nous reverrons, je vous le promets ».

S'apprêtant à franchir le pas de la porte, elle se tourna une dernière fois vers eux, mais pour s'adresser uniquement à Estelle. Elle posa une question des plus étrange, mais qui semblait très familière pour l'aiglon.

« Que dit le sage sur son lit de mort ? »

Et ce fut une réminiscence : il s'agissait de la toute première énigme que le heurtoir animé posa aux Serdaigles en début d'année. Et la seule pensée de la réponse réconforta définitivement Estelle, qui répondit d'une voix émue à son cher professeur.

« La mort n'est rien pour nous. »

Gul

Elles montaient l'infini escalier de pierres. C'était comme une course contre la montre, où chaque claquement du pied sur l'une des milliers de marches équivalait à une seconde écoulée. Ses pieds, son cœur, ses poumons battaient, mais non ses paupières, car elle ne pouvait les fermer quelques secondes sans visualiser la scène horrifique. Jamais son don n'avait été si puissant ; elle voyait dans un filtre de noir et de blanc le sombre corps figé de la cantatrice, les cagoules lévitantes confondues avec le haut plafond ténébrescent ; outre voir, elle entendait aussi les échos des cris rauques, puis les brefs éclats de douleur des jeunes élèves tombés, et des rires sadiques. Cependant, nul présage de Priscilla.

Six loubards à PoudlardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant