Nouvelle histoire, nouveau chapitre... Bonne lecture.
On y était enfin : le mariage de mon cousin. Le jour où mon petit Stéphane entra dans la cour des grands ! Pour l'occasion, je revêtais une longue robe et ma mère s'était appliquée à me maquiller. Si cela n'avait été que de moi, je n'aurais pas fait autant d'effort puisque mes yeux m'avaient abandonnée il y avait plus de trente ans.
À la douce chaleur se diffusant à travers mes prunelles éteintes, je devinais un temps magnifique. Je me souvenais vaguement de la couleur de l'azur, même si cette réminiscence restait très confuse.
Comme toujours, mon oncle et ma tante avaient vu les choses en grand. Autour de moi, les conversations allaient bon train. Beaucoup d'exclamation, de joie, d'excitation. Plantée quelque part au cœur de la place de l'église, je regrettais d'être privée de ma fidèle Minnie.
Minnie était ma chienne, ma confidente, mes yeux. À cet instant, elle devait probablement être avec ma grand-mère. En tant que demoiselle d'honneur, Steph et ses parents pensaient qu'il était préférable pour les photos de me voir accompagnée d'un homme. Même si je comprenais tout à fait leurs motivations, je déplorais toutefois de me retrouver dépendante des autres pour mes déplacements. Mon frère, Matt, aussi célibataire que je l'étais, endosserait donc le rôle de chevalier servant le temps de cette journée.
— Anissa ! s'exclama le marié. Tu es magnifique !
La tiédeur de sa peau lorsqu'elle entra en contact avec ma main me réchauffa le cœur.
— Merci, répliquai-je, en resserrant ma prise autour du bras de mon frangin.
Avenant, Stéphane s'approcha de moi avant de déposer un baiser sur ma joue. Sa fragrance m'atteignit. Il sentait rudement bon. Pourtant, le mélange de tous les effluves se fondant entre elles commençait à me coller la nausée.
— Ça va, Matt ?
— Très bien, répondit ce dernier, en lui claquant une bise à son tour, t'es très beau comme ça. Et qu'est-ce que tu fais sérieux !
— Où sont vos parents ? s'enquit mon cousin sans relever la moquerie de mon cher frère.
— Ils sont à l'intérieur, en train de filer un coup de main aux tiens, l'informai-je en tendant la main comme pour désigner l'église, alors que je n'avais pas la moindre idée de l'endroit où elle se trouvait.
Toujours devant nous, je le sentis trépigner.
— Pff... souffla-t-il. Je crois que je suis un peu nerveux !
Sa voix, chevrotante, confirmait qu'il était même carrément mort de trouille !
— On le serait pour moins que ça ! déclarai-je souriante.
Sourire était un réflexe depuis toute petite. Faire avaler au monde entier que ma différence ne me touchait pas. Prouver à tous que cette privation de sens ne m'empêchait pas de vivre pleinement, d'être heureuse. Quelque part, épargner ma famille, c'était me protéger aussi.
— Steph ? intervint une voix d'homme essoufflée. Viens, le prêtre a besoin de toi !
Tiens ? C'était qui celui-là ? Bien que la plupart de ses amis fussent également les miens, lui il ne me semblait pas le connaître... Mon regard se dirigea en direction du gars que je ne voyais pas, mais qui dégageait une senteur de musc mêlé à du bois de santal.
— Ah ! oui ! Alors, j'arrive ! s'exclama le futur marié avant de retenir le type, si je me fiai au bruit des semelles stoppant net sur le bitume. Attends deux minutes, Greg, je voudrais te présenter mes cousins, Matt et Anissa.
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Lueur, mon espoir...
Romantizm« Ma dernière lueur s'est éteinte au cours d'un sombre mois de décembre, à l'aube de mes cinq ans. Et dès lors, seul le noir s'est imposé... Depuis, cela fait trente ans que je vis d'odeur, de sons, de toucher et de goût, dans des proportions démult...