Chapitre 10 : les retrouvailles (version upgradée)

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Lorsque mes yeux s'habituèrent à la lumière tamisée de la pièce, je pus en découvrir chaque détail sans enfreindre les règles implicites qui me contraignaient à garder le regard rivé sur le bureau. Celui-ci, en chêne brut, était un chef-d'œuvre artisanal, orné de sculptures finement creusées. À gauche, un globe terrestre se trouvait, entouré d'une pieuvre, symbole sinistre de la mafia italienne. À sa droite, une rose couvrant un corps inerte portait l'inscription « Franccesca ». Peut-être était-elle partie trop tôt.


En levant un peu la tête, mon regard se posa sur un portrait qui me laissa intriguée. Il représentait un homme brun, à la peau mate et aux yeux noisette, grand et fin. Son regard, dur mais non dépourvu de chaleur, semblait scruter mon âme. Alors que je m'approchais du tableau, une voix me fit sursauter :


— Je vois que mon portrait vous intéresse... siffla la voix avec un mélange de curiosité et de menace.


— Je... Il est naturel de vouloir connaître la personne avec laquelle je viens négocier, balbutiai-je en essayant de retrouver mon calme.


— Alors c'est avec une femme que je vais négocier ? Thomas Shelby n'a même pas le cran de venir en personne et préfère sacrifier sa famille ? répondit-il avec un mépris glacé.


Je l'entendis se lever, ce qui me déstabilisa, mais je répliquai tout de même avec sarcasme :


— Peut-être n'a-t-il pas trouvé l'utilité de se déplacer pour un malfrat italien ?


Son rire jaune résonna dans la pièce, empreint de cynisme.


— Très bien, alors j'espère qu'il vous a fait ses adieux car vous ne risquez pas de le revoir !À ces mots, mon cœur fit un bond dans ma poitrine et je vacillai. Il ria en percevant ma peur palpable.


— Alors, reprit-il, que voulez-vous que je vous fasse ? Que je vous injecte des produits toxiques dans les yeux ? Que je vous transplante des muscles ? Que je vous...


— STOP ! criai-je, la voix tremblante, au péril de ma vie.


Il s'arrêta net, visiblement surpris. Je devais l'arrêter parce que malgré tous mes efforts pour me contrôler, mes souvenirs douloureux refaisaient surface, comme une piqûre de rappel cruelle. C'était étrange qu'il connaisse d'ailleurs toutes ces pratiques que seul Mengele infligeait à ses victimes.


— Eh bien, quoi ? reprit-il, impatient. Toutes ces pratiques vous font-elles peur ? Pour les avoir testées, je peux vous assurer que c'est la pire douleur.


— Vous les avez testées ? Vous êtes juif ? demandai-je, ma voix chargée d'incrédulité.


— Qu'est-ce que cela peut vous faire, hein ? cracha-t-il d'une voix froide.


— Je... Je le suis aussi, murmurai-je.


— Mais vous n'avez pas connu les camps, répliqua-t-il, sceptique.


Au nom du sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant