• 39 •

767 42 102
                                    


Je rouvre brusquement les yeux et crache violemment l'eau qui emplit mes poumons. Des flots semblent s'échapper de moi, me faisant tousser à m'en briser la gorge. Chaque respiration est une épreuve, mes poumons brûlent encore. Quand je parviens enfin à respirer plus ou moins normalement, je lève les yeux. Il est là, accroupi à quelques centimètres, le regard inquiet. Lui aussi est trempé, l'eau dégoulinant sur son visage, accentuant d'une manière troublante sa beauté naturelle.

Jamais je n'aurais imaginé qu'il viendrait à mon secours. Mais ce n'est pas parce qu'il m'a sauvé cette fois que je vais changer d'attitude envers lui.

— C'était complètement stupide, ce que tu as fait.

— Comment aurais-je pu savoir que c'était un piège ?

— Tu aurais dû te méfier. Ce prof ne vient jamais ici.

Il a raison. J'aurais dû être plus vigilant, mais je ne l'ai pas été. Et ça m'énerve de devoir l'admettre.

— Je ne connais pas l'emploi du temps des profs.

— Moi non plus. C'est juste du bon sens.

— Ouais, c'est bon, la ferme.

Je suis en colère. Et je ne sais même pas pourquoi. Je devrais être reconnaissant, il m'a sauvé la vie.

— J'aurais peut-être dû te laisser couler, vu comment tu me remercies.

— Peut-être bien. Ça aurait été mieux si j'étais mort.

— Tu dis n'importe quoi.

— Ferme-la. Je ne sais même pas pourquoi je te parle.

Je tente de me relever, mais mes jambes tremblent encore sous l'effort. Alors que je m'apprête à quitter la salle, il me retient par la manche de ma chemise trempée.

— Pourquoi tu dis des trucs comme ça ?

— Comme quoi ?

— Que tu aurais dû crever.

— Parce que je le pense. C'est tout.

— Arrête de dire des conneries.

— Je trouves ça culotté de me dire ça, alors que tu ne fais rien pour m'aider à penser autrement.

Il reste bouche bée face à ma réplique.

— Je viens littéralement de te sauver la vie.

— Et tu fais quoi depuis trois semaines, espèce de con ?

Il ne trouve rien à répondre. Le silence qui s'ensuit est lourd de sens.

— Voilà. Maintenant, lâche-moi. J'ai autre chose à faire. On m'attend.

— Tu vas voir cet autre connard, c'est ça ?

— Ouais. Et je ne vois pas en quoi ça te concerne.

— Il va t'attirer des ennuis.

— Ça vous fait un point commun. Vous vous ressemblez plus que je ne le pensais.

Je vois son regard changer, devenir plus sombre, plus froid.

— Non, pas du tout. Lui, c'est un putain de pédophile, gay en plus, qui t'aime, mais pas moi.

Ces mots frappent comme un coup de poing. Malgré moi, une larme me brûle la joue. C'est la chose la plus cruelle qu'il m'ait jamais dite. Et il semble s'en rendre compte aussitôt. Son expression change du tout au tout.

— Yoongi, je suis désolé... je ne voulais pas dire ça...

— En fait, t'as raison. Vous ne vous ressemblez pas. Lui, au moins, il assume ce qu'il ressent. Lui, il tient à moi. Il mérite peut-être plus mes sentiments que toi.

Ambiguity [ NAMGI ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant