Une Vie d'Amant

III

Rajik en mode texto : « Salut bébé, comment vas-tu ? ». Thakim répond :
« Salut, je suis pas ton bébé ».
-Qu’est-ce que t’es alors ?
-Je sais pas
-Ok
Et le dialogue continua pendant que chacun tirait le filet de son côté afin d’embobiner l’autre. A la fin du floutage, chacun pensait avoir marqué des points. Cette croyance permet de se conforter et d’imaginer l’autre faire ce qu’on veut, au moins la nuit-là. Le pouvoir de la pensée peut-être mais la fin le dira.

Les jours suivirent sans crier gare, renforçant les liens entre les amis et camarades. Le cours de SVT brosse le sujet tabou : le sexe. Ce dont les élèves profitent pour délier leur langue, faire preuve de pudeur pour certains et vaincre la timidité pour d’autres. L’enseignant conscientise sur les MST, le VIH, disant il n’y a rien dans le sexe, vous vous en lasserez plus tard, il existe tellement d’aspect de l’organe. Radge soupçonne qu’hormis la biologie humaine, c’est le beaucoup de l’expérience qui parle. Thakim se fait discrète pendant ce temps. Rajik intervenait bien souvent en remarquant que : les filles font semblant mais aiment le sexe, il en est convaincu. Cela suscite révolte chez les filles. Les plus audacieuses car il y en a très peu, rétorquent que : ce sont les garçons qui ont la tête dans le caleçon, attisant au passage un fou-rire brouhaha.
En se référant au titre Ma tête, mon cœur et mes couilles de Grand corps malade, il existe un conflit interne auquel sont confrontés les adolescents simplement à la recherche de l’amour.

Thakim et Rajik flirtaient comme tout individu de leur âge via texto, sexto, causeries voire des "rendezvous secrets". Radge se démenait avec Belinda, sentant qu’elle l’échappait et s’adonnait à un autre. C’est un jaloux silencieux. Cependant, quelques jours avant la fin, elle l’aguichait en l’adressant.
Groupe de filles et bande de garçons évoluent à la récré, dans des déplacements, pas l’un sans l’autre, formant une unité. Il arrive que les membres se dispersent ou s’absentent. Cercle de sécurité dont l’isolement fait sourire les détracteurs de l’unité ou signalement d’un problème ou baisse de garde. Dans pareille situation, les alliés du membre se révélaient : admirateurs et admiratrices, camarades échangeurs de services et/ou de respects, mieux les proies du jeu de la drague.
Radge était dans le cas. Le groupe de Belinda l’a remarqué. Une fois alertée, Belinda lui demande : T’as quoi ?
-Radge : Rien
-Belinda : Pourquoi t’es tranquille comme ça ?
-Radge : Juste comme ça
-Belinda : Ok
-Radge : …
Le négro avait juste faim, tête ailleurs conséquence de son mal, aucunement disposé à parler de quoique ce soit. Radge pensait « Youpi elle s’intéresse à moi. Si je me sentais bien, j’allais plus l’hypnotiser de mon emprise ».

Si seulement on savait, "s’intéresser à" veut pas forcément dire que tu lui plais amoureusement, sexuellement. Ce peut-être de la compassion, de la pitié, de l'amitié, de la sympathie.