Chapitre X│Ferme décision.

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Point de vue de Loïc

Allongé sur le lit, le regard tourné vers le plafond, je me pose plusieurs questions. Comment ce chausson est-il arrivé là ? Et comment Calvin a fait pour le perdre ? Quand on fugue, est-il normal de se débarrasser de ses vêtements ?

Ne pouvant plus tenir, je veux trouver des réponses à mes questions alors je m'habille et escalade la fenêtre de ma chambre qui est tournée vers la rue. Vu l'heure, ma mère ne m'aurait jamais laissé sortir - mais bon, c'est pour la bonne cause.

J'arrive au poste de police et je demande à la dame de la réception si je peux réserver un rendez-vous avec les enquêteurs qui travaillent sur l'affaire de mon ami, mais bien sûr, elle refuse en me disant que je suis trop jeune. Elle me dit juste qu'il ne faut pas perdre espoir et me laver les mains de cette histoire, mais je n'en ai pas l'intention, alors un soupçon d'idée me vient en tête. Je lance :

— Dites ? Ça ne vous effraie pas ces affaires de kidnappings orchestrées par ces fameux cannibales ?

— Avec toute franchise, je ne marche même plus la nuit sans être accompagné, avoua-t-elle en tombant dans le piège.

— J'ai entendu dire qu'ils attaquent souvent ceux qui se promènent dans des endroits isolés en pleine nuit, renchéris-je.

— Exactement, et d'ailleurs, j'ai surpris une conversation entre des policiers qui discutaient de cela. Ils songeaient à fermer le parc durant la nuit.

Et bingo !

— D'accord, merci m'dame. Je vous promets de ne pas perdre espoir et de prendre soin de moi.

Maintenant, j'en suis presque sûr que quelque chose ne tourne pas rond dans toute cette histoire. Le chausson retrouvé au parc, cette histoire de cannibales mangeurs d'hommes et des enlèvements brusques. Je ne peux pas faire confiance à la police. Ils connaissent quelque chose, mais nous le cachent et ils sont trop chargés par toutes ces disparitions. Ils vont vite plier le dossier et passer à autre chose.

Je rentre chez moi et fouille toute la nuit dans mon ordinateur pour trouver des preuves. Le matin, je me réveille, la tête sur le clavier de mon PC. Il faut que j'aille voir monsieur Jack pour lui faire part de ce que j'ai découvert, mais bien sûr après l'école parce que là, je suis super à la bourre.

À la sortie des classes, je me précipite vers la maison de monsieur Jack pour lui parler. J'appréhende un peu le déroulement de la situation. J'ai peur de ne pas être capable d'annoncer cela.

Arrivé chez l'homme, je lui regarde droit dans les yeux et dis :

— Monsieur, je pense que vous devriez vous mettre.

Malgré son regard interlocuteur, il se met sur le fauteuil du salon sans poser de question.

— Voilà ! Monsieur, je crois que j'ai quelque chose qui pourrait vous intéresser.

Ses yeux s'illuminent soudain.

— À propos de mon fils ? lança-t-il avec précipitation.

— Oui... Vous voyez le chausson que nous avons ramassé l'autre jour ? Je me suis dit que ce n'était pas normal qu'il soit arrivé là par hasard et une personne qui fugue ne se débarrasse pas de ses chaussons en plus dans un froid de novembre. Ce n'est pas envisageable.

— Qu'est-ce que tu veux dire par là ?

— Je pense que Calvin a été enlevé. Quand j'étais allé au poste de police, la réceptionniste a sous-entendu que ces derniers temps, les gens se faisaient kidnapper et que les derniers endroits où ils étaient aperçus, c'était au niveau du parc.

Je sais que c'est quand même absurde ce que je dis, mais nous n'avons aucune piste et c'est ce qui me semble le plus logique.

— Ce n'est pas possible. Pourquoi ? Maintenant, où est-ce que j'irai chercher mon fils ? Ce n'est pas vrai. Ils sont introuvables à cette heure-ci.

— Pas exactement ! Il y a peu de temps, un appel à la population a été fait contre un groupe indigène de cannibales se trouvant dans les environs et cherchant des gens à tuer. Ils vivent en Amérique du Sud et...

Ma phrase s'interrompt soudain par le bruit sonore de la table basse projetée violemment à l'autre bout de la pièce. Le regard de l'homme a changé, il est noir et rempli d'un sentiment indescriptible. Il s'est levé, les poings serrés et les yeux clos comme s'il voulait se calmer à tout prix.

C'est compréhensible. Il vient de perdre sa famille, son fils. Il ne s'agissait que d'eux deux dans l'histoire et là, on venait brutalement de le lui arracher. J'ai moi-même mal au cœur. Même si Calvin et moi, ne nous connaissons pas depuis des années, c'est mon meilleur ami. J'ai besoin de lui et il me manque.

Je n'ai pas pu m'empêcher de craquer et Jack m'a pris dans ses bras.

Point de vue de Jack

Calvin, je m'en veux tellement. Je comprendrais si tu ne voulais plus me parler, mais je veux juste savoir si tu es sain et sauf – ce que j'aurais tellement aimé lui dire.

Loïc vient de rentrer chez lui et la solitude revient me faire face. Allongé sur mon lit, je regarde le plafond blanc. Mes yeux refusent de se fermer et mon cœur n'a plus de force pour supporter l'absence de Calvin. J'ai l'impression de devenir fou. Je ne suis même pas sûr de me réveiller le lendemain.

Finalement, l'heure a eu raison de moi et j'ai sombré dans un sommeil éphémère. Je rêve de Calvin. Dans celui-ci, il m'appelle et me montre de le suivre, mais à chaque fois que je veux l'attraper, il s'enfuit alors je reste là, recroquevillé dans le noir ; quand soudain une main me touche l'épaule. C'est ma femme, Léana, elle est si belle, si parfaite. Elle me dit :

— Chéri, qu'est-ce qui ne va pas ?

— Calvin est mort.

— Non, il n'est pas mort. Il te cherche, il t'appelle, il a besoin de toi, il est en danger.

À ce moment-là, je vois mon fils couvert de sang qui m'appelle et me tend les bras alors je cours vers lui et à l'instant où je veux le prendre, je me réveille en sursaut. Il est une heure de l'après-midi.

Je reconnais que pendant trop longtemps, j'ai abandonné ma famille, j'ai abandonné mon fils. Je les ai rejetés parce que j'avais peur de les aimer et de les perdre eux aussi, ce que je n'aurai jamais supporté. J'ai été faible et je n'ai pas été responsable.

Calvin, où que tu sois, je viens te chercher. Même si je dois passer par l'enfer pour te retrouver. Je donnerais tous mes membres rien que pour entendre ton rire résonné dans le couloir de la maison quand je me réveille le matin.

Attends-moi, j'arrive.

AMAZÔNIAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant