Punaises

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1945

Tom avait quitté Poudlard fou de rage. Il avait espéré devenir professeur, persuadé qu'il saurait apprendre aux enfants ce qu'il était véritablement essentiel d'apprendre. Il trouvait idiot de repousser la magie noire des cursus, pensant sincèrement que toutes les magies devaient être enseignées.

Tous les enfants ne deviendraient pas des Mages noirs en pratiquant - juste les élus pourraient prétendre à ce titre - mais il trouvait normal que la connaissance soit accessible à tous. Toute la connaissance.

C'était probablement pour cette raison qu'il avait refusé toute recommandation venant de Poudlard. Il ne voulait rien leur devoir, puisqu'il avait été rejeté. Il ne voulait pas d'une autre carrière. Il était persuadé que Dumbledore était derrière le refus de Dippet, et il jura de se venger du professeur de métamorphose.

Puisque son projet était retardé - il ne s'avouait pas vaincu : il n'avait jamais échoué à obtenir ce qu'il voulait, il n'allait pas commencer maintenant - il trouverait quelque chose de transitoire avant de se représenter dans l'école de sorcellerie. Il reviendrait en vainqueur, sûr de lui, plus âgé et avec ses compétences, de manière à ce que personne ne puisse lui refuser le poste qu'il convoitait.

En quittant Poudlard, sa valise à la main, Tom jeta un regard noir à Dumbledore avant de partir sans un mot. Il sentait le poids du regard de son ancien professeur vrillé dans son dos mais il ne lui donnerait pas la satisfaction d'hésiter ou de se retourner.

Tête haute, il quitta l'école qui avait été son foyer ces sept dernières années, le lieu qui avait changé sa vie et qui lui avait donné tant de connaissances. C'était à cet endroit qu'il avait commencé à se poser des questions sur le monde qui l'entourait, c'était à cet endroit qu'il avait commencé à se faire appeler Lord Voldemort - son alter ego qui n'avait pas de scrupules à écraser les obstacles se dressant sur son chemin.

En arrivant à Londres, Tom prit une chambre au chaudron baveur. Il n'avait que très peu d'argent - il n'avait hérité de rien malgré la mort de sa soit-disant famille puisqu'il n'avait jamais été reconnu - juste de quoi passer deux ou trois nuits dans une chambre minable. Cependant, il ne s'inquiéta pas vraiment de son avenir. Il était certain qu'il trouverait une solution le moment venu, il avait toute confiance en ses capacités.

Après avoir déposé ses affaires, il prit le temps de parcourir le chemin de Traverse, tranquillement, observant chaque boutique, cherchant l'endroit où il irait proposer ses services.

Lorsqu'il croisa un passage sombre, il s'immobilisa, sourcils froncés. Il n'avait jamais fait attention à cette bifurcation, mais aujourd'hui, il se sentit étrangement attiré. Ce fut ainsi qu'il découvrit l'allée des embrumes.

Il suivit son pressentiment, et s'y engagea, souriant alors qu'il découvrit nombreuses boutiques qui affichaient sans complexes le commerce d'objets de magie noire. Tout semblait plus sombre et plus crasseux que dans la rue principale, mais il y avait beaucoup de monde également. Une clientèle différente, bien moins respectable que dans le chemin de Traverse...

A un moment, la rue faisait un coude, et il y avait une boutique. Barjow et Beurk. Les vitres semblaient presque opaques à cause de la poussière et les toiles d'araignées, il y avait un amoncellement d'objets hétéroclites visible depuis l'extérieur - tous liés à la Magie noire bien entendu. Une punaise passa dans son champ de vision sur la vitre et il grimaça, pensant qu'un peu de ménage ne serait pas superflu.

Tom sentit une fois de plus l'attraction et entra, curieux. Voyant une petite affichette crasseuse posée sur le comptoir, il sourit, satisfait d'avoir été conduit ici par une intuition... ou bien le destin.

Le propriétaire cherchait un vendeur.

Souriant largement, Tom se présenta, annonça qu'il venait d'être diplômé, et postula pour le poste de vendeur. Le vieil homme derrière le comptoir fronça les sourcils, l'examinant des pieds à la tête et fit la grimace.

- On r'crute pas les premiers d'la classe ici.

Tom ne se démonta pas. Son sourire s'élargit, et il proposa de faire un essai. S'il remplissait les exigences demandées pour le poste, ils pourraient rediscuter de son embauche.

Beurk - l'un des deux hommes fondateur de l'endroit - soupira et accepta. Il ne pouvait pas se montrer si difficile, les candidatures ne se pressaient pas au portillon. C'est ainsi que Tom commença une carrière de vendeur.

En quelques heures à peine, il fit ses preuves. Il se révéla terriblement persuasif, capable de vendre n'importe quoi à n'importe qui. Il n'était cependant pas un escroc : il connaissait parfaitement chaque objet du magasin, grâce à ses connaissances acquises à Poudlard. Il était capable de deviner les besoins de chaque sorcier qui entrait dans l'échoppe, et de le convaincre d'acheter - quelque soit le prix.

Beurk, en propriétaire de magasin pragmatique, prolongea donc son contrat avec plaisir, et lui donna plus de responsabilités. Désormais, Tom accompagnait son patron à Gringotts quand il devait inventorier les coffres d'anciennes familles sang-pur, qui voulaient se débarrasser d'objets liés à la Magie Noire.

C'est à cette occasion, en pénétrant dans la banque sorcière, que Tom eut l'idée de demander des informations sur sa famille maternelle aux gobelins ce qu'il n'avait jamais eu l'occasion de faire. Les créatures le dévisagèrent un long moment, avant qu'il ne soit conduit devant un coffre.

- C'est le coffre de Merope Gaunt, ouvert à l'intention de son fils unique Tom Elvis Jedusor.

Tom écarquilla les yeux stupéfait. Il ne pensait pas qu'il y aurait quoi que ce soit de sa mère, puisqu'elle était morte indigente.

Le gobelin le mit cependant en garde.

- Miss Gaunt avait un coffre ouvert dès sa naissance, c'est la tradition familiale chez les Sang-purs. Qu'il y ait un coffre ne veut pas dire qu'il contienne quoi que ce soit.

Tom acquiesça et ouvrit la porte d'une main tremblante.

Il y avait quelques objets, probablement les dernières possessions de Merope. Ce n'était que des choses sans valeur, des souvenirs. Une ancienne poupée de chiffon, ses livres de Poudlard. Des vêtements démodés.

Un peu à l'écart du reste, il y avait une lettre jaunie portant son nom. "Tom".

La main tremblante, il s'en saisit, l'observant avec stupeur. Cependant, il ne voulait pas l'ouvrir dans ce coffre, alors qu'il n'était pas seul. Il empocha le parchemin, la main légèrement tremblante, et examina le reste du coffre, sans pour autant trouver quoi que ce soit de valeur ou d'intéressant. Rien que des babioles, probablement les dernières choses précieuses aux yeux de sa défunte mère.

Il récupéra les livres - il pourrait toujours les vendre - et quitta les lieux sans un regard en arrière. En passant devant le gobelin, il le remercia et lui donna ses instructions.

- Vous pourrez brûler le reste.

Apparences trompeusesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant