MENSONGES ET VÉRITÉS

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Je devais savoir si ce qu'avait dit ma mère l'autre jour était vrai. Alors pendant qu'ils étaient au travail, j'ai cherché ce fameux dossier dans le bureau de mon père. Je me fichais bien de ranger ou non ses affaires. Alors j'ai tiré les tiroirs, fouillé dans ses papiers, jeté ce qui ne m'intéressait pas par terre. J'ai regardé parmi ses étagères, remué ses pochettes de couleur, balancé ses livres au sol. Des feuilles de papier volaient dans tous les sens et la scène me semblait irréelle. Le bureau de papa, d'ordinaire rangé au millimètre près, bien ordonné et propre, était à présent un lieu totalement en désordre. Mais je m'en fichais. En marchant sur les feuilles, je les froissais sous mes pieds. Je serrais les poings. 

- Bordel, il est où ce putain de dossier !?

Il ne me restait que le bureau à fouiller. D'un œil mauvais, j'ai scruté le meuble et mes yeux ont rencontré le cadre de famille : Papa, maman, ma soeur et moi, assis dans le canapé et souriant. Je devais avoir 8 ans sur la photo. J'ai pris le cadre et sans pitié, je l'ai fracassé sur le sol. J'ai retiré les bouts de verre sans me couper et j'ai déchiré autant de fois la photo que je pouvais. 
C'était fini. Ce n'était plus ma famille. Elle s'est trop brisée et je ne pourrai rien faire pour la réparer. 

Mon regard est tombé sur une clé qui provenait de dessous le cadre. Une petite clé grise. Je l'ai examinée entre mes doigts et... j'ai vu. J'ai vu ce petit tiroir du bureau qui ne pouvait être ouvert qu'avec une clé. Je me suis approché, tremblant, proche de la Vérité. 
J'ai mis la clé dans la serrure, et je l'ai tourné. Le bruit du mécanisme m'effraya. Mon cœur battait dix fois plus vite et je sentais le sang battre dans mes veines. J'ai ouvert alors le tiroir. 

Il n'y avait qu'une chemise. Une chemise rouge à rabats. 

Je l'ai prise dans mes mains tremblantes et posée sur le bureau. Après une longue inspiration, je l'ai ouverte. Mon cœur était trop cassé déjà pour que je me remette à pleurer. Je n'étais animé que par de la colère de toute manière. J'ai tapé du pied et j'ai refermé la chemise. 

Lorsque je suis partit du bureau de mon père et que je suis arrivé dans le salon, il y avait presque un silence de mort. Papa était assis dans le fauteuil, les bras sur les genoux et la tête baissée, maman dans le canapé et se rongeait l'ongle du pouce, ma sœur était debout, visiblement prête à repartir. 

- Nous étions sur le point de-... 

Ma mère s'interrompt en me voyant et je vois qu'elle a les larmes aux yeux. Je brandis la chemise rouge devant leurs yeux et Papa m'affiche juste un visage triste. Ma sœur fronce les sourcils. 

- Avant que vous ne parliez de votre divorce, je pense qu'il y a des choses plus importantes dont on doit parler, non ? (Je souris en plissant les yeux et ma voix demeure glaciale.) Du fait que j'ai été adopté par exemple ? 

- Jisung... je...

- Laisse-moi parler "maman". Je vous ai entendu parler dans le bureau l'autre soir. 

Ils sont de plus en plus désemparés. Ils ne savent plus où se mettre. 

- Que papa ne m'a jamais voulu. Que vous êtes restés ensembles juste parce que Haneul et moi sommes là. Vous avez fait semblant pendant des années... et vous comptiez nous le dire quand ? Et surtout... ce qui m'a mis en rage... ce n'est pas simplement le fait que j'ai été adopté mais que ma vraie mère ne voulait pas de moi non plus ? 

- Jisung... calme-toi... on va tout t'expliquer... 

- Non... non... et NON, je ne me calmerai pas ! je hurle et je jette la chemise à mes pieds. Ma mère n'a tellement pas voulu de moi qu'elle a voulu avorter... tout ça à cause d'un connard de père qui l'a obligée à avoir ce rapport avec elle. J'étais pas censé naître. Et ça... ça fait très mal. Très mal de me dire que je suis issu de ce rapport... que je suis une putain d'ERREUR. J'en ai MARRE, juste MARRE  d'encaisser depuis des semaines, à avoir des crises d'angoisses fréquentes, à vomir presque tous les jours et de ressentir la solitude plus que jamais. En plus vous en rajoutez avec vos disputes de merde. Mais séparez-vous ! Pourquoi vous ne l'avez pas fait ?! ça nous fait juste souffrir Haneul et moi! Je vous considère plus comme mes parents. Vous êtes des inconnus pour moi. JE VOUS DETESTE ! 

J'ai littéralement pété un câble. 

- Je me casse. 

Je marche vite vers la porte, dégoûté de cette famille. 

- Tu vas...

- Chez Changbin. Et vous avisez pas de venir. Lui au moins il ne m'a jamais menti et je l'aime. Vous pouvez me dire ce que vous voulez, je m'en contrefous. 

Je claque la porte d'entrée derrière moi. L'air frais de la nuit me frappe au visage et je cours jusqu'à la maison de Changbin, les larmes aux yeux. J'évacue toute cette pression qui m'enserre dans un étau depuis des semaines. J'ai envie d'hurler à plein poumons mais je me retiens. 

J'arrive devant la porte de chez Changbin et je sonne. Une fois... deux fois...
J'allais sonner une troisième fois quand il m'a ouvert la porte. 

- Jisung ?!

J'ai alors pris Changbin dans mes bras et je l'ai serré fort. Ce contact m'avait tant manqué. Mes épaules tressautaient à cause de mes sanglots. La chaleur de Changbin me faisait le plus grand bien. Je me suis séparé de lui quelques minutes plus tard et je l'ai embrassé en premier comme je ne faisais presque jamais le premier pas avant. Changbin me serre contre lui et je continue de pleurer. Entre deux baisers, Changbin me murmure (nous nous regardions dans les yeux à ce moment-là) : 

- Je t'aime Han Jisung, vraiment. 



𝗰𝗼𝘀𝗺𝗼𝗻𝗮𝘂𝘁 ₍ᐢ ̥ ̮ ̥ᐢ₎ ᵇⁱⁿˢᵘⁿᵍOù les histoires vivent. Découvrez maintenant