16 octobre 1941

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Après avoir récupéré leurs uniformes, les recrues sélectionnées pour faire partie de la 122e unité avaient pris le train en direction de la base d'Engels. Le voyage avait été long et éprouvant pour elles. Voyager à bord de teplouchki avait été rude pour tout le monde. Arrivées à Engels, les nouvelles recrues observaient tout ce qu'elles voyaient. Des baraquements longs et de plain-pied, des abris de défense anti-aériens recouverts de sacs de sable, les canons de défense qui dépassaient du sol. Le vrombissement d'un avion se fit entendre. C'était un Polikarpov Po-2, un biplan que les recrues affectées au vol allaient bientôt maitriser à la perfection. Ces filles avaient les yeux qui brillaient en se rendant compte qu'elles allaient enfin passer leurs journées dans un avion, à voler pour défendre leur Patrie comme elles en avaient toujours rêvé. Leur commandant ainsi que son commandant en second, Yevdokia Berchanskaya se postèrent à un endroit où toutes les recrues pourraient les voir. Le commandant Raskova, l'Oiseau de feu prit la parole.

- Camarades ! Les allemands, ces traîtres, ont attaqué notre Patrie depuis maintenant quatre mois. Ils avancent sur notre territoire. Il est de notre devoir de protéger ce qui nous appartient. C'est dans ce but que le Vojd a donné son accord pour que vous, les futurs faucons de Staline, formiez une unité, là où trop de nos camarades pilotes ont péris en défendant nos terres. Faites honneur à notre Chef. Faites office de mur, en vous joignant aux rangs de l'armée Rouge et stoppez l'avancée de l'ennemi. Je compte sur vous. Les autres soldats comptent sur vous. La Patrie compte sur vous.

Pereryv !

Les jeunes femmes partirent vers leur baraquement pendant que le commandant et son second se dirigeaient vers leurs quartiers de l'autre côté de la base. Les recrues dormaient dans des dortoirs aménagés dans une ancienne école. Le lieu de vie qu'elles occuperaient durant les prochains mois était sommaire mais suffisant pour des soldats. Elles portaient leurs uniformes depuis qu'elles étaient parties de Moscou : une vareuse kaki et des bottes qui avaient été conçues pour des hommes, donc beaucoup trop grandes pour elles. Le pantalon leur arrivait jusqu'à la poitrine et la pointure des bottes ne descendait pas en dessous du 40. Le peu d'habits civils qu'elles avaient emportés ne faisant pas partie de l'uniforme réglementaire, elles n'en feraient pas un grand usage là où elles se trouvaient... Ce soir-là, des coups de ciseaux réduisaient le tissu pour lui donner une forme bien différente. Celle d'uniformes adaptés à un corps de femme.


Pendant que les recrues transformaient leurs uniformes, le commandant Raskova prenait possession de ses quartiers. Il défit son sac, fit son lit et déposa une photo de sa fille sur le bureau qui trônait au milieu de la partie gauche de la pièce. Avant de la poser, son regard s'attarda quelques instants sur les traits de son visage. On frappa à sa porte. Son commandant en second entra. Elle lui fit son rapport pour la journée et lui demanda si le commandant avait besoin d'autre chose. Ce n'était pas nécessaire. Elle quitta la pièce. Juste après sa sortie, Raskova prit la lettre qui était posée au-dessus d'une pile de dossier. Une lettre de sa fille : rien de mieux après ce long voyage en train.

Mamenka,

Tu me manques tant. Dedushka et Babulya sont très attentionnés envers moi mais ce n'est quand même pas la même chose que d'avoir ma Maman. J'ai quand même rencontré pleins de nouveaux amis au Komsomol dans lequel je me suis inscrite à mon arrivée, comme tu l'avais fait lorsque tu as eu 15 ans. J'aide à la maison comme tu me l'as demandé pour que Babulya ne soit pas épuisée. J'essaie de te rendre fière même si tu n'es pas là.

J'espère que tout va bien là où tu te trouves. Tu m'as déjà dit que tu ne pouvais pas me donner le lieu de ton affectation pour des raisons de sécurité mais je n'arrive pas à m'y faire. J'aimerais tant pouvoir te voir, te prendre dans mes bras et ne jamais te laisser partir. Le temps est long sans toi et j'ai hâte que la guerre finisse pour pouvoir à nouveau t'avoir près de moi.

Ya lyublyu tebya

Tania


La légende de l'Oiseau de feuWhere stories live. Discover now