Chronique de Minetou Lèye :Reflets du Passé

😊😊Chapitre 01😇😇

Dakar mars 1991

Minetou sortit de la voiture, traversa rapidement la chaussée et atteignit la porte de son collège. D'un pas alerte, elle monta les marches de l'escalier menant au perron, salua respectueusement la Mère Supérieure Cécile et les autres religieuses debout à côté d'elle, avant đe pénétrer dans le bâtiment central.
Une fois dans sa classe, elle poussa un ouf de soulagement :
_ Pile à l'heure, j'ai eu chaud aujourd'hui, fit-elle à sa voisine et copine Rachel Layousse.
_ Je commençais à m'inquiéter pour toi. Tu sais qu'on a interro de sciences naturelles aujourd'hui et la prof verra d'un mauvais œil qu'on soit en retard, observa celle-ci.
_ T'as raison, d'autant plus que sa matière n'est pas mon fort.Moi, seul ĺes matières littéraires m'intéressent.
_ Je sais, moi-même je n'en suis pas fan.
D'ailleurs je me demande pourquoi on nous impose, nous qui sommes en série littéraire, de continuer d'étudier les matières scientifiques, pesta-t-elle.
Elle fronça les sourcils puis chuchota :
_ Attention, j'entends sa voix.
Les deux complices se turent aussitôt et sortirent leurs copies déjà préparées pour l'interrogation.
Madame Ndiaye, le professeur de sciences naturelles, fit son entrée dans la salle de classe. C'était une petite femme sèche. La mine sévère qui s'affichait en permanence sur son visage inspirait d'emblée le respect à ses élèves, composés en majorité de filles.
_ Bonjour tout le monde, lança-t-elle d'emblée.
Elle jeta un regard circulaire dans la classe.
_ Bien, je vois que vous avez déjà préparé vos copies.
Elle sortit la pile de feuilles de son sac et la remit à la responsable de classe pour la distribution à ses camarades.
Un silence de cathédrale s'installa bientôt dans la classe.

****

_ Si je réussis à avoir 10/20 , je serai la fille la plus heureuse, énonça Minetou à la fin de l'interrogation.
_ Tu parles d'un 10! Je n'espère même pas 5 , dit Rachel.
_ Ses interros sont de plus en plus corseées, observa leur camarade Eugénie.
Minetou haussa les épaules. C'était la pause, et comme d'habitude, elles s'étaient installées sur l'un des bancs qui meublaient la cour de l'institution religieuse Sainte Madeleine.
_ A propos, vous n'avez pas oublié que je fête mon anniversaire samedi prochain? Leur rappela Rachel.
Minetou secoua la tête:
_ Non.D'ailleurs j'ai demandé à ma mère de me payer une nouvelle tenue pour l'occasion et d'essayer de convaincre mon père de me laisser y assister.
Eugénie claqua joyeusement les doigts :
_ Moi, je sais déjà ce que je vais mettre, mon père m'a ramené lors de son dernier voyage au Maroc des habits de sortie super chics et branchés.
En tout cas, vous avez intérêt à être super belles, car il y aura des mecs sensationnels à ma fête, annonça Rachel.
_ Ah oui? Lesquels? demanda Eugénie.
Rachel eut un sourire énigmatique :
_ Vous verrez...
_ Allez, dis-le nous, s'il te plaît, la pressa Eugénie.
_ Je vous dis que ce sera une surprise.
_ Va, intervient Minetou. Nous trois, sommes embarquées dans la même galère : nos parents ne nous laisseront jamais avoir un petit copain. A propos, comment as-tu réussi à persuader les tiens de te laisser faire une fête pour ton anniversaire, Rachel?
_ Ma grande sœur Zohra m'a aidée à les convaincre. J'ai dix sept ans maintenant, je me dois d'être responsable.

Rachel était d'origine libanaise. Ses grands-parents paternels s'étaient installés au Sénégal au cours de la période coloniale et tous leurs enfants y étaient nés, à commencer par son père, Salim Layousse.
_ Je suis tout à fait d'accord avec toi, mais cela, va le dire à quelqu'un à l'esprit aussi étriqué que mon père, qui croit que je suis toujours une petite fille et qui voit des délinquants partout, constata amèrement Minetou.
_ Pourtant, il t'adore, ton père.
_ Je sais et je le lui rends aussi mais je lui reproche de trop me couver. Maman ne cesse de lui suggérer de nous laisser une marge de manœuvre, à mes sœurs et à moi, mais il ne veut rien comprendre.
Il répète à chaque fois que les mœurs sont devenues trop dépravées.
_ Mes parents ont aussi la même opinion, renchérit Eugénie.
_ En tout cas, nous avons une belle occasion de nous amuser, il y aura même les copains de Zohra, les informa Rachel.
La cloche marquant la fin de la pause sonna.Elles se levèrent et regagnèrent leur classe.

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