Epilogue

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— Une dernière fois ? supplia une fillette en se jetant aux pieds de sa mère.

    La jeune femme ne put s'empêcher de rire et releva sa fille.

    — J'ai dit non Siline. Il est tard déjà. N'oublie pas que demain nous recevons du monde.

    — Oh ! s'exclama un petit garçon couché sur le ventre sur un lit. Je sais ! Le Roi de Kahara ! Papa a des choses à voir avec lui.

    Sa mère hocha la tête, sérieusement. La jeune Siline croisa les bras dans une mine boudeuse.

    — Ce n'est pas juste, toi et papa vous n'allez pas dormir tout de suite.

    — On dit papa et toi, chérie. Et puis nous sommes grands. Savais-tu que les enfants de moins de six ans doivent dormir presque treize heures chaque nuit ?

    La petite fille se redressa, le visage tout fier. Elle esquissa un grand sourire malgré ses deux dents en moins.

    — J'ai presque sept ans, alors c'est bon !

    — Et moi ? demanda le garçon.

    — Tu le sais déjà Adrian, nous avons fêté ton anniversaire il n'y a pas longtemps.

    Le garçon leva sa main devant lui et compta sur ses doigts. Avec un immense sourire, il déclara :

    — J'ai cinq ans, je suis grand !

    Sa mère le souleva et le serra fort contre elle.

    — Et pour devenir plus grand encore il faut dormir, regarde, Niya dort déjà.

    Elle montra du doigt une petite fille aux cheveux châtains très clairs presque blonds, endormie sur le lit. Elle avait ses petits poings fermés et de la bave s'écoulait de sa bouche entre-ouverte. Adrian grimaça.

    — Oh non. Pourquoi toujours sur mon oreiller...

    Siline ne put s'empêcher d'éclater de rire. Malgré tout, elle trouvait leur petite sœur adorable. Sa mère lui ébouriffa ses cheveux bruns bouclés, la faisant lever la tête vers elle.

    — Aller, au dodo mes petits anges.

    En réponse à ses paroles, Adrian bailla à s'en décrocher la mâchoire en frottant ses yeux bleu clair presque gris.

    — Oui mais Niya a pris mon lit...

    Sa mère lui sourit et le déposa à côté de sa sœur. Elle prit ensuite la petite dans ses bras en prenant soin de ne pas la réveiller, puis embrassa son fils sur le front avant de quitter la chambre, sa fille aînée sur les talons.

    Elle entra dans une chambre, adjacente à la sienne et déposa la petite Niya sur son lit d'enfant. Elle l'embrassa aussi sur le front puis sortit discrètement de la pièce. Il ne restait plus que Siline, la plus difficile des trois à coucher.

    Par habitude, la jeune femme savait qu'elle aurait du mal à la mettre au lit.

    — Jinah, Siline ? demanda une voix derrière elles.

    La petite fille esquissa un immense sourire et courut dans les bras de son père.

    — Papa ! Toi je suis sûre que tu voudras bien me raconter l'histoire !

    — Pas de problème ma puce, je...

    — Tan ! coupa Jinah, agacée. J'essaie de les coucher depuis une heure déjà. Ne lui donne pas ce qu'elle veut.

    — Une dernière fois, pleura faussement la fillette.

    — Oh... marmonna Tan. Elle veut une dernière fois...

    Ils se tournèrent tous les deux vers elle, avec des yeux de chaton. Jinah explosa de rire.

    — Arrêtez ça, cela ne marchera pas avec moi.

    Les yeux verts de Siline se teintèrent de sérieux.

    — J'irai me coucher si papa et toi acceptez de réciter une dernière fois le serment de Zahy. Mais pas en vékin !

    — Alors là, s'exclama Tan. J'en suis incapable. C'est pour ça que j'ai épousé ta mère, c'est mon bloc-note, c'est elle qui a la mémoire. Moi j'ai la diplomatie, c'est déjà bien.

    Siline gloussa, amusée par la comparaison de son père. Jinah soupira puis hocha la tête.

    — Une dernière fois, et les prochains soirs, quand je dis au lit c'est au lit.

    Les yeux de la fille s'illuminèrent. Elle sautilla jusqu'à sa chambre sous les yeux amusés de ses parents.

    — Tu es trop gentil avec elle, Petite Majesté.

    Tan roula des yeux, néanmoins souriant.

    — Tu peux parler. Et je t'ai déjà dit de ne pas m'appeler comme ça... c'est... dégradant.

    Jinah pouffa puis rejoignit sa fille, bien installée dans son lit. Pour la énième fois, Jinah fut contrainte de lui réciter le poème de Zahy. Siline le connaissait par cœur à force, et le récita en même temps que sa mère.

Lorsque le moment viendra,
la Princesse Maudite disparaîtra,
et le Prince Oublié devra choisir.

Alors il appartiendra
aux Prêtresses de Kahara
de laisser les Descendants vivre.

Le Tricheur trichera ;
et la Voleuse volera ;
ainsi le futur pourra survivre.

La pierre verte appartiendra à la Sauveuse,
comme le Futur possède la pierre bleue,
afin que la pierre blanche apparaisse.

Ensemble, elles appelleront la Grande Prêtresse ;
le pacte du Roi sera rompu,
et la Princesse Maudite sera sauvée.

    Une fois Siline endormie, Jinah rejoignit Tan dans le couloir. Celui-ci l'enlaça avant de poser ses lèvres sur les siennes.

    — Qui aurait pu deviner que l'homme le plus impulsif du monde aurait une fille aussi énergique.

    — Et qui aurait cru que la plus grande tête de mule de toute la Triade aurait une fille si têtue.

    — Tu marques un point, ronchonna Jinah.

    Tan s'assombrit subitement, ce qui inquiéta la jeune femme.

    — Est-ce que tu regrettes parfois, d'avoir choisi de vivre au château avec moi...?

    Jinah fronça les sourcils. Elle le dévisagea un long moment avant de lui faire une légère tape sur la tête. Surpris il la fixa alors qu'elle lui souriait amusée.

    — Tu en as de ces questions ! On m'a toujours dit que la magie dépasse la réalité. Mais quand je te vois toi, ou nos trois merveilleux enfants, je me dis que cela n'a jamais été si faux. Je n'échangerai cette réalité contre aucune magie, jamais...

La Légende d'AédéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant