2. Tan

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Sa mère avait essayé de le retenir, en vain. Tan la comprenait. Dix-huit ans auparavant, alors que sa mère était enceinte de lui, son père, âgé de vingt ans, avait été Élu. Il n'était jamais revenu. Sa coéquipière, elle, était revenue complètement dérangée et secouée. Personne n'avait jamais su pourquoi.

    Le Roi Perez lui donna une tape dans le dos alors qu'ils se tournaient vers le salon.

    — Bienvenue, jeune homme. Comment te sens-tu ?

    — Anxieux, répondit Tan. Peut-être vous souvenez-vous de mon père, Rénan. Il a été Élu il y a dix-huit ans de cela. Et...

    — Personne ne sait ce qu'il est devenu, termina Perez. Oui je me souviens très bien de ton père. Un jeune homme très sûr de lui et remarquablement intelligent.

    Tan hocha la tête. Le Roi lui désigna un fauteuil. Il lui conseilla de s'asseoir en attendant l'arrivée du missionnaire de Mélène, chargé de l'interroger et de faire un compte-rendu au Roi Vèl.

    Le jeune homme s'assit en lissant les pans de la veste blanche de son costume. Il passa une main dans ses cheveux bruns pour tenter de les remettre en ordre puis observa la pièce pour passer le temps.

    Le plafond représentait le sacre du premier Roi d'Obsèl. Tan ne se souvenait plus de son nom. Il l'avait appris à l'école, mais l'Histoire n'avait jamais été son fort. Il soupira. Et si le missionnaire le jugeait trop stupide pour participer à la quête ?

    Cela n'était jamais arrivé. Tous les Élus d'Obsèl étaient toujours très intelligents et débrouillards. Lui non. Du moins c'était ce qu'il pensait. Il n'avait jamais été très bon en maths ou en physique. Les sciences en général lui échappaient totalement.

    Il possédait des bonnes manières, bien-sûr, mais il était très impulsif et parlait souvent sans réfléchir.

    — Du calme, se rassura-t-il. Tout va bien se passer, ce n'est qu'un petit interrogatoire.

    Les gardes le dévisagèrent du coin de l'œil. Evidemment, il devait sûrement passer pour un idiot et un faible.

    Il inspira. Tout irait comme sur des roulettes. Passer l'interrogatoire, rencontrer l'Élue de Kahara, faire quelques petites recherches et convaincre sa coéquipière d'abandonner et de faire croire qu'ils n'ont rien trouvé. Le meilleur des plans. D'ici trois ou quatre mois, ils seraient de retour. Dénigrés pour leur échec mais en vie. Il le devait bien à sa mère.

    Un homme entra soudain dans la pièce. Tan se leva en passant de nouveau la main dans ses cheveux. Le missionnaire, l'homme le plus petit que Tan n'ait jamais vu, s'avança vers lui. Tan lui tendit la main. L'homme l'observa les sourcils froncés. Comprenant qu'il ne la lui serrerait pas, il baissa son bras, dépité.

    Le Roi qui était de retour, fit les présentations :

    — Monsieur Sinerac, voici Hélouân, l'envoyé de Mélène. Il va te poser quelques questions. Je vous en prie, ajouta-t-il au petit monsieur, prenez donc un siège.

    Toujours sans rien dire, Hélouân s'installa sur le plus gros fauteuil de la pièce, obligeant le Roi Perez à se mettre sur un autre. Tan se rassit, intimidé par l'homme. Il ne semblait vraiment pas commode.

    — Monsieur... Tan Sinerac Farshine, c'est bien ça ? commença-t-il alors avec une voix dénué de toute émotion. Votre âge s'il vous plait ?

    — J'ai dix-huit ans, monsieur, répondit le jeune homme en tentant de garder une voix neutre.

    — Avez-vous fait des études particulières ?

La Légende d'AédéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant